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[RP] Quand une vie en remplace une autre... L'azur s'éteint.

Daresha
Toi et Moi, litanie adorable
Moi sans Toi, prière impensable
Toi sans Moi, chanson improbable
Pour un Nous qui n'existera plus que dans un passé révolu
A quoi bon se perdre dans des souvenirs?


Le souffle avait été des plus légers, mais il avait dégagé suffisamment de puissance pour faire repartir le feu endormi de la colère colossale. Alors que la Sainte Raison aurait voulu qu’elle laisse le Colosse se consumer jusqu’à épuisement, elle avait craché ses mots comme un insensé jetterait de l’huile pour relancer un feu qu’il jugeait trop timide. Elle avait été pleinement consciente de ses propos acérés qui avaient atteint leur but risqué. Elle l’avait poussé en dehors de la frontière du raisonnable, là où la maîtrise n’est qu’un assemblage de voyelles et de consonnes, sans aucune signification précise. A l’instant où elle avait fini sa diatribe, elle avait ouvert la porte au déferlement de la rage. Oui, elle en était consciente mais bien loin de son esprit était la notion de regret. La flambée démoniaque avait reprit de ses belles ardeurs et ne lui laissa de toute façon pas le temps de songer à des quelconques remords.

Quand je te dis que tu aurais du te taire…

Elle s’était attendue à ce qu’il réagisse avec fureur. N’était-ce pas ce qu’elle voulait ? Mais malgré tout elle restait une femme, un être humain avec ses réflexes animaliers de peur et de surprise. Elle ne put s'empêcher de hoqueter de surprise lorsque le Géant se dressa enfin de toute sa hauteur et lorsque sa main se referma sur son cou laiteux. Tout juste eut-elle le temps d'emplir ses poumons comprimés sous son corset d'une bouffée d'air, que son dos heurtait violemment le tronc d'un arbre qu'elle ne se souvenait pas d'avoir vu auparavant. Sous sa poitrine arrondie au fil de ses grossesses, son coeur battait à vive allure, emballé dans une course folle qu'elle se forçait à maintenir. Mais son précieux organe vital avait le don de n'en faire qu'à sa tête, s'emportant sans aucune raison, trainant dans son sillage cette éternelle douleur, qu'elle n'avait jamais vraiment pris au sérieux, un peu comme une provocation envers cette vie funeste.

Elle ne broncha pas, respirant à peine de ses lèvres entrouvertes, prenant soin de ne pas quitter du regard l'Azur enflammé, même lorsque le métal vint fraichement caresser sa joue pâle. L'imposant corps collé contre sa frêle silhouette lui interdisait tout mouvement. Pas même un frisson n'aurait eu la possibilité de parcourir son échine. Le Géant lourd pesait de tout son poids et de toute sa force contre elle, mais elle se forçait à lui faire face. Elle était allée jusqu'à toucher à un point sensible, et elle en subirait pleinement les conséquences.
Impassible, elle ne put toutefois empêchée la graine de la peur émergé à nouveau en elle. Mais il n'y avait plus de jardin endormi par un hiver trop long, ni de Colosse aux yeux bleus. Il y avait à la place le salon d'un manoir réduit à néant, des pleurs de bébé et un Destructeur dont émanait une aura de colère, pour une énième crise conjugal. Elle avait eu peur ce jour là. Et elle avait connu encore cette peur lorsque sa main s'était abattue sur sa joue. Elle avait vécu avec cette peur jusqu'à sa mort maudite. Plus jamais elle n'aurait peur. Seuls ceux qui ont quelque chose à perdre ont peur. Elle n'avait plus rien à perdre.

Enfin si quand même, la vie...

Baste!

C'était à son tour de parler, de déverser ses mots à son oreille. Parle donc... Parle et je boirais tes mots, même si je ne peux pas boire tes maux. Mais parler te suffira-t-il..? Je t'écoute... Détaillant l'éclat de ses prunelles pures, ses paupières se fermaient pour ne pas le quitter du regard. Il n'acceptait pas. Aurait-il du? En tout cas elle en aurait ri si ça avait été le cas. Elle se serait gausser de sa réelle faiblesse pour tenter de le faire sortir de ses gonds. Elle n'irait semble-t-il, pas plus loin. Enfin peut être... Une légère moue prit place sur les traits de la Rose : il lui avait pris ses armes et les utilisait désormais contre elle.

Match Point!
Finalement je vais l'adorer celui là.

Baste!

Elle serra nerveusement les dents alors qu'il lui renvoyait en pleine face toutes ces terribles vérités qui baignaient son monde depuis des années. Elle se força à lui adresser un sourire narquois, ne voulant lui faire cette joie de lui montrer qu'il avait touché un point sensible. Et puis, il lui restait encore de sa volonté, loin d'être miss à mal par le baiser rougi de la dague sur sa peau; au contraire... Elle n'en était que plus décidée. Mais décidée à quoi? Que voulait-elle vraiment? Il était à deux doigts de lui donner ce qu'elle voulait, ce qu'elle recherchait. Etait-ce pour cela qu'elle était venu lui parler? Dans une volonté égoiste? C'était en partie, surement le cas...
La voix démoniaque tonnait dans son esprit, répercutait à chaque coin de son cerveau, tandis que sa respiration déjà difficile l'était encore plus. Sa main avait pressé le conduit sacré qui permettait à l'air de gagner ses poumons. Elle s'efforçait difficilement d'économiser son oxygène mais elle ne pouvait concentrer toute son attention sur ce geste machinal et vital et lui. Ne pas baisser les yeux, le provoquer, même en silence. Pour qu'il...

Tu vas la sortir cette fichue rage oui?J'te préviens, elle est têtue la Comtesse! Et montre nous que t'es pas une gouache! T'attends le déluge?

La ferme!

Je fais que l'encourager moi.

Envie de bouillir contre cette mégère incroyablement assommante et de lui crier de vive voix sa rage envers elle. Mais le Colosse ne lui en laissa pas le loisir, plaquant ses lèvres contre la sienne, comme lui l'avait fait. Si la bouche du Seigneur avait eu le gout du plaisir dans d'autres circonstances, ce ne fut pas le cas et son instinct lui intima l'ordre d'échapper à ce baiser imposé. Longues furent les secondes à tenter d'y échapper et long fut le vide à arriver.

Il lui sembla tomber de haut, comme si elle avait été jusque là surelevée. Ca avait été en quelque sorte le cas. Mais l'étreinte lourde avait enfin pris fin. Haletante, elle glissa sa langue sur sa lèvre et s'imprégna du léger gout de son sang, tandis qu'une main gantée venait essuyer machinalement sa bouche. Elle le regarda, silencieuse, toujours appuyée contre cet arbre qui n'avait rien demandé à personne, s'en servant comme support temporaire. Haussant les épaules, elle secoua négativement la tête.

Il semblerait que tu aies perdu, ma Grande...


Ta bonté est vraiment touchante, Démon. Vraiment... attention qu'elle ne te perde pas... Elle réajusta sa mise comme si de rien ne s'était passé et tomba cette fois sa capuche fourrée. Elle tenta un pas de coté, une main contre le vieux tronc noueux. Elle ne prononça mot pendant quelques secondes et détourna son regard un instant avant de revenir à lui. Petit bout de femme face à un géant. Il la balayerait comme une simple feuille s'il le voulait mais elle s'entêtait encore à le chercher, même si cela semblait bien vain.
Je resterais aux cotés de qui je dois... Si tant est que cela doive être... Le Diable n'est rien pour moi... Il ne le sera jamais... Elle lui sourit d'un air sombre. Si tu dois être une partie de leur chemin, tu le seras pour moi aussi... Qu'importeront tes desseins, je n'en aurait cure... Mais ne les entraine pas dans le tourbillon de ta folie vengeresse... Ou c'est moi que tu trouveras sur ton chemin... Je ne suis peut être pas un adversaire à ta hauteur, ni guerrière, ni mercenaire... Mais je trouverais un moyen d'avoir ta peau si cela devait devenir nécessaire...

Sans un autre regard, elle lui tourna le dos et d'une démarche lente, reprit le chemin qu'elle avait emprunté et qui l'avait menée à lui.
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Felina
Une rousse, une blonde et une brune dans la tourmente.

Tous ses sens aux aguets, corps tendu à l'extrême, iris sombres qui ne quittent pas un instant les deux combattants qui leur font face. Aucune intention d'intervenir, juste se tenir prête et faire écran entre eux et la rouquine au sol.

Si le colosse a certes reculé de quelques pas sous le choc, la blonde suicidaire ne pèse pas bien lourd dans l'affrontement. Il va la tuer … et ensuite il retournera sa rage contre la rouquine … Il lui faudra alors s'interposer à son tour … Si le visage de la Féline ne trahit aucune émotion, le sang pulse plus fort dans ses veines alors que la peur s'empare d'elle, insidieusement, sans qu'elle puisse l'empêcher. Bras qui trésaille, tremblement de sa main droite dont les doigts resserrent leur étreinte sur le garde en corne de la dague. Le douleur dans le bras gauche qui pend le long de son corps, sans vie, est toujours plus forte. Les mâchoires se crispent …

Respire … Reste concentrée, une seule seconde d'inattention et tu y passes aussi. La Mort … Alors comme ça tu veux aussi danser avec moi ? Regarde moi, j'ai peur de toi, je te hais pour que tout, mais je te laisserai pas faire ! Non tu ne m'auras pas, et tu n'auras pas cette femme que tu convoites à travers la rage d'un Diable qui n'appartient déjà plus au monde des vivants.

Totale impuissance face au massacre qui se déroule sous ses yeux … seule elle ne peut rien faire, si ce n'est ne surtout pas bouger de là. Tout va trop vite … Le colosse s'est arrêté de reculer et en un éclair le sang gicle, le bras musclé venant de percuter le visage angélique … sinistre craquement qui accompagne le grondement de la Bête. La Belle est au supplice ... Puis c'est un genou qui vient s'enfoncer dans l'estomac de la femme, le corps ploie sous le choc, un gémissement pour seule réponse. Pantin désarticulé, sans vie, soulevé de terre par le Géant, la Féline vient d'apercevoir les Azurs pour la toute première fois et cet éclair qui les traverse quand l'homme prend toute la mesure de ses actes, retombant dans l'affreuse réalité.

Vois ce que tu as fait, vois comme la colère t'a aveuglé … Tu voulais tuer la rousse, tu viens de vaincre une blonde, quelle fierté, quelle bravoure, quel exploit … La connais tu ? Sont-ce des regrets que j'aperçois dans ton regard si froid ? Trop tard … tu souffres plus encore … Elle est belle ta vengeance hein !! Par les cornes de Diable qui t'a donné vie, regarde ce qu'elle a fait de toi, machine à tuer sans plus aucune âme … Prisonnier de ta haine, esclave de la Faucheuse … Oui tu la maudit, mais te voilà à sa merci, aveuglé et marionnette armée … Elle se joue de toi et tu t'emmêles dans la toile qu'elle a tissé autour de toi. Pauvre idiot, sombre con … damné, à ne jamais être un homme. Pauvre idiot, sombre con* .. vois ta Folie !!

Et soudain, changement de rythme, tout s'affole, de spectatrice la sauvageonne devient actrice bien involontaire …A peine le temps de comprendre ce que le colosse va faire que le corps de la blonde inconsciente vole vers elle … Plus le temps de faire un pas de coté, pas l'occasion de se demander comment l'éviter … en un éclair la dague est baissée … mais trop tard …

Nouvelle zébrure rouge quand la lame entaille le bas du dos qui la percute, déchirant le fin tissu de la chemise de coton blanc. L'arme tombe au sol sous la violence de l'impact et la Féline recule. Pieds campés au sol elle tente de rester debout, se déplaçant légèrement de coté pour éviter la rouquine au sol, resserrant son bras valide autour du corps inanimé de la guerrière qui vient de lui échouer dessus … Mais rien n'y fait, elle recule d'un pas encore, ses bottes écrasant l'un des nombreux morceaux de verres éparpillés sur le sol et trébuche en arrière. Muscles qui se tendent, tête ramenée vers l'avant pour se protéger le plus possible, souffle coupé ...


Craaac... Kiiiiiiaaaaaaaaaaaaaa … !!!

Nouvelle réception sur le bras gauche, hurlement de la sauvageonne alors que l'os de l'avant bras se brise pour de bon sur le pavé dur et froid. Tout tourne, l'esprit vacille … elle va sombrer .. serrer les dents, rester consciente, garder les yeux ouverts.

Réagit vite … et le Démon, où est il ?? Foutre dieu comme ça fait mal … je dérouille là … Galère … mais qu'est ce que je fous là !! Pourquoi personne ne vient nous aider ?

Sur elle, la blonde gémit … Vivante … elle est vivante … La Féline se dégage de son emprise, rejetant sans grande douceur le corps à son coté, puis s'agenouille près d'elle, sans la regarder. Elle cherche le colosse du regard, inquiète, effrayée même. Et c'est dans un soupir de soulagement qu'elle le voit courir vers le sous bois.
C'est ça ! Fuis maintenant, va t'en ! Diable de malheur ! Va crever plus loin !

Un dernier coup d'œil vers l'ombre massive qui disparait au loin et enfin l'attention de la mercenaire se reporte sur les deux femmes au sol. Une blonde et une rousse à terre, une brune entre les deux … seule … Panique qui s'empare d'elle, que faire ? Les traits de la blonde sont impossibles à distinguer tant son visage est ensanglanté. Félina attrape le bas de son jupon blanc de son bras valide et le porte à ses lèvres avant d'en arracher un long morceau. Puis elle le plaque sur le menton à demi ouvert de la blondinette, tentant maladroitement d'épancher l'hémorragie. L'arcade sourcilière est entaillée, la joue gonfle déjà dangereusement, la chevelure dorée est maculée de sang, une mèche rebelle au reflet carmin collée contre son front en sueur. Cette femme qui devait très certainement être belle a le visage totalement déformé par le coup qu'elle vient de recevoir. Il ne l'a pas raté … sois maudit !!

Cette fois ci, l'appel au secours n'est plus murmuré et c'est un hurlement qui résonne dans les jardins de Varennes :


A l'aide !!!! J'ai besoin d'aide !!!

*Paroles de « Sombre Con »/ Rose
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Juliuz a dit : "Felina, que j'ai convertie aux joies du brigandage, une vraie perle de franchise et d'humour"
Milo1
[Onyx, Azur, chieuse, Boucle d'Or, et plus si affinités...]


Soupir. Long et profond. Comme le cri qui retentit en cet instant. Un sourire ironique vient s'esquisser sur ses lèvres. Elle est morte. Et alors ? Comme tant d'autres. Comme tout ceux qui mourraient à chaque seconde, et à qui personne ne pensait. Comme son dragon, son amour, son opale, son descendant. Tous. Ayant succombé à l'appel de la putain nécrosée, prenant son dû alors que d'autres donnaient la vie.

D'un coup de reins, il se décolle du tronc d'arbre au sein duquel il était adossé, un sourire sur le visage, brin d'herbe calé entre les dents, alors que quelques gouttes de pluie viennent lui caresser le visage. Se dirigeant vers la jeune femme brune, il hausse un sourcil alors qu'il la voit, à demi en haillon, accompagnée... de la chieuse. Décidément, le monde est petit. Hochement de tête vers la donzelle qui murmurait à l'oreille des coqs, il observe d'un oeil circonspect l'imposante bâtisse.

- B'jour, Amb'rle. Comme on s'r'trouve.

Continuer les banalités singulières ? Peut-être. Peut être pas. Surtout quand l'éclat Azuré reste accroché aux mouvements captés. Une... rouquine connue qui tient en respect un colosse, et une tornade blonde qui se jette dans la masse. Mauvais. Très mauvais. Surtout quand ladite tornade se retrouve à percuter deux autres corps. Elles sont loin, mais il peut presque entendre leurs os s'entrechoquer. Dextre retirant le brin d'herbe qui vient s'échouer à terre, senestre handicapée, gantée de noir, qui vient enrouler la taille de la brune libertadienne, alors qu'il dépose un baiser au coin de ses lèvres, Azurs plongeants un instant dans les Onyx sauvages, accent laissé de côté, comme chaque fois qu'il est troublé.

- Je reviens, fillette...

Sans un mot de plus, il parcoure rapidement la distance le séparant de la rixe, alors qu'un hurlement de femelle retentit, un long frisson lui parcourant l'échine. Corps enchevêtrés, alors que la brune repousse sans ménagement la blonde. Rapide coup d'oeil jeté au carnage, narine qui frémit, le géant s'approche lentement.

*Tu le vomis, n'est ce pas ?* * Tu connais la réponse.* *La connaître est une chose... L'entendre en est une autre. Allons mon Azur, pas avec moi...*

Trop de rouge, comme si cela n'avait pas suffit. Trop de couleurs entremêlées. Trop. Sans dire, mot, il se laisse tomber à côté d'Ilmarin, jetant un oeil à la brune qui n'avait pas l'air d'être aussi mal en point que son amie, sa main bandée repoussant quelques mèches de cheveux blonds, approchant sa joue près de sa bouche, tentant de capter un mince filet d'air.

Là. A peine imperceptible. Coeur qui rate un battement, douleur qui se propage jusqu'au creux du ventre, lui tordant les boyaux à lui donner la nausée. Azurs qui se ferment un instant, il passe doucement ses bras sous le corps de la blonde, laissant ses lèvres se poser près de son oreille, murmure s'échappant de sa prison de chair :


- T'as pas intérêt à me claquer dans les pattes Boucle d'Or. Par Thor, t'as pas intérêt...

Se relevant en grimaçant, il effleure de la botte les jambes de la brune.

- J'r'viens, j'vais voir en haut si y a d'quoi la poser.

Nouveau coup d'oeil jeté à la rouquine, il hurle en direction de l'Onyx sauvage et de la chieuse dresseuse de coqs.

- J'vous r'joins plus tard, ou c'vous qui v'nez. Puis, marmonnant pour lui même et le corps endormi. 'Fin j'vais d'jà voir les cas qu'on a en haut. Pas sûr d'trouver c'qu'j'veux pour t'sauver, Boucle d'Or. T'fais chier, vraiment...

Marches montées quatres à quatres, bousculant tout sur son passage, adrénaline toujours plus forte dans les veines, le sang fouettant ses temps, il parcoure sans les regarder les couloirs, à la recherche d'une aide quelconque. Se foutant même des protestations des domestiques, outrés que l'on vienne troubler le repos éternel de la morte. Un sourire ironique vient se planter machinalement sur ses lèvres, alors qu'il aperçoit un groupe attroupé devant ce qui doit être la chambre de feue Apolonie.

Une chambre ? Doit y en avoir d'autres dans le coin. Jetant son pied sur une porte du fond qui n'en demande pas tant, il entre dans ce qui ressemble à une salle d'arme. Couverte de hauts rateliers, épées longues à droite, jouxtant les lances, armes courtes à gauche, avec un goupillon posé sur l'un de ceux qui se trouvent au fond de la même direction. Et un banc pour étendre le corps de la blonde. Qu'il pose, délicatement, prenant garde à ne pas le meurtrir plus qu'il ne l'était déjà. Baiser déposé sur le front de celle qui considère presque comme une soeur, même s'il ne lui a jamais dit, il retourne dans le couloir, hélant les hères qui se trouvent icelieu, voix grondante et puissante, se fichant bien de troubler le pseudo-saint silence de mort, se fichant du sang qui macule ses bras.


- Bougez vous l'fion, si vous voulez pas qu'vos cadavres s'ajoutent à c'lui d'l'Apolonie. L'est morte, l'aura bien l'temps d's'r'poser plus tard, z'aurez bien l'temps d'la pleurer ! Descendant des vikings qui s'approche, dextre bandée massant machinalement la senestre gantée, Azurs aux reflets étranges et inquiétants, lueurs venues des méandres d'un passé de plus en plus présent. Y a une blonde qu'attend, m'faut quelqu'un qui s'y connaisse en méd'cine, pour veiller sur elle, l'temps qu'j'pr'vienne la rouquine. Grondement qui se fait plus profond, alors qu'il attrape l'épaule d'un homme au hasard, appuyant légèrement. Et j'ai bien dit s'y connaisse, j'veux pas d'un charlatan d'pacotille ! Compris ?

Puis, relâchant l'épaule meurtrie, sans un regard de plus, il retourne en bas, auprès de la brune et de la rouquine. Sans dire mot, il relève l'inconnue d'autorité, prenant garde à son bras dont l'angle est plus qu'étrange, lui servant de garde-fou. Voix grave et inquiète qui s'adresse à la poule naine, peu lui importe son état, qu'elle l'entende ou pas.

- L'est dans la salle d'arme, à l'étage, vite !

Azurs qui se posent sur la rouquine, déglutissant avec difficulté, avant de jeter un oeil anxieux au loin, alors qu'un écho furieux résonne des tréfonds de son esprit, quémandant vengeance.

*Bientôt...* *Non... Même les pires ordures ont le droit de vivre, regarde nous...*
Legowen
[ Quand la mort prend , tout vacille……… ]

Sortir d’une chambre le cœur dans un étau , un bientôt pour conjurer le sort quand on sait bien tout au fond de soi que d’espoir il n’y a pas , ou si peu
N’avoir pu s’éloigner d’une chambre ,s’être réfugiée contre l’embrasure d’une porte , dos au mur , bras entourant ses jambes qu’elle a repliées
et le voir , lui, passant comme un ouragan , ainsi son courrier est bien arrivé , un soulagement
S’il en est un qui peut la retenir, qui peut éloigner l’ombre qu’elle a vu dans ses yeux , c’est bien lui et un espoir qui renaît , qui veut s’accrocher , se dire que tout n’est as perdu , qu’on a vu quelques fois des miracles
Qu’elle ne pourra le laisser , lui, son frère , elle a bien vu le lien qui les unissait lors de cette journée si proche et si lointaine , deviné sa souffrance à lui, son chagrin, à elle

Temps qui s’écoule lentement , attente quand chaque minute qui passe est synonyme d’espoir quand l’optimisme refait surface balayant le sombre pressentiment qui pesait sur son cœur
Quand le silence se fait messager d’une vie qui revient

Et puis

NNNOOOOOOOONNNNNNNN

Hurlement, cri d’une âme blessée à mort, quand tout s’éteint avec la perte de l’être cher, de l’unique

Hurlement qui résonne en elle, trouvant écho en une plainte qui ne franchit pas ses lèvres ou si peu, gémissement de l’être, de chaque fibres de son âme , quand sentir brusquement ce vide qui se crée et qui envahit , vaciller dans le noir , dans ce manque qui jamais ne sera comblé et ces regrets qui jaillissent , j’aurais du

J’aurais du …… plein de projets remis à plus tard, prises par leur occupation, un voyage en avenir, quand on a vingt ans à peine , peut-on croire que la vie peut se rompre ainsi comme un fétu de paille ?

pourquoi ? dis ………pourquoi toi ? non, non, on ne peut mourir en donnant la vie, c’est trop injuste, on ne peut mourir à vingt ans , la vie ne peut être ainsi coupée , brisée, fracassée comme une rose à peine épanouie

une rose , une comptine qui lui revient , ta vie devait –elle être aussi éphémère ? les paroles résonnent dans sa tête , formant une ronde , se mêlant aux souvenirs , aux rires fugaces , pensées fragiles qui affleurent et qui se perdent en sarabande imaginaire

un accueil à Bourbon, nouvelle débarquée après une quête vaine, cœur au bord des lèvres , un sourire, une main tendue, qui l’avait empêchée de sombrer

elle l’avait présentée à des amis, et le cercle s’était élargi tout naturellement , kaléidoscope d’images qui virevoltent

un soir en taverne, une chanson, une romance chantée par un troubadour cher à sa marraine , complainte d’un arbre qu'elle avait aimé écouter , bercée par les paroles , la musique, ,tendrement lovée dans les bras d’Istel, son premier fiancé , qu’elle n’avait pu oublier , oublie t-on un premier amour ?

du petit groupe de cette soirée , elle restait seule

et la ronde continuait, miettes sur table , soirée farine , rires

Manque ……………

une envie , celle de se rendre utiles pour leur duché adoré , une en COBA , une, à la prévôté
et puis des plaintes aussi, premier deuil d’une amie trop tôt disparue , un départ, une fuite que certains n’avaient pas comprise, elle l’avait défendue ..

voyage , l’annonce d’une rencontre , des projets brutalement interrompus par ce décès injuste aussi, qui avait fait vaciller la vie de son amie , fuite encore au loin ,des coups, des nouvelles , oui je vais …oui t’inquiètes

Manque ………….

et la roue qui continue, retour , retrouvailles , retrouvailles , retour… et des fantômes qui se rappellent , comme si en ce jour, ils voulaient faire revivre le passé
Shu avec lequel elle était allée retrouver Apolonie à la perle des neiges , souvenir chaud à son cœur , Shu, le frère d’Apo, Shu qui n’avait pu supporter la perte de sa bien aimée , veillée sous les coups de ce destin qui s’acharnait

Et Sall, tant regretté , et d’autres encore , ronde …..

Manque………

Ses pas l’ont portée vers cette chambre, vers elle, elle dont s’occupent Sunie et Roxane , Leg regarde les gestes doux des deux femmes pour la laver, pour l’habiller

elle n’en trouve pas la force et remercie dans un souffle les deux jeunes femmes et puis elles sont déjà deux , elle gênerait ,
son regard s’accroche à sa marraine, teint d’albâtre , les cernes ont disparu, les traits sont reposés, presque sereins comme si la mort prise de remord avait voulu effacer les souffrances l’épuisement ,des heures , des jours précédents

comme si d’une ultime caresse , elle avait voulu , rendre au amis d’Apo, la combattante , la directe qu’ils connaissaient
chienne de vie, garce de mort , t’pouvais pas le faire avant ? cette caresse , tu pouvais pas lui laisser ne serait ce qu’un souffle pour l’aider à revenir ?

une colère qui monte d’un coup en houle puissante , contre tout ça, contre eux … , serait –elle allongée sur ce lit s’ils avaient eu une once de compréhension , serait-elle allongée sur cette couche si l’épuisement ne l’avait pas autant gagnée , à vouloir malgré tout assumer les taches con fiées, ne pas s’écouter , tout donner pour ce duché , jusqu’à ………sa vie

mourir à vingt ans….

vide , manque , chagrin , colère , qui se déversent en larmes qui coulent sans un bruit, sans un sanglot, regard accroché sur ce visage, sur ce léger sourire qui a gagné les lèvres

Tu souris mon amie, les as tu retrouvés, tous ceux qui t’ont précédée, sont –ils là près de toi, dans la lumière du soleil ? nos amis ? sois heureuse ma belle marraine, toi qui as tant donné , là où tu es à présent les humains , les coups du destin ne peuvent t’atteindre

Et ces phrases comme en écho à ce poème qu’elle avait écrit un jour de désespoir , de perte

Elle ne pensait pas, alors que sa marraine rejoindrait tous ces chers disparus , les anciens mots se rappellent en sa mémoire et d’autres s’y rajoutent

Comme les feuilles d’automne

Les unes après les autres ,se détachent, s’envolent
tend la main , espère encore un peu les retenir
puis, les libérant , doucement les laissent partir
légères dans le vent ,un instant tourbillonnent
arrêtent un bref moment leur ballet incessant
se posent, sans un bruit, retombant, paraissent hésiter
puis dans un souffle , lentement, se laissent emporter
et vers les nuages s’élèvent, peu à peu disparaissant

Vous aussi , un triste matin ,un par un, peu à peu
vous vous êtes envolés, vous nous avez laissé
suscitant en nos cœurs , ce vide infini de l’adieu
nous retrouvant si seul en nos tristes pensées
faisait-il beau ce jour ? était ce l’hiver , le printemps?
ce que je sais , c’est qu’ en nos cœurs, il pleuvait
qu’en nos âmes ,se levait bien triste, si triste temps
que par la houle de nos larmes, notre coeur dérivait


et à grand coup d’estoc cette envie de cogner
contre les coups de la vie , cette soif de broyer
crier en haine cette douleur, contre le destin hurler
tomber , se laisser un instant , court moment, aller
dans un dégout, envie subite de tout quitter ,
et puis, non, rage au cœur , se ressaisir, se relever
se battre , se rebeller, non pas encore …… rester
contre eux…, pour elle, pour eux, et … changer


et un murmure

Au revoir chère marraine , au revoir mon amie
Toi qui m’a tant appris, toi qui m’as accueillie
Sois heureuse là- bas , au delà des nuées
Dis leur, oh dis leur qu’ils ne sont pas oubliés
Qu’un jour ,de nouveau, nous serons réunis
Dans la brise légère et pure d’un souffle de soleil
Qu’alors dans les cœurs danseront des arc en ciel


Machinalement, pendant que Sunie et Roxane finissent de passer ,à leur amie non pas une robe, mais cette tenue de combattante qui lui allait si bien , elle rassemble sur un plateau qu’elle descendra aux cuisines, un linge oublié, le bol de bouillon à peine entamé, un fil

Ce fil dont une partie a servi à nouer le cordon du nouveau né , elle l’avait complètement oublié celui là, se dire qu’il lui a pris sa marraine , son amie et puis , non, lui il l’a pas demandé , il l’a pas voulu cette vie d’orphelin, lui , il est innocent ……

Et se dire qu’en lui, elle revivra, que du sang à elle coule dans ses veines, qu’il a intérêt à le montrer , et que finalement ce combat pour la vie, elle l’a en partie gagné
Bon sang, si elle avait pu le gagner totalement

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Sunie
[ Ressentie …. intérieur de l’écuyère]

Elle observe longuement Apolonie songeuse…silencieuse elle ne dit mot, elle a une envie de partir loin, très loin… et lutte chaque seconde pour rester et faire ce qui doit être fait…alors que les mots d’Apo raisonnent en échos a chaque instant pour lui rappeler de rester calme jusqu’au bout…* s'occuper de moi… gérer mes armes, mon cheval, me suivre partout* Et dans la mort aussi ?....alors qu’une voix s’élève c’est Rexanne qui veille aussi tout prêt et la sort de ses pensées… battement du coeur dans sa poitrine qui tonne de rage de voir l'Apo sans un souffle de vie...alors qu'elle lui offre un minois impassible...

– J’peux aider à faire quelque chose ? Pour la vêtir peut-être qu’on s’rait pas trop d’deux…

Sunie repose tendrement le drap sur les épaules d’Apo après avoir finit de la rendre présentable, s’assoie sur le rebord du lit, alors que le colosse avait fracassé de colère plein d’autres meuble mais pas le lit heure’sement… et pose son iris azurée sur l’amie d'Apolonie a son chevet…Les mots ont dur a sortir, ce nœud qui la serre et ces pensées qui se bouscule dans son esprits

Bruit qui raisonne dans l’couloir, azur d’la brindille qui s’détourne vers la porte, Géant qui passe chuchot’ment qui s’échappe
*P.tin mais sont tous des masses à défiler comme ça ?*Voix qui tonne et s’impatiente, esquice de sourire en coin lueur azurée qui pétille, brindille qui s’lève et s’glisse dans l’encadrement d'la porte et qui s'pose avec nonchalance, brindille coincé au coin des lèvres, va pas changer ses habitudes…

- Bougez vous l'fion, si vous voulez pas qu'vos cadavres s'ajoutent à celle d'l'Apolonie. L'est morte, l'aura bien l'temps d's'r'poser plus tard, z'aurez bien l'temps d'la pleurer!

Bien sur qu’il y a autre chose à faire qu’la pleuré, c’est qu’l’esprit cogite, la brindille dit pas un mot, elle boude ? Mouai… elle est a cran Mou…pas vraiment ‘fin si et cuilà tombe bien même en etant un geant elle s’en tape, connais pas, mourir elle s’en tape, c’etais plutôt Apo qui lui disait d’faire attention…

Et j'ai bien dit s'y connaisse, j'veux pas d'un charlatan d'pacotille. Compris ?

Ben tiens l’escuse toute trouvé s’il est capable de juger qui n’est pas charlatan c’est qu’il s’y connait qu’il s’débrouille…pliss’ment d’nez… elle a quand même r ‘connue la blonde qu’il portait juste avant … pour elle, l’amie d’Apo...…Pis non elle avait rien pu faire pour Apo alors pourquoi pour cette blonde, la brindille connaissant que d’ancien remede ceux qu’ont apprends d’puis qu’on est enfant en vivant seule sur les ch’mins, pas fait d’etudes pour ça…elle le r’garde… r’prendre la direction d’une des chambré d’a coté…jette un dernier r’gard a l’Apo..
Théa en approche dans les escaliers, r’gard qui s’croise relève assuré elle rejoint Rexanne dans la chambre vicomtal, Sunie a finit de préparer apo de sa tenue de cuir et daim, rangé soigneusement les armes… reste plus qu’le croc'mort s’ramene, elle est prête et en tenue... se retourne vers rexanne avant de partir et lui reponds...


Je te laisse veiller sur elle, Thea devrai venir aussi se joindre a toi... il faut que je prenne l'air j'etouffe...

Pas precipité dans le couloir...La brindille dévale l’escalier sans un regard ni un mot pour personne…. File pour un ailleurs, une foret a r’touver tel une sauvageonne qu’elle est dans ces moment là…… peut être ôter cette p’tin d’chemise qui tiens encore l’odeur de la mort transpiré par Apo, elle ne sait pas la rage lui monte tellement a ressentir encore ce mélange de leur parfum a elle deux…
Esprit qui cogite ….P’tin un truc qui la fait bien ch.er s’pointer dans une église pour les funérailles, et dire qu’la dernière fois elle y était sortie a coups d’chausses…il y a longtemps…tant d’années écoulés depuis…même si ont la nommait encore gamine parfois ou bien même brindille a présent une église… faire l’effort pour Apo mouais on verrai qui s’y trouve d’abor si c’étais pour y trouver d’l’hypocrisie, jamais elle y entrerai rien qu’d’y sentir d’y percevoir la f’rait vomir…les coups bas caché sous de la soit disant franchise voilà l’herpes qui avait réellement tué Apo, ça elle n’en démordait pas l’écuyère, elle l’avait trop observé la direct ces dernier temps.. Perdre son sourire…


Arrivée sur le haut des marches de l’entre du domaine…laisse glisser son regard azurée sur les silhouettes… colosse qui décharge sa rage… mains qui r’serre la dague qu’Apo avait ôter durant son accouchement …observer…étudier … et se dire plus tard quand cette rage se sera quelque peu apaisé… rattraper Anastase…protection de deux sentinelles pour un chiart pour un temps… le temps de.. Toujours le temps…
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~~~~~~~~Mon Ame a son secret, Ma vie a son Mystère~~~~~~~
Cuyère en Deuil d'Apolonie....
--Moustique


[Le hasard fait bien les choses... pas sûr]


La pitchounette se tait...

Une fois n'est pas coutume, faut l'noter... ça fait des jours qu'elle décroche pas un mot, ou si peu, ou pas beaucoup vu normalement l'débit d'paroles digne d'un fleuve à l'époque des giboulées. Elle dit rien la p'tite brunette de dix printemps.

Déjà parce qu'elle dérouille et qu'elle a les paupières qui s'ferment toutes seules. Des jours qu'ils cavalent à un train effréné... des jours sans presque s'arrêter ou si peu, bien trop peu en tout cas pour un bout d'choux même apprenti page et courien. Elle a mal partout, ses muscles c'est d'la bouillie, son cerveau c'est pas bien mieux tiens, vu qu'elle manque de sommeil depuis des plombes. Elle commence à avoir des cernes la pitchounette et pas qu'un peu, genre bien marquées et bleutées. Elle rêve plus que d'une chose, c'est s'poser, là qu'que part, même pas sur un matelas hein, non, elle s'en tamponne comme de sa première serrure crochetée, non même pas j'vous jure, juste s'allonger par terre, près de Luthi, la tête calée sur son capuchon de laine roulé en boule et de fermer les mirettes, là rien qu'un peu, un tout petit peu... juste arrêter de sentir les cahots du ch'min qui se répercute dans son dos, arrêter d'redresser sa caboche qui pique du nez à chaque fois que l'allure ralentie... C'est qu'ça en fait des lieues depuis la Gascogne, ça en fait beaucoup, trop p'être même. Elle rêve de Delle à chaque fois qu'on lui accorde de sombrer dans les bras du marchand d'sommeil, elle rêve du château, des dépendances, d'son petit coin dans le grenier qu'y a qu'elle et son chef en entourloupe qui le connaissent. Elle rêve de plus être pleine de poussière...

Et puis c'est plus drôle, non... ça la fait plus rire du tout. La dernière aventure remonte au fauchage de la carriole, ça fait un bail. Depuis rien.... rien d'autre que tout le monde qui fait la tronche. Le géant surtout. Bon l'était pas bien causant avant hein, pour lui, ils doivent être le blondin et elle, que deux mioches, deux p'tites mouches qu'on peut écraser d'un coup de poing, quoi qu'elle est pas sur que pour la ratatiner, il lui faille juste qu'un doigt. Mais quand même, z'avez toujours droit à un p'tit mot, un clin d'œil, une vacherie, un truc quoi, un truc quelconque, qui en général lui arrachait un rictus qui ressemblait à un sourire. Mais là depuis la Gascogne rien. Niet. Que dalle. Walou. Visage fermé, type porte de prison qui serait d'une humeur de chien, nerfs en pelote version grand format, celles qui servent aux fauves pour faire joujou. Ça sent l'orage autour de lui, les orages violents d'été comme elle a vu p'tite en Guyenne, quand l'ciel devient tout noir et grésille de menaces, que l'vent devient chaud et sifflant comme un avertissement. Bien pour ça qu'elle se fait toute minuscule sur sa monture - vous m'direz c'est pas dur mais si si elle y arrive- et qu'elle pipe mot... elle fait pas l'poids devant la fureur qu'elle sent, et en bon petit animal qu'elle est, elle sent bien que pour vivre heureuse faut qu'elle vive dans l'ombre tant que la tempête est pas passée. Même Luthi est pas rassurant. Il est sensible aux changements le courien. A part qu'il passe toujours ses mains dans ses cheveux couleur blé, il est au diapason de la troupe, fatiguée et silencieuse. Plus d'joie, plus d'rigolade. Même pas un sourire, ou si de temps en temps, mais rien qui puisse rassurée la petiote perdue qu'elle est. Elle ose même plus lui tirer la langue ou engager une partie de joute verbale -qu'il gagne quasi toujours ceci étant- c'est pour dire que ça va pas fort du tout.

La menotte remonte le capuchon qui lui tombe sur l'bout du pif, pour pouvoir voir s'qui se passe dans ce matin qui s'lève. Ils sont arrivés.... Varennes qu'ils ont dit... petit soupir d'soulagement qui passe sur les lèvres de la crevette. Le géant grommelle un ordre, plus qu'il ne le dit. La petite déguisée en page se laisse glisser au bas de sa demi portion de canasson et elle touche le sol avec une grimace. Quelques secondes pour prendre son équilibre sur ses guiboles qui hurlent qu'elles sont maltraités. Coup d'oeil vers Daronne. Direction les jardins. Petits pas douloureux, petits pas et mirettes vert eau qui furètent un peu partout pour chercher...
Un banc oh oui, un banc, un truc sur lequel on s'assoie, ou sur lequel on s'allonge, un truc sur lequel on peut se reposer. Elle marche, la morveuse, comme une somnambule sans un mot vers ce qui lui semble un paradis, elle claudique aussi vite qu'elle peut avant de s'écrouler sur la pierre. Puis après l'postérieur, c'est son petit corps qui s'allonge sur la pierre froide. On s'en fout qu'ce soit froid, on s'en fout qu'y est d'la rosée... c'est trop bon... c'est trop bien... c'est parfait... coup d'oeil vers Luthi... j'vais juste fermer un peu les yeux hein... juste un peu d'accord ?... pas beaucoup... et puis j'suis là... je suis... je..... les mirettes en diront pas plus. Bien trop crevée la pitchounette, elle cause plus pour de bon.

Jusqu'à ce que ses arpions touchent le sol quand elle s'lève violemment. Papillonnements de paupières qui essaient d'enlever les restes de sommeil.
Hein ? Quoi ? Ce bruit ! Luthi ?
Les yeux cherchent, cherchent. C'est quoi qu'j'ai entendu hein ? C'est quoi ? Y a un géant encore plus géant qu'Eikorc qui a pété son vase pas loin ?
Ils se posent, les yeux, sur le spectacle pas loin là bas...
La bouche de la pitchounette s'ouvre...
Le cri d'surprise sort pas...

Y a son coeur qui vient d'hurler pour elle, comme son bide qu'est en train de faire des nœuds d'un coup. Y a sa caboche qui vient se réveiller d'un coup, d'un seul, comme si on lui avait coller une décharge électrique sur l'coin du crâne.
Y a qu'une personne sur terre qui a ces cheveux là.
Y a qu'une personne sur terre qui a aussi une licorne sur sa cape.
Y a qu'une personne sur terre qui a aussi une épée comme ça.
Y a qu'une personne sur terre et elle est attaquée par le géant, le mercenaire, celui qui veut taper Daronne qui est déjà partie en courant là bas, en hurlant au Loup de les protéger....


MAMAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAN !

C'est un hurlement qui sort de la gorge pourtant nouée de la pitchounette. Y a ce qu'elle comprend pas, qu'elle a là au fond d'elle, l'appel du sang, l'appel du sang qui coule dans ses veines, cette maman qu'elle a pas vu depuis si longtemps, qui l'a envoyé loin à cause de méchants, dont le manque la prend souvent, qui lui arrache des larmes la nuit avant d's'endormir, sa maman, sa maman rousse et chevalier, la plus belle et la plus forte du monde... elle peut la reconnaître entre un millier si elle savait compter jusque là.

Elle s'en fout d'plus être Moustique, d'plus être un page de Daronne, caché, déguisé. Elle s'en fout si on sait, elle s'en fout des vilains, des menaces, de tout. Là plus rien n'existe, rien, rien d'autre que sa maman attaquée, blessée, sa maman qu'elle va défendre, qu'elle s'en fout de comment, mais qu'elle va aller rejoindre. La caboche a que cette idée fixe qui lui laboure les tempes, et le petit corps est déjà parti en avant.
Elle a juste le temps de faire quelques pas qu'on la plaque à terre rudement. C'est Luthi. Son chef, son supérieur hiérarchique en entourloupe qui la maintient au sol. Elle se débat de toutes ses forces, de tout ce qu'elle sait. Elle n'est plus rien qu'une boule de nerfs et de détresse, qui tire sur ses bras, qui se tortille, s'arqueboute, hurle.


Lais! LAIS putain cal'me toi! LAIS! J'y vais t'entends?!? J'Y VAIS!! mais tu RESTES!!

Il a beau parler l'courien, elle entend pas, elle écoute pas. Les menottes s'accrochent au sol cherchant un appui, les ongles s'plantent dans l'sol en essayant de tirer pour se dégager quoi qu'il en coute. Son cœur s'emballe sous l'effet de la peur, de cette peur panique.... elle sent plus qu'elle a mal... elle sent plus le poids du courien.... elle hurle juste comme une possédée, à s'en péter les cordes vocales, incapable se raisonner autr'ment que par ses tripes.

NAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAN !

Le blondinet a jamais dû la voir dans c't'état. P'tit diablotin qui est prête à se battre contre lui, lui ! Le seul qu'elle ait sur terre, le seul que normalement elle écoute, son double en blond et en plus grand. La rage et la douleur de la pitchounette ne semblent pas avoir de limites... Le courien resserre son emprise, écartant ses jambes des siennes pour limiter la possibilité de poussée, son corps écrasant le sien. Le côté pratique étant qu'ainsi son oreille est à portée de sa bouche... la voix en un feulement rauque et coléreux se fait menace.

Bordel tu vas m'écouter? J'te laisserais pas y foutre un arpion. Plus tu te débats et moins j'peux faire kekchose, t'entends? Lais? t'entends?? Crache de poser ton derche et j'y cours! LAIS! T'entends?

Elle peut plus répondre la pitchounette qui se vrille désespérément,recroquevillée au sol, tendue, haletante. La scène s'déroule devant ses mirettes folles, comme dans un cauchemard. Une brune qui se met devant. Sa mère qui tombe. Daronne qui arrive. Daronne qui vole.

Nouveau hurlement de bête de la pitchounette.
On l'avait pas prév'nu qu'elle avait voyagé avec le diable et que la fin du voyage se terminait dans son domaine, en enfer...


Cerridween
[Il est des tourmentes qui durent... et d'autres qui deviennent des ouragans... ]

L'avertissement n'a eu aucun effet... la mort danse, danse dans les deux regards affrontés. Si différente. Il y a dans l'eau verte la mort noire, calme, froide, icône de gravure, sa faux à la main, celle qui attend toujours l'heure, la bonne, l'exacte, pour faucher au vol les âmes quand vient leur temps. Au diapason de la rouquine ensanglantée qui se tient là, les pieds vissés au sol en garde, devant cette autre Mort. Violente, rouge, hurlante et déchainée, autour de laquelle volent les harpies. Celle qui sent le souffre, qui dégage le feu de la haine du bout de ses poings pourpres et serrés. Celle qui détruit tout sans jugement, qui broie tout sur son passage, en ouragan de démence. Oh oui je la vois ta folie, De Nerra. Je la sens, de tout mon être, elle dégouline de tes yeux qui n'ont plus rien d'un ciel d'été. Et si tu savais... que je la connais ta souffrance. Je la sais qui s'accroche partout, je la vois également, cette souffrance qui te vrille les entrailles. Je la connais, je l'ai vécue. Je connais ton envie de tuer, cette envie irrationnelle de faire payer au monde, cette perte inconcevable, de faire au monde ce que tu ressens... mais De Nerra, jamais cela ne t'apportera le réconfort. Elle est morte. Tu pourras tuer la terre entière, brûler jusqu'au recoins lointains du monde connu, tu pourras même retourner les Enfers, De Nerra... tu seras toujours seul. Et cette solitude tu ne la combleras ni dans le sang ni dans la destruction ni dans la rédemption. Tu ne la combleras jamais. Et c'est bien ça qui te détruis n'est ce pas ?

Le fauve regarde le géant...
Les sens aiguisés et aux aguets, la maitre d'arme décrypte du bout des émeraudes taillées à vif chaque mouvement. Jambe gauche en appui. Les traits du visages qui se tendent. Le regard qui veut la bouffer tout crue. Elle sent la crispation, la crispation du corps devant elle. Qui crois tu trompes comme ça ? Tout démon que tu es, j'en ai croisé assez pour savoir que tu ne renonceras pas. Tu l'aurais déjà fait après ma menace. Alors viens, viens, valser avec moi. Tu verras, je suis une partenaire particulièrement habile à ce jeu là. J'ai déjà touché les tréfonds maintes fois. Ils ne me font pas peur. Comme la caresse glacée de la mort, je les ai apprivoisé.
Les doigts de la dextre se font serres sur Miséricorde. La lame tombe en garde pendante senestre, provocante, découvrant le torse de la Pivoine qui attend. Viens donc. Bondis diable, hors de tes gonds que je te cueille. Les avertissements tomberont, graduellement les uns après les autres...

Mais tout va trop vite, bien trop vite...
Ce qui devait rester un duel, devient d'un coup cauchemar. De ceux que la Pivoine redoute. De ceux que la Pivoine exècre. Ceux... où elle ne maitrise plus rien...

Deux éclairs s'approchent, deux éclairs qui viennent troubler la scène sombre et ensanglantée. Elle n'a pas le temps, la rousse maitre d'arme de répliquer. Il y a celui blond, qui vient s'abattre sur le côté du géant. Dans la fraction de seconde qui le voit apparaître la rousse, bouche s'ouvrant dans un cri d'effroi et de protestation reconnaît... la Panthère. Ilmarin. Celle a qui elle doit, bien plus que la vie. Celle qui a accepté sans condition...
La réflexion avorte quand l'éclair brun s'empare de son corps. Les bras emprisonnent la taille ceinturée et armée. Pas le temps, trop tard, bien trop tard pour reprendre l'appui nécessaire à contrer la charge. La brune l'emporte de tout le poids de son élan vers le sol. Choc. Réception douloureuse de son flanc droit sur les pavés, ce flanc strié par une balafre qui a assombri le doublet noir en laine, buvant le sang qui s'en écoule. La douleur remonte dans son torse, jusqu'à son crâne qui percute à son tour le sol.
Latence... les images à nouveau virevoltent devant les prunelles vertes pendant qu'elle essaie de se redresser.


Ne bougez pas!! Restez à terre !!


Les mains de la rousse tentent de prendre appui sur les pierres froides, pendant que tout danse dans une ronde infernale. La panique cette fois s'empare d'elle. Ilmarin... Ilmarin et cette brune elles vont se faire....

MAMAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAN !

Le hurlement vient lui percuter le cœur. Il y a des choses qu'on reconnaît. Toujours. Et cette voix... même déformée par les années. Même déchirée par la peur...
Les émeraudes tentent de se diriger vers le cri.
Le coeur se fend...
Il y a une petite brune qui se débat au sol retenu par un blondinet... une petite brune les yeux exorbités qui hurle à la mort.
Il y a là bas... non... elle ne peut pas.... pas être là, elle...


NAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAN !

Les sinoples emplies de haine et de panique, cette panique viscérale d'une mère qui a peur pour sa progéniture et pour son clan, se reportent sur la bataille.
Une fraction de seconde qui vient percuter la rousse où le corps d'Ilmarin se fait déchiqueter par les poings et les genoux du démon.
Une fraction de seconde où sa voix se mêle aux hurlements de Laïs.
Et le corps décomposé de la Panthère vient percuter la brune qui voulait faire rempart de sa maigre stature.

Comment décrire... comment décrire ce qui se passe dans la tête de la Pivoine... déchirée... elle est prise entre deux feux. La tête encore tournante, prise entre un violent instinct maternel qui la pousse à courir à l'opposé du feu et l'urgence de s'occuper de la Panthère qui git non loin d'elle la tête rougie de sang. Ça ne devait pas se passer comme ça... non... elle ne devait pas revoir sa fille dans le sang, dans le fracas et le chaos. Elle devait la protéger... elle devait la protéger. La rousse arrive difficilement à prendre pied pendant que la danse infernale du décor continue. Tout va plus vite qu'elle. Tout. Déjà la brune est penchée sur Ilmarin. Déjà le démon s'éloigne. Et... Milo ? Est-ce bien lui qui arrive et s'empare du corps de la Panthère. Tout est trop embrumé... trop embrumé...

Nouvelle percussion contre son corps.
Laïs... Laïs pleurante qui se serre contre elle. Sa fille vient de choisir pour elle.
Le bonheur n'est pas complet... le bonheur est avorté par l'urgence... par le sang et la douleur...
La rousse se laisse tomber dans les bras du fruit de ses entrailles en grimaçant de douleur. Il faut aller vite, trop vite, si vite... la voix se fait murmure pendant que les baisers s'enchainent sur les joues de Laïs.


Ma chérie... ma vie... je dois m'occuper d'Ilmarin... je vais bien... ne pleure pas... tout va s'arranger... je t'en fais la promesse...

Déjà elle se redresse, maudissant le destin, le monde, De Nerra, ses promesses...
Déjà Milo est revenu...
Et le blondinet qui arrive en courant...


L'est dans la salle d'arme, à l'étage, vite !

La Pivoine reprend le cours des évènements. Mots lâchés pendant qu'elle s'engage vers le manoir du plus vite que son corps le permet.

On me suit et surtout on m'écoute.

La cavale claudicante s'engage... les escaliers sont une torture, les gravir une nouvelle descente en enfer. La salle d'arme... elle est là la Panthère, qui essaie de se relever le visage en sang. La rousse se rapproche, crispation de mâchoire. Elle s'agenouille, sans cas de son état.

Reste tranquille foutredieu... c'est pas le moment...

Et un poing vient s'abattre sur son visage.
Cri rauque de douleur réprimé avec difficulté. La Panthère s'effondre à genoux entrainée par l'élan du coup. Haut le cœur qui fait tressaillir son corps, vomissement de sang noirâtre sur le sol. La rousse s'agenouille en hâte et maintient la poitrine d'Ilmarin pour l'aider. Le liquide visqueux imprègne la chemise blanche de la blonde et sur les genoux de la maitre d'arme, inondant le sol. Après la crise nouveau mouvement violent pour se relever. Elle est trop agitée, beaucoup trop... Il n'y a qu'une chose pour la calmer là maintenant.


En arrière tout le monde !

Serre les dents Pivoine ça va faire mal... la main senestre agrippe le manche de sa dague, déclenchant une douleur dévastatrice dans son bras encore lardé de résidus de verres. Crispation de mâchoire pendant que la lame vient larder le bras de la Panthère qui se relève dans un cri. La maitre d'arme évite un nouveau coup, pendant que la lame rejoint son fourreau.
Luthifer essaie de se jeter sur elle et elle le repousse rudement sur la pierre de la salle d'arme.


Arrière j'ai dis !

La Panthère tangue, tangue. La jusquiame va faire effet... elle est déjà en train de se distiller dans ses veines. Elle va faire des cauchemars, avoir un sommeil agité, mais elle se tiendra tranquille, au moins un temps, le temps de la soigner, le temps de s'occuper d'elle. Le temps qu'elle n'aggrave pas son cas.
La Panthère tangue, tangue pas après pas.


Milo !

Le géant blond près d'elle réceptionne le corps de la blonde qui tombe inanimée. Arrivée de Jacques, qui manque de tourner de l'oeil devant le spectacle de carnage qui s'offre devant lui.

Jacques ! Pour la paix de cette maison mes fontes ! Vite !

La rousse agenouillée ouvre la petite sacoche qui pend à sa taille... de la ciste... vite... Son poignard attrapé avec difficulté, elle découpe un pan de chemise encore propre enfin, s'il en reste un bout. Le flacon de ciste est débouché avec rapidité, le liquide s'épand. Tamponnage de tempes et de mâchoire. Ça devrait arrêter de saigner... ça devrait arrêter de saigner vite... il le faut... il y a tellement de choses... il y a tellement plus urgent.


HRP : j'ai essayé de gérer tout et tout le monde, en cas d'incohérence, car je pense avoir fait des erreurs, je pense notamment à Félina ou Milo avec qui je n'ai pas pu parler en direct, n'hésitez pas à mp, j'éditerai dès que je pourrai.

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Felina
Quand le bain de sang prend fin, la Féline s'en va.

Cette fois ci, l'appel au secours n'a pas été vain et l'aide providentielle tant réclamée arrive sous la forme d'un géant blond. Encore un colosse mais celui là ne ressemble au démon responsable de tout ce carnage. Bien au contraire son regard est doux et la douleur se lit sur les traits de son visage, chaque parcelle de son corps transpirant de l'inquiétude qu'il semble éprouver pour la blonde ensanglantée qui gît inanimée au sol.

La Rastignac n'a pas le temps de répondre que déjà l'homme emmène la jeune femme dans ses bras. Derrière elle des hurlements d'enfants … Maman ? La rouquine se redresse soudain au son de cette voix et une gamine en pleur vient s'écraser dans ses bras. Allons bon, voilà que ce qui n'était jusqu'alors qu'un massacre pur et simple se transforme en réunion de famille ! La sauvageonne, son morceau de jupon rougi du sang de la guerrière blonde toujours en main se sent d'un coup bien inutile. La rousse est vivante bien que mal en point à en juger par la tache carmin qui ne cesse de grandir sur sa chemise qui avait dit être blanche, la blonde n'est plus là. Sous ses yeux, les retrouvailles d'une fillette et de sa mère, poing du bras valide de la mercenaire qui se crispe, souvenirs douloureux qui reviennent. Non loin, un jeune garçon qui observe la scène, émeraudes scintillantes, exactemement les mêmes que celle de la fillette et de sa mère. Mièvrerie, câlins et mots d'amour … frisson de dégout (ou de jalousie ?) qui lui dresse l'échine.

Mais soudain on la redresse sans douceur, lui arrachant une grimace de douleur dans son bras gauche brisé, et elle se retrouve aux côtés du géant blond, déjà revenu sur les lieux, seul. Il ne s'adresse pas à elle, ne la regardant même pas, mais juste à la rouquine en réclamant visiblement son aide. Déjà elle n'a plus qu'une idée, fuir loin d'ici, quitter ce lieu maudit où elle n'aurai jamais du entrer. Le Diable est parti, le danger écarté, les blessures sur le point d'être pansées.

Plus rien à faire ici. La femme aux cheveux de feu s'éloigne en compagnie de ses enfants et du colosse, la Féline ne les suit pas, se contentant de les regarder jusqu'à ce qu'ils disparaissent dans la demeure. Elle ne saura jamais leur nom, n'apprendra rien d'eux pour le moment. Les reverra t-elle seulement un jour ? Ou ne resteront ils tous que des ombres ? Venant s'ajouter la liste déjà longue des visages sans nom que la mercenaire a croisé tout au long de son périple sur les routes du Royaume depuis ces cinq longues années.

De longues minutes passent avant qu'elle ne se décide enfin à bouger. Le jupon crasseux, déchiré et taché du sang d'une Pivoine et d'une Panthère, le bras gauche pendant sans vie le long du corps, elle fait un pas vers sa dague abandonnée au sol lorsqu'elle se prenait de plein fouet la marionnette aux cheveux dorés, et se baisse pour la ramasser. La tête lui tourne, les nerfs lâchent et seule la douleur dans le bras désormais à la limite du supportable lui permet de rester consciente. Elle jette rapidement un œil vers ce dernier et grimace, pas vraiment beau à voir, pourtant le sang ne coule pas, c'est déjà ça : pas de fracture ouverte. Mais elle ne peut plus le bouger sans ressentir l'irrépressible envie de hurler de douleur. Il lui faut se faire soigner, et vite … mais pas ici, hors de question. La dague est refourrée sous le ceinturon, et c'est une sauvageonne à triste allure qui siffle sa monture et monte difficilement en selle quand l'Alezane apparaît. Plus un regard en arrière, elle ne sait si elle est seule ou non dans cette cour et elle s'en moque, elle ne voit plus rien. Elle pique des deux, sa main droite crispée sur les rênes. Elle doit gagner le village le plus proche, s'éloigner de ce bain de sang, de cette Mort bien trop présente à son goût et trouver un médicastre pour s'occuper de son bras.


Chienne de vie … adieu Varennes … Soyez tous maudits.
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Juliuz a dit : "Felina, que j'ai convertie aux joies du brigandage, une vraie perle de franchise et d'humour"
--Clemence.
[Dans un salon... Auprès du Vicomte de Nerra]

La fatigue commençait à pointer son nez, la faim malmenant son estomac et la lueur d’un nouveau matin qui se veut spécial et la nouvelle… elle était tombée, la Vicomtesse Apolonie de Nerra s’était éteinte… A cet instant, de fines gouttes de sueurs froides avaient perlés son front pale… Honte à toi avait elle crié dans la pièce… Comment Aristote se pouvait d’appeler à ses cotés une femme venant d’enfanter… A ce moment son esprit était reparti à Billy auprès de sa fille Marguerite qui n’allait pas tarder à se réveiller…Ma chérie ou que je sois mon esprit t’appartient…

Clémence avait couché le vicomte dans ce berceau soyeux, tout de blanc drapé après l'avoir nourri comme son propre enfant, bercé de ses bras étoffés, calmé de sa douce voix auvergnate... A peine l'enfant fut-il endormi, qu’elle se dirigea vers l’imposant fauteuil trônant à gauche de la porte, de là elle veillerait sur l’enfant et sur quiconque entrerait…

Enfin le repos… les yeux se ferment sur un songe des plus horribles… une naissance qui se veut être un moment de joie ultime… un moment partagé entre deux êtres s’étant juré amour et soutien… mais pas pour le Vicomte de Nerra … non… tout noble qu’il est, il devra faire face, aller de l’avant, tout orphelin qu’il sera a tout jamais…Clémence repose à présent…

Un grincement, un mécanisme se mettant en marche et voilà que la porte s’entrouvre, et là sursaut, un homme pénètre dans la pièce, le regard triste, le teint blafard…

Clémence dans un élan de courage se lève promptement, le dévisage rapidement, elle sait que toute barrière qu’elle puisse former elle ne serait pas difficile à démolire mais elle est là pour veiller sur le nourrisson… Promesse faite à son Duc… Puis un ton, un phrase légère, presque une évidence…


Je… je veux juste le voir. S’il vous plait…

Clémence baissa le regard humide, elle comprenait que trop bien ce que pouvait ressentir tout ce monde qui aurait du se réjouir d’un tel événement… L’homme s’avança jusqu’au berceau symbole de pureté et d’innocence et contempla le trésor inestimable que l’enfant pouvait représenter… L’enfant avait trouvé le repos après tant de tumultes, il fallait absolument qu’il garde ses yeux le plus longtemps possible clos, symbole de calme, mais aussi de force…

Le calme et cette ambiance paisible faisait perdre à n’importe qui toute notion de temps, après avoir laissé passer le jeune homme, elle s’était rassise… Mais plus le temps passait, plus elle craignait que le sommeil du nouveau-né n’en soit perturbé… L’homme quant à lui restait là comme plongé dans des pensées ou souvenirs… Heureux de faire cette connaissance mais triste à jamais d’avoir perdu quelqu’un de cher…

Après un bon moment, elle se dirigea enfin dans le dos de l’homme et posa sa main sur son épaule puis lui murmura…


Il vous faut le laisser dormir Sire cet enfant s’est déjà tellement fatigué, je vous en conjure, sortez et laissez le encore un peu jouir de ce repos.

L’homme regarda la nourrice les yeux humides, le cœur affaibli… aigri…Il se tourna, sa marche faisant grincer l’épais plancher…Acquiescement de tête et voilà l’homme déjà devant la porte prêt a sortir…

La jeune Billyloise, regarda l’homme disparaître puis se tourna de nouveau vers l’enfant roi… Une bise sur le front… un frémissement qui envahit le corps de ce petit être puis un soupir sincère se fait entendre…Pauvre enfant… s’apitoyer sur toi n’est pas la solution nous t’aiderons à te bâtir jours après jours, à te battre pour montrer à la face du monde, le courage dont tu as hérité à la naissance , à faire de toi un homme respectable et respecté de tous, à faire de toi le Vicomte de Nerra…
Ilmarin
NAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAN !

Un cri? Quand? Avant? Pendant? Après?
Avant, impossible. Elle se revoyait encore plonger, tête baissée, sur le flanc de son ami devenu ivre de sang, bandant ses muscles et sa volonté pour le faire reculer; juste assez pour laisser le temps à Cerrid et l'inconnue d'agir. Juste assez pour espérer détourner l'attention meurtrière, même une seconde; détourner le fleuve de rage et de sang de sa proie innocente.

Pendant alors?
Pendant que la naissance du bras noueux s'abat sur le côté gauche de son visage, éclatant la peau tendue sur les os de la pommette et de l'arcade; le sang giclant telle la source de ce fleuve dont il voulait à toute force voir grossir les bouillons.
Pendant que le coude s'enfonce dans sa mâchoire; enfonçant la joue; enfonçant la gencive; poussant l'émail à crisser dans un refus impuissant. Une dent lâche. Peut-être deux. Les ondes de souffrance se propagent en un éclair, vrillant son cerveau, vrillant ses nerfs. Tout disparait sous cette marée si longtemps oubliée qu'est une douleur sans début ni fin.
A moins que ce ne soit pendant que le genou du géant hystérique enfonce son estomac et ses poumons, chassant l'air, chassant la conscience, chassant les dernières bribes de réalité de son esprit...


Depuis combien de temps n'avait-elle pas flotté ainsi... Là-bas... Loin... Dans ce chemin caillouteux... Dans un crépuscule éternel... Où le vent joue dans les rameaux desséchés d'arbustes condamnés à dépérir sans espoir... Où les bottes crissent sur une poussière figée, hors du temps et des âges...
Aucune urgence ne saurait l'atteindre. Aucune réalité ne saurait fendre ces montagnes. C'est bon de ne plus rien sentir. C'est bon de ne plus être obligée. C'est bon d'être juste là, juste dans cette réalité, juste dans ce néant mille fois parcouru.
Un sourire flotte sur ses lèvres indemnes, le passage est toujours là.
Immuable.


A moins que ce cri ne retentisse quand le corps d'une poupée de chiffons n'heurte celui qui tente de s'interposer, infligeant une balafre égarée dans ses reins. Le genre de balafre qui n'était pas prévue au casting mais se pointe avec le plaisir sadique de rappeler qu'il ne faut jamais foncer tête baissée.
Mais qui l'a poussé? Elle? Une autre? Un autre? C'est à dire que quand votre main se tend pour pousser une double porte d'airain sculptée par l'artisan des dieux et que votre oreille est complétement engluée par un liquide qui n'aurait jamais dû s'échapper de vos veines, il est difficile de faire le point. En tout cas avec suffisamment de précision pour identifier ce cri étouffé, étouffant, murmuré. S'il avait été gémi, elle aurait pu accepter qu'il soit le sien.
Mais avec le sang en train d'emplir sa gorge...

Le rêve se dissipe soudain. Fulgurant, le message de souffrance redevient plus lumineux que le soleil de midi fixé sans ciller.
Crokie. Cerridween. La sauver. L'aider. Maintenant. Il va... Où est-il? Où est-elle? Un oeil semble coller et refuse obstinément de s'ouvrir, l'autre semble seulement capable de faire le point sur un flou aux couleurs bizarres.
Elle devrait être au sol. Sur des pavés. Sur son côté, même si le mystère duquel des deux reste entier, un fou furieux doit se préparer à l'achever. De l'autre, un chevalier à qui elle a juré de sauver sa fille et de lui amener.
Donc. Si elle est dans une panade innomable, allongée au sol ou déjà en train de se relever, la main qu'elle sent ne peut être que...

Violemment son poing s'abat sur la forme qui essayait de la toucher. Avec toute la hargne dont elle était capable; autant dire que vu son état, c'était loin d'être très efficace...
Emportée par sa force, ses genoux heurtent le sol qui aurait dû être plus dur. Mais, la consistance du sol est-elle si importante quand vous réalisez que le manque d'air vient du sang qui s'infiltre dans vos poumons pour y coaguler?
Tousser. Elle doit tousser.
Evacuer. Respirer. Vivre. Il le faut. Elle le veut. Coûte que coûte b****!
Tousse! Tu vas sortir saleté?! Visqueux... Gluant... Chaud... Epais... Il lui semble devoir cracher de la poix... Ca ne s'arrête jamais... Les dents à moitié arrachées sûrement... Plus tard... Après...
D'un coup de rein, la Panthère veut se dégager de cet étau. Dangereux. Trop dangereux. Il veut l'étouffer! C'est pas son sang mais lui!
Jamais t'entend!?!



Sa main reprend sa course vers le métal et le pousse de nouveau. Encore. Enfin.
Son regard embrasse le paysage désolé, aux âmes errantes, dont il est le Gardien.
Ce parfum unique de soufre, de sang, de larmes, de cris jetés vers l'infini emplis de malédictions envers des dieux écourtant trop tôt leurs vies. Ce véritable bouillonnement que sont les trois Fleuves interdits, aussi lourds que le liquide expulsé. fut une époque, elle se sentait presque chez elle, ici...
"Cela faisait une éternité ma Belle."
"Si seulement. Seulement quelques années humaines." Nouveau sourire, parfait, sans fissure, sans rougeur indécente, illuminant un visage parfait, sans gonflements, sans plaies. Pour la première fois, elle accepte en confiance la main décharnée qui s'échappe de la lourde cape noirâtre et referme ses doigts toujours chauds sur les siens glacés.

"Encore une intrusion sans que ton sort soit scellé? Je vais finir par te croire amoureuse." Rire sans vie dont elle connait les accents, y joignant les siens sans hésitation.
"Nul ne te hait plus que moi. Peut-être que tu dis vrai." Les spectres errants et suppliants s'écartent à leur passage, libèrent la voie menant à la carcasse dévouée au Passage. Lentement, ses jambes passent la maigre planche de bois pour prendre place dans l'embarcation, réservée à elle seule visiblement. Depuis le temps qu'il l'attend, il est vrai qu'il peut bien lui faire cette faveur...
"Sais-tu ce qui se passe, là-bas?" Ses doigts la quittent pour se refermer sur la rame et entamer leur voyage.
Un instant fantomatique s'écoule, seulement brisé par le bruit du flux sur les flancs de bois.
"En toute logique, je dirais que je meurs. Mais, même si mon ami a été une brute sans fin, il ne me semblait pas avoir été blessée au point de me retrouver près de toi." Ses jambes se croisent, en tailleur, position bien plus confortable que le maigre banc sciant les cuisses trop vivantes, habitué aux corps décharnés de son lot quotidien.
"Ton 'ami' emplit tes poumons de ton sang. Ta pire peur, n'est-ce pas? Manquer d'air."


Non... Lu... Luthi... Rhuy...

"Sans doute dois-je me débattre. Sauf que si je suis à tes côtés, cela me laisse présager que j'ai été pour le moins assommée par de puissantes drogues." Regard émeraude qui cherche la rive opposée, cherche à distinguer une Ombre familière. Pour l'étreindre, la bercer, la caliner. Lui dire une dernière fois ces mots si rares entre elles et qu'elle regrette d'avoir tu, trop souvent.
"Disons alors qu'il ne vaut mieux pas que tu vois ton état ni le devine. Oh, non qu'il ne soit grave, en dehors de l'étouffement latent qui gagne du terrain. Mais ta fierté ne survivrait pas à tes gémissements." Sourire froid qui devient néanmoins sadique. Son bras s'étend vers sa gorge et commence de doucement la serrer. Le souffle de la Blonde se fait rauque, sifflant. Sa terreur s'insinue dans ses veines, prête à galoper.

"Des gémissements ne tuent pas. La fierté mal placée, plus sûrement." Nouveau silence. Le sifflement grandit, les entoure, forcit. "Pourrais-je la revoir?"
"Oui. Si tu acceptes ma main." Sentence qui tombe comme un couperet, l'étau un instant suspendu. Belle déclaration, le Gardien, pour une fois, semble faire des efforts. Peut-être lassé. A moins qu'il ne change de tactique. Ne s'essaie à la douceur, la tentation. Le visage féminin se penche vers son épaule en une attitude interrogative. Ou amusée.
"Tu sais bien que nous deux, c'est impossible."


Dans une autre réalité, son visage tuméfié est reposé sur le bois, de côté pour éviter tout risque malgré la ciste. Deux dents arrachées par la main décidée d'un page courien, atteré de voir sa Daronne dans cet état. Pendant qu'un chevalier aux cheveux de feu examine la poupée de chiffon refusant une enième demande de son cauchemar.

Un cri lugubre s'élève depuis les entrailles de la terre. La moisson attendra, encore, d'être complétée.

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--Jacques_demaille
Panique. Pure panique. Il était si bien… Sa maîtresse n’est jamais là, il peut arranger le domaine un peu comme il veut. C'est-à-dire à l’opposé de ce qu’Elle veut. Certes, elle a cette fâcheuse manie de se présenter à la grille à l’improviste, hors de question donc de remettre les tapis, ou remplacer les tapisseries guerrières par des tableaux plus doux… Mais il garde le domaine propre, vérifie le travail du jardinier, arrange les coussins sur les fauteuils, fait ce qu’il peut pour rendre Varennes accueillant.

Jusqu’à avant-hier. Un cataclysme s’était abattu sur le château. D’abord, le coche de la Vicomtesse s’était arrêté devant la porte. Un coche… Elle qui arrivait toujours à cheval, quel que soit le temps, l’heure, même enceinte, même blessée… Et accompagnée. Les mines des deux jeunes femmes, dont l’écuyère, l’avait affolé immédiatement.
Pas tant qu’il s’inquiète pour Apolonie, mais surtout pour la maison. Il sent déjà que ça va être le bazar… Et tente de prendre les choses en main pour éviter que ça ne dégénère. Il monte en vitesse préparer un feu dans la chambre avant qu’elles n’y entrent, redescend activer les cuisines, remonte des couvertures, redescend, sort, entre… Accueille aussi… Tout au long de l’après-midi, de la soirée, ils arrivent…

Il n’est pas bête Jacques. La vicomtesse, jamais il ne l’a vue de la sorte. Le métal de ses bottes n’a tinté que faiblement alors qu’elle grimpait difficilement jusqu’à sa chambre, ceux qui l’accompagnent ou débarquent sans aucune considération pour l’ordre qu’il essaie de maintenir dans ce domaine arborent des mines défaites ou catastrophées. Les cuisinières lui font savoir que de l’eau, du sel, et autres tissus ont été réclamés… Elle accouche donc.
Pas ravi l’intendant. Accouchement, sang, saleté, sueur, draps à laver, vagissements, bruits, visites… Comment va-t-il pouvoir gérer tout ce capharnaüm ? Au moins ses amis ne le dérangent-ils pas trop. Agglutinés dans le couloir devant la chambre vicomtale, ils ne salissent pas tout. La nuit se passe sans qu’il ait une minute à lui. Entre entretenir les feux, activer les cuisinières, vérifier les grilles, faire monter la retardataire et l’informer…

La mèche si propre et bien lissée d’habitude est ébouriffée, la chemise habituellement si empesée complètement froissée. Jacques ne réalise pas vraiment. Le dandinement bien connu des maitres des lieux se fait plus rapide au fur et à mesure du temps qui passe. Les cernes se creusent sur le teint parfait de l’intendant. S’il croisait son image dans une psyché, il aurait sans doute une crise cardiaque.
Mais jamais il n’avouera qu’il s’inquiète pour cette mercenaire qu’il sert. Vous vous rendez compte ? Elle est si… Et lui aime tellement… Arf… Pourtant, plus les heures défilent, plus il réalise aux angoisses reflétées par les visages qui lui font face qu’il va la perdre. Et le flot de ses pensées inquiètes rejoint celui des invités de Varennes dans un tourbillon précipité qui s’élève au dessus du fief…
Nuit et jour se succèdent, insensibles aux prières incessantes qui suintent des murs auvergnats vers un Soleil auquel ils croient tous plus ou moins… L’intendant s’accorde quelques minutes, heures de répit avant de s’éveiller, aux premières lueurs de l’aube.

L’pas qui se précipite alors dans le château, il le reconnait. Loin d’être la première fois qu’il reçoit à Varennes le colosse. Plusieurs fois déjà le frère et la sœur se sont retrouvés ici. Légère grimace de l’intendant… Tout cela ne présage rien de bon… Oh non… Rien de bon…

Le hurlement qui déchire le jour naissant n’est en effet en rien de bon augure. Les épaules s’affaissent, les larmes roulent sur les visages qu’il dépasse, sachant qu’il y aura bientôt de l’activité dans la maison. Interpellé, happé, l’intendant ne sait où donner de la tête… Et soudain ! Une main de la taille d’un battoir à viande l’attrape par le col de travers, le soulève, le plaque contre un mur. Pupilles affolées qui reconnaissent le géant qui partage son nom avec sa maitresse. Visiblement en colère, mais la frayeur de jacques lui brouille le message, il ne comprend pas, ne sait pas ce qu’il veut, si ce n’est qu’il le lâche... Qu’il le repose avant qu’il ne se fasse dessus !
La terreur que lui inspire le colosse est telle qu’il en tremble encore alors que le seigneur se précipite déjà dans l’escalier. Et ce bruit… Mazette ce bruit ! Fracas et bris de vert… Peur envolée, il descend l’escalier, jusqu’à apercevoir la verrière, cette si belle verrière, réduite à néant. Eikorc qui passe à travers pour sortir, et un gémissement qui s’échappe de la gorge encore nouée d’un intendant desespéré… Ciel mais n’arrêteront-ils jamais ! Ce château… Ce si beau domaine… Abîmé, meurtri… Elle est morte, il est fou, et rien ne va. Rien du tout !

Les dernières marches sont courues, jusqu’à rejoindre le brouhaha salvateur d’une cuisine où les femmes viennent aux nouvelles. Clameurs et sanglots là aussi… Qu’ont-ils tous ? La vicomtesse n’aura finalement pas passé tant de temps ici qu’on la pleure à si chaudes larmes… Même si… Oui attachante… Mais diable ce qu’elle était salissante aussi !

Tellement de choses à faire… S’il ne prend pas les choses en main, c’est un tas de ruines qu’il retrouvera ce soir, à coup sur. Et c’est impensable. Imaginez, et si le prochain maitre était quelqu’un bercé dans les Arts ? Pour rien au monde il ne voudrait manquer cela… Couronner sa carrière de serviteur par … Enfin l’heure n’y est pas encore. A peine quelques minutes qu’il est là qu’on lui commande de remonter, apporter linges chauds et bière coupée à la nourrice…
Le pas est lourd mais efficace. Travailler, servir, il a toujours su faire. Alors il obtempère. Ombre invisible, celui que l’on confond avec les murs, les meubles, se faufile, fidèle anguille, affairé. Remue ménage à l’étage. Un colosse, aux cheveux plus clairs que l’autre, blonde pendue au bras, qui passe, repasse sans plus de colis, et une Rousse qui remonte. La médicastre. Dans le couloir, groupe hébété qui ne bronche pas, dans la chambre une écuyère qui s’échappe et file à l’extérieur, l’intendant s’y perd.
Et se retrouve devant cette … pièce. Salle qu’il exècre par-dessus tout. Une salle de bal, elle en avait fait une salle d’armes. C’est à ce moment-là qu’il avait compris d’ailleurs qu’il ne serait pas heureux à son service. Des rateliers, des épées, un goupillon… sur cette si belle pierre… Et un autre cri. Pressant.


Jacques ! Pour la paix de cette maison mes fontes ! Vite !

Un ordre, encore un … Ses fontes, oui… Mais… Il manque défaillir. Du sang, c’est bien du sang ? Encore ? Savent-ils tous ces gens combien c’est dur à ravoir le sang ? Les taches indélébiles que ça laisse ? Le temps passé à récu… Par Aristote et tous les saints ! Du sang, sur cette pierre calcaire ?! Mais s’il ne nettoie pas immédiatement… ça va s’imprégner… On ne reverra plus la pierre si blanche, si belle… Un instant il envisage sérieusement de commencer à laver sur le champ. Mais le regard de la Rousse se fait impératif. Alors, dans un soupir exhalant toute la misère du monde, il sort de la pièce…
Ses fontes. Elle est marrante. Elles sont où ses satanées fontes ? Il se repasse dans sa tête les évènements, le rôle qu’a joué la Chevalier dans toute cette histoire… Dans la chambre, sans nul doute dans la chambre… Il déglutit alors qu’il passe la porte. Et… la voit.

L’écuyère l’a pourtant apprêtée. Elle est vêtue. Les draps ont été changés, en soit témoin le tas de linges tâchés et suintants dans le coin. Mais qu’elle est pâle, fragile, menue presque… Et ce sourire sur ses lèvres, paisible malgré les stigmates d’une lutte qu’elle a du mener jusqu’à la fin. Jacques sent son cœur chavirer. Parce que même insupportable, même martiale, même… Elle avait fait vivre ce Varennes si cher à son cœur. Parce qu’elle est si jeune. Parce qu’il va devoir faire laver tout ce linge, et qu’il est sur que l’étoffe ne sera plus jamais vraiment blanche…
Sursaut. Les fontes ! Il les voit, sur le côté. Il s’en saisit, et ploie. Mazette ! C’est plus lourd qu’un âne mort ces choses ! Quoiqu’il ne sait pas trop ce que peut peser un âne mort, mais au moins ce poids là… Comment une femme bâtie comme la Rousse pouvait-elle porter ça ? Impensable, lui qui halète déjà avant d’avoir franchi le seuil de la porte…

L’effort est surhumain, du moins sur-jacquien… Mais il parvient à les emporter jusqu’à la salle du fond, où elle tombe lourdement près du médicastre. Regard d’excuse perdu au milieu de pommettes rougies par l’effort. Et il repart déjà, les draps maculés de sang, de sueur et autres substances qu’il préfère ne pas imaginer hantant son esprit. Il faut les descendre au plus vite, qu’une chambrière les porte au lavoir… Vite, ou ils seront perdus.


Arthurdayne
Oui, elle avait prononcé quelques mots. Lesquels, cela n'avait qu'une importance relative. Le ton avait suffi. Un brin de pitié devant la carcasse sans vie qu'il était. Un soupçon de dureté, comme dans le regard d'une louve protégeant son petit. Une esquisse d'appel à la raison. Quelle raison?

Arthur n'avait pas quitté le nourrisson du regard. Petit être fragile, qui aura la dureté des orages. S'il est comme sa mère... Qu'auras-tu d'elle, Gaspard de Nerra, fils d'Apolonie? Des yeux d'azur, dans lesquels les nuages se perdent? Un demi sourire, qui disait tant de choses entières? Ce petit plissement de nez, dès que quelque chose te froisse?

Qu'a-t-elle dit, déjà... Ah oui... Partir. Le laisser se reposer. Oui, repose toi, petit homme. Le plus dur reste à faire. Le plus beau reste à vivre. Elle t'a fait un cadeau qui n'a pas de prix. On te dira bien des choses sur elle. Qu'elle te haïssait avant même que tu n'arrives. Qu'elle ne te voulait pas. Qu'elle t'en voulait de l'état dans lequel elle se trouvait par ta faute. C'était vrai. Un peu. Mais si tu veux savoir, un jour, ce qu'il y avait au fond d'elle, ce qui se cachait et ne demandait qu'à émerger au grand jour, passe me voir. Je te dirais sur elle ce que les autres ignorent. Je ne suis pas le seul à les savoir, ses mystères, et je n'ai pas l'impudence de croire que je les sais tous. Mais j'en connais une partie, petit homme. Et si un jour tu veux savoir un peu de ce que ta mère était, passe me voir.

Partir... Le laisser se reposer. Repose toi, petit homme.

Arthur approcha doucement sa main du berceau. De ses doigts ensanglantés, il effleura la joue du bébé. Le petit cilla, mais ne se réveilla pas. De ses deux doigts, Arthur avait laissé deux traits écarlates sur sa joue. Rien de bien grave. Puisse-t-il simplement se souvenir, obscurément, de cette visite, de cette douleur terrible qu'il contribua à apaiser, s'il était possible. Arthur se pencha sur le berceau, et murmura dans un souffle:


Adieu, petit homme. Et n'oublie pas, si l'envie te prend, passe me voir. Je serais là.

Sur ces mots, Arthur disparut dans le couloir. La femme le regardait, peut être. Peu importe. A présent, il se sentait prêt. Il pouvait aller la voir. Une dernière fois, avant de disparaître, avant d'aller se laisser mourir quelque part. Avant d'aller se laisser tomber dans ce vide béant, dans ce gouffre qui lui dévorait le corps.

La porte était en piteux état. S'il y avait encore du monde dans le couloir, Arthur n'en avait pas eu conscience. Les pensées ne pouvaient se faire jour en lui qu'une par une. Aussi l'odeur de mort, de sueur, de rage ne l'atteignit pas, cette fois ci. Pas plus que la présence éventuelle d'autres personnes. Il était seul. Elle était là, allongée dans ce grand lit, mais ce n'était pas vraiment elle.

Et pourtant... Son visage était détendu. Il était beau. Elle était belle, il le lui avait dit tant de fois, et elle ne l'avait pas cru. Il fit un pas, puis un autre. Se posa sur le lit, à côté d'elle. Elle qui n'était plus là.

Elle était habillée, coiffée. Apprêtée comme jamais il ne l'avait vu. Plus de trace de lutte, plus de trace de souffrance. Juste ce visage un peu creusé. Mais sous tout cela, tout ce qui n'était pas elle, se cachait toujours cette beauté farouche, sauvage, étrange qui l'avait conquis. Derrière ses paupières closes sur un azur à jamais voilé, Arthur devinait l'horizon sans barrière dans lequel il avait plongé, corps et âme.

Evanoui, tout cela. Evanoui, mais toujours présent, comme une brume résiduelle, comme l'odeur de la pluie après une averse, le parfum d'une femme croisée dans la rue, qui continue de vous entêter lors même qu'elle a disparu à l'angle d'une ruelle.

Arthur resta silencieux de longues minutes, à essayer de ressentir au plus profond de lui cette sensation diffuse qui restait d'elle. A profiter de ces ultimes instants en compagnie de l'évanescence de son âme qui fuyait ce monde. A remplir son corps, sa peau, son coeur de l'infime présence d'Apolonie de Nerra, dame d'Orval et de tant d'autres choses. Il avait posé, sans s'en rendre compte, sa main sur la sienne. Elle était froide. Si froide.

Il est temps, Arthur. Elle s'en va. Il faut la laisser partir vers la paix qu'elle mérite. Et tu sais comme elle la mérite. Mieux que quiconque, peut être. Qu'on t'autorise à garder cette ultime faiblesse. Croire que tu la connaissais vraiment plus qu'elle ne le croyait, qu'elle avait vraiment fait tomber pour toi ses barrières. Qu'on te laisse croire que tu savais ce qui l'habitait, ce qui la déchirait. Ce qui aurait pu l'apaiser, aussi.

Pas de regret, elle te l'a dit. N'aie pas de regret.

Je n'en aurais pas, Apolonie mon horizon. Envole toi, à présent. Merci pour tout. Merci pour ces mots échangés. Merci pour tes bras, merci pour ce baiser. Merci pour mes blessures. Merci pour tout le reste. Merci pour avoir été toi, pour t'être donnée à moi, un peu. Merci pour m'avoir aimé, peut être. Merci pour m'avoir laissé t'aimer.

Otant sa main de la sienne, Arthur quitta le lit et déposa un baiser sur son front.

Merci, Apolonie.

Après un dernier regard, après s'être imprégné une dernière fois de tout ce qu'elle fut pour lui, Arthur quitta la pièce. Quitta son amour. Quitta ce foutu château, ce foutu couloir. Passa devant l'arbre à jamais marqué de son sang. Partit sur la route, en direction de Moulins, sans un regard en arrière.

Adieu, mon horizon.
--Luthi


Quelle journée... Quel voyage... Quel dawa ouais!

L'était épuisé, le blondin d'environ quatorze piges, à moitié vautré au sol, à moitié appuyé sur un mur, fixant à tour de rôle Mous', sa mater et sa Daronne.
Ce fut encore un de ces voyages dont sa patronne a le secret. La suivait d'pis un moment maintenant et il s'y faisait toujours pas. Peut-êt' parce qu'il voulait pas si faire, notez, parce que ça voulait dire s'habituer et s'ennuyer et parce qu'il avait pas envie, d'oublier.
Pourtant, il s'en serait bien passé de cte panique générale. La nana qu'ils devaient rejoindre clamser... L'Titan qui pète un boulard... Daronne qui s'interpose... Dans un soupir, il ferme les yeux, un instant; ne pouvant pas s'empêcher de revivre encore ce carnage...

L'avait eu à peine le temps de réagir quand Mous' s'est foutue à beugler. Certes, il savait pas qui c'était, la rouquine, mais fallait être benêt au dernier degré pour pas l'comprendre après le cri de terreur de sa complice. Ses bras le lançaient encore des efforts qu'il avait dû faire pour la retenir, véritable ver de terre possédé par le démon qu'il avait dû plaquer au sol de tout son poids pour la protéger de...
Son corps maigrelet d'adolescent en pleine croissance frissonne violemment, sans qu'il rouvre les yeux pour autant.
Le blondin s'est figé en voyant l'Titan balancer le corps de sa Daronne, comme une charpie ensanglantée, sur l'autre inconnue du jour. Libérant Mous', ils ont détalé comme des lapins; serrant les poings, il était prêt à se jeter sur l'auteur de ce crime. Cette forfaiture! Amis? AH! Tu parles! Ce que l'ancien bébé courien ne savait pas, c'est que ce laps de temps entre l'abandon d'Ilmarin et son arrivée lui a probablement sauvé la vie...

Un nouveau frisson le fait rouvrir les yeux, se lever d'un bond pour venir vérifier qu'elle vive encore. Il s'approche de nouveau du pageot concédé pour la nuit par l'maître d'hotel; maître d'hotel qui, au vu de ses manières, aurait eu beau temps d'être logé avec les précieuses du Marais que dans c'coin paumé de cambrousse...


- Son sommeil est agité, à cause de la drogue. Mais elle vit, ne t'inquiète pas.

Pas s'inquiéter? Les émeraudes devenues noires de colère, de questions sans réponses, peut-être un peu de rancune se posent sur la Rouquine fanée, installée près de sa Daronne, sa fille à moitié endormie dans ses bras.
Un pincement au coeur, discret, tire une sonnette d'alarme qu'il entrave pas très bien. C'est super qu'elle retrouve sa mère. Pourquoi j'me sens si seul alors... C'la première nuit depuis des années que la môme dort pas avec lui. Ouais, enfin t'as plus à supporter ses arpions gelés! Ouais mais j'aime bien les réchauffer moi...


- Qu'esse vous êtes au juste? Z'êtes sûre que z'êtes chevalier?

Pour sûr que Mous' aurait hurlé si elle avait entendu mieux-mieux sa question. Mais il avait l'doute, l'gamin.
Non parce que bon, trouvez le frein et stoppez la cariole deux secondes. Un chevalier, ça se bat. De ce qu'il a vu, elle s'en sortait pas mal, la Fanée, vu la taille du machin qui lui était tombé dessus. Jusque là, elle a bon. Mais c'quoi ces machins qu'elle a admistré... admanis... Bref! Ces machins qu'elle a filé à Daronne? Parce que sa Daronne s'est écroulée, d'un coup, sans qu'on la frappe ni la ficèle. Parce que le sang a arrêté de couler, quasiment tout de suite. Des bonimenteurs, des magouilleurs, des charlatans, il en avait vu, connu, croisé, taffé avec des dizaines. Mais aucun était efficace comme elle. Et vu qu'il croyait pas à la sorcellerie, pas plus qu'au grand Truc...


- Oui je suis chevalier. Vla qu'elle lui sourit, la Fanée... Non mais essaie pas de m'enturbanner avec ta douceur... J'veux des réponses. Mais je suis aussi médicaste. Nous n'avons pas eu tellement le temps de nous présenter. Je suis Cerridween de Vergy.

Pour sûr qu'on n'a pas eu l'temps...
Son regard revient vers Daronne, qu'il n'ose plus toucher, pour l'instant. Ses doigts sentent encore l'émail éclaté qu'il a dû chopper et finir d'arracher...
Il n'a pas encore besoin de fermer les yeux pour revoir tout ce noir rougeatre, dégouliné sur l'menton de Daronne. Pour entendre le chevalier hurler de la laisser en l'repoussant comme un malpropre. Peut-êt' ben qu'il lui en voulait encore un peu pour ça. Parce que c'est lui l'page. Lui et Rhuyzar qui doivent bosser pour la protéger. Parce qu'elle l'a envoyé valdinguer au sol comme un manant, un moins que rien; un va-nu-pied qu'il n'est plus depuis c'jour où il a suivi la route de celle qui a les mêmes cheveux que lui...
Il n'a pas besoin de fermer ces saletés de mirette pour revoir son corps s'écrouler... Pour la revoir la triturer de partout, effacer les traces brunatres, chercher les sources. Pour l'entendre lui commander de plonger ses doigts dans la bouche maintenue ouverte, pour ôter ces ratiches... La salive qu'il avale lui semble amer en s'remémorant ce toucher si particulier...
Tout comme il n'a pas besoin de se forcer pour se rappeler leurs tronches atterées. Quand ils ont voulu la bouger pour la coller dans un plumard, pour enfin soigner la Fanée, et qu'ils ont vu le petit rond visqueux à l'emplacement de ses reins. Le soulagement fut rapide, l'entaille était minime, la lame avait ripé sur les os sans rien toucher. Mais quand même...
Pourquoi que t'es si tête brûlée Daronne... Pourquoi que t'es bien la première personne pour qui... J'm'inquiète, un ti peu...


- Moi, c'est Luthi. 'fin... Luthifer 'coutejamais. 'fin Luthi quoi. T'es un mec, quoi, relève le menton et regarde la fièrement! 'bruti qui ferait honte à la Fouine... Je... Ahem... Vla qu'il tousse nerveusement maintenant. Va falloir voir à s'endurcir un chtouille mon gars. Chuis pas complétement sûr qu'vous soyez chevalier. Mais si vot'truc de médit-qui-castre l'a soigné, c'que vous devez être réglo. Si elle pige que c'est un "merci", elle est fortiche la pouliche... J... J'peux faire que'que chose pour vous?

Nouveau, petit, pincement au coeur. Les larmes de Mous' une fois Daronne à l'abri en voyant les blessures de sa mater. La joie de Mous' de la retrouver. Le piaillement de Mous' qui causait causait causait, débitait des fleuves et des fleuves de mots sans queue ni tête. Les étreintes de Mous' agrippée à la Fanée pour être sûre qu'elle était là. Les regards noirs aussi, quand il commençait à grogner. Contrarié d'être un peu laissé de côté sans comprendre, d'être un peu tenu éloigné de sa complice en forfaiture. L'avait fallu attendre qu'la fatigue gagne ce monstre de paroles pour pouvoir enfin s'entraver et faire les choses de façon respectab'. Et pi bon, il préférerait se faire arracher une ratiche comme Daronne plutôt que de reconnaître que le flot sans fin de la mome a fini par l'faire sourire, vaincu de fatigue...

De l'autre côté de la frontière plumée, les sinoples regardent un instant sans rien dire le blondinet qui la toise.
Elle réprime un petit sourire. Pas sur que vous soyez chevalier.
Il y en a un autre qui lui a dit la même chose. Est-il plus vieux que son écuyer ce jeune homme aux yeux qui essaient, en écho aux charbons dans les jardins de Ryes, de l'atteindre du fond de leur colère... Non il lui ressemblerait presque. Mais il n'a pas... Les mêmes blessures. Même s'il y a encore une question d'orgueil sous-jacente.


- Je te présente mes excuses Luthifer. Elle ne répond pas à la question. Elle répond juste à son remerciement à demi mot. Si je t'avais touché avec ma dague... Tu aurais eu de sérieux soucis. Si je t'ai repoussé, c'est pour t'éviter de te faire empoisonner. C'était le seul moyen que j'avais pour immobiliser Ilmarin sans qu'elle se blesse ou qu'elle blesse quelqu'un...

Par contre, lui, l'gamin, il s'y attendait pas, à cte réponse. Des excuses...? A lui...? Mais... 'fin... Comment dire... En dehors de son entourage, donc toujours l'même, jamais personne s'est excusé avec lui... Jamais... L'est qu'un traine-patin qu'on mate jamais... Bah alors ça... Il s'y attendait tellement pas qu'il en passe sa main dans ses cheveux, réveillant quelques épis qui s'empressent de s'emmêler.
Et en plus elle crie pas, elle continue de lui parler, doucement, presque comme Daronne, mais pas tout à fait. Plus... Plus... Il saurait même pas l'dire, ni utiliser l'bon mot, 'bruti qu'il est... Encore un peu et elle le ferait rougir. L'espace d'une seconde, il se sent important. Seconde qui s'étire, qui semble décidée à s'imposer. Il se sent... Considéré.
Elle le laisse intégrer les informations... avant de reprendre d'une voix douce, presque murmure.


- Je te dois des remerciements aussi... Pour t'occuper de Laïs. Elle semble très attachée à toi... Et si heureuse. Je crois que je n'aurai pas pu rêver mieux pour elle, jeune homme, que toute l'attention que vous lui donnez.

- C'que Daronne, elle sait s'débattre pas vrai? Sourire en coin qui se dessine, son regard s'éclaircit, reprenant des teintes plus colorées, plus douces, plus mutines aussi. Chais bien que vous aviez raison. Juste que... Haussement d'épaules fugace, finissant comme pour s'excuser à son tour, de lui en avoir voulu, pour rien. C'est Daronne quoi.

Et le vla qui se dandine, gamin adolescent qui retrouve des tics d'enfant, se balançant sur ses pieds en continuant de passer ses mains dans ses cheveux. Il se sent virer pivoine, aux mots "jeune homme", reprenant contenance in extremis, il sait même pas comment.
Pour Mous... Hum... Lais, savez, elle est p'tite, elle tiendrait presq' dans ma poche. Alors m'occuper d'elle, c'pas si dur. On graille ensemble, on s'lance des déf... Des jeux. Ouf! Pas passée loin la bourde, habituelle, qui manque de les trahir. On dort ensemble aussi, tous les soirs... Voix qui s'étire un instant, en regardant sa complice bien au chaud. J'lui fais baver des ronds de chapeau, parce que c'est une loupiote à qui j'dois montrer l'monde qu'elle a dit Daronne. Mais elle est futée savez. Silence, un instant, nouveau sourire en coin. Comme sa mater.

Sourire en réponse, même s'il est fatigué. Les émeraudes de la Pivoine se posent un instant sur sa fille pendant que ses doigts caressent doucement ses cheveux...
- Tu vas pouvoir faire quelque chose pour moi... Mais il faut que tu me jures que ce que je vais te dire resteras entre toi et moi... Ilmarin sera au courant.
- Promis Juré. J'peux cracher même s'vous voulez. Les secrets ça me connait. Balancez la sauce. Ses réticences étaient sans doute pas bien dures à abattre, mais l'gamin sait, à sa façon, montrer sa reconnaissance. Et la Fanée, elle assure. Plus de doute, elle est chevalier; alors il l'aidera, sans questions. Il y va de l'honneur de Daronne et du sien, de courien, surtout.

- Je vais devoir partir encore... Vite... Beaucoup trop vite... Un soupir passe à travers les lèvres de la Pivoine qui ne quitte pas des yeux la petite brunette qui ronfle... Un chevalier de la Licorne a été assassiné. Il faut que je rentre en Limousin. Je dois savoir. Pourquoi. Comment. Par qui. Et agir en conséquence. Les émeraudes se reportent sur le blondinet. Laïs... Je vais devoir encore la laisser. Près de vous. Le temps qu'Ilmarin se remette. Elle va sûrement être très triste. Je voudrais que tu continues de veiller aussi bien sur elle. Elle va avoir besoin de toi... D'affection... Je vous enverrai une lettre quand tout ce sera calmé. Je viendrai à Delle peut-être. Ou vous viendrez en Limousin qui sait...
- J'ferais du mieux possible ch'valier. Daronne va vite aller mieux. Pour l'infection, elle est 'achement pu douée qu'moi. J'tacherais de la faire rire.... Y sait pas trop quoi dire l'gamin. Les obligations, les départs rapides, il connait par coeur. La différence, c'est que Daronne l'traine partout, maintenant. Lais va encore être super triste... Y'a que Daronne, son régulier et lui... Faut espérer qu'il pourra assurer, cette fois... Passe que chaque fois que Lais pleure, ça lui fait, un peu, mal. L'aime pas la voir chouiner, son rire est tellement plus joli... J'causerais avec Daronne, on verra bien c'qu'on fera. Passe que Maha est morte... J'pense qu'elle voudra y aller, aussi... Dites ch'valier... Vous vous reposerez? Passe que la couleur fanée, ça vous va pas et Lais va s'inquiéter... Daronne et lui s'inquiètent jamais, c'est bien connu.

- Me reposer ? Elle sourit, pas blessée du tout par la remarque du blondinet... Elle se sait dans un sale état. Elle se sait avec des cernes, pleines d'ecchymoses... Elle se sait... Elle se sent.... J'y penserai Luthifer... Un jour... Quand je viendrai vous voir... Quand le Royaume tournera un peu plus rond...
Elle se détache doucement de sa fille. Le blondinet ne manquera pas le soupir et le regard où scintille un instant la tendresse et la tristesse. Ni la grimace qui accompagne la levée de son corps.
Je vais aller préparer Hadès. Je te laisserai une lettre que tu remettras à Laïs et une autre que tu remettras à Ilmarin...
Elle reste un instant devant le gamin dégingandé. Un instant où les sinoples se plongent dans les émeraudes. La main valide se porte sur la joue de Luthi et reste, là.
Merci Luthifer... Si un jour tu as un problème, si un jour tu te trouves dans une situation inextricable... Tu connais une personne à qui écrire et demander secours... Je n'ai pas grand chose... Mais je n'ai qu'une parole.

Fin sourire épuisé un instant... Avant qu'elle parte vers les écuries.
Non, c'moi qui vous dit merci... Il comprend pas l'gamin, c'est lui qui lui en doit une. C'est lui qui doit la remercier d'avoir soigné Daronne. De l'avoir considéré, même un instant. Dans ce réduit qui lui sert de cervelle, ce moment, fugace, volatile, lui rappelle la discussion avec Rhuyzar, au pied d'un arbre à Ryes. Sacrée bout de femme, de la trempe du Loup. Une personne de plus, un adulte de plus, qui lui montre qu'il peut être autre chose qu'un crèvelafaim, qu'un détrousseur, qui lui donne envie de rendre ce qu'il a reçu, ce pâle matin d'hiver au bord de la Seyne...
Quelque part, tout au fond, loin, caché, un faible espoir scintille. Qu'il fasse quelque chose de bien. Qu'il puisse l'aider, les aider, en retour de tout ça, qu'ils voient même pas qu'ils lui offrent. Dans un soupir déterminé, il s'asseoit à la place du chevalier, prend Lais dans ses bras, malgré la fatigue, malgré le poids pour ses crampes. La berçant dans son sommeil.

Optimiste indécrottable: tant qu'il n'a pas à retourner dans la fange, tout ne peut qu'aller mieux.


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