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[RP ouvert]L'hôtel de Culan.

--Bacchus
Oui-da, le gone ! Tu n'crois tout'd'même pas que j'vas t'laisser entrer tout de go. Baille-moi donc ces clefs, et prends cet écu. Et cours dire à la bourgmestre que la demoiselle sera à poste dans les temps.

Le gamin rechigne à laisser les clefs. Mais Bacchus sait y faire. L'écu qui brille au creux de sa main est quasi neuf, et un écu, c'est toujours bon à prendre. Avec ça, il pourra s'acheter quelques oublies. Elles ne sont pas chères, en ce moment, vu que le blé donne et que les meuniers sont souvent au moulin. Bacchus le regarde un instant s'éloigner dans la rue. Il est marrant, ce gamin. Au moins, il a des idées de son âge. Pas comme la gazoute.
Bacchus soupire. L'écu saute dans la main du gone, et machinalement, Bacchus fait sauter les clefs dans sa grosse patte calleuse.


Demoiselle, ya la bourgmestre qui vous a fait tenir les clefs, pour la salle du conseil municipal.

Anne est assise dans l'embrasure de la fenêtre, une tablette enduite de cire sur les genoux. Elle s'applique à copier encore et encore les lettres bizarres des Sarrasins. Le stylet court de droite à gauche, les lignes sont un peu penchées, mais la petite fait des progrès. Bacchus sent monter une bouffée de fierté toute paternelle. Certes, il préférerait voir sa jeune maîtresse un peu moins maigre, un peu moins pâle, un peu plus espiègle... Mais elle est comme ça. Messire Valatar - paix à son âme - ne l'a pas engendrée pour rien.
Elle lève la tête, pose tablette et stylet, court vers Bacchus. Elle ne dit rien, mais tout passe dans les yeux, chez elle. Le cocher se dandine d'un pied sur l'autre, à épier la gamine, dont les prunelles d'un si joli bleu azur passent de la joie à la fierté, de la fierté à l'angoisse.
Dans son coin près de la cheminée, Matheline se pique le doigt et grommelle, à son habitude. Le jour où elle aura fini de râler, celle-là, c'est qu'elle aura le pied prêt à riper dans le grand trou.


Merci, Bacchus.

Anne serre le trousseau contre son coeur. Elle tente de l'attacher à l'anneau passé dans sa ceinture, avec les clefs de l'hôtel. C'est Bacchus qui lui a bricolé ça, à partir d'une boucle de harnais en bronze. Toute une histoire, cette boucle. Bacchus la tient de Dame Mentaïg, qui la tenait elle-même d'un marin nordique, rencontré dans sa Bretagne natale. La tante de la petite avait un jour raconté à Bacchus qu'elle avait soigné le marin, suite à un naufrage, et qu'il l'avait remerciée en lui offrant cet objet. Il paraît que ça représente le corbeau d'Odin, un dieu païen pour qui le savoir était pouvoir. L'était idiot, ce dieu ! Il s'était privé d'un œil pour avoir le droit de boire à la source du savoir. Bacchus ne sait pas si le corbeau gravé dans le bronze est Pensée ou Mémoire. Mais peu importe, l'un comme l'autre convient à Anne.
La gamine s'escrime, ses doigts encore malhabiles et bien faibles ne parviennent pas ouvrir la boucle.


'ttendez, Demoiselle.


Bacchus s'agenouille, glisse l'anneau des clefs dans la boucle, la resserre entre pouce et index comme si le bronze n'était que guimauve. Il relève sa grande carcasse en appuyant des deux poings sur ses cuisses.

Et voilà ! Z'êtes mieux équipée qu'une douairière !

Matheline grommelle encore plus fort. Tant pis pour elle ! Faudra bien qu'elle s'y fasse. Anne aime apprendre, aime savoir, et même si ce n'est point ce qu'on attend d'ordinaire d'une fille de famille, Bacchus en connaît plus d'un qui sera content de la trouver, quand elle sera d'âge à enseigner aux autres.
Il a tendu l'oreille, Bacchus, en taverne. Il les a bien entendus, les jaloux, les hargneux, les pisse-menu. Tous ceux qui ne sont même point capables de comprendre que leur liberté n'est point diminuée par l'accroissement de celle de leur voisin, ou que le savoir de chacun contribue au bonheur de tous. Il les a entendus qui râlaient encore plus dru que la Matheline après la pauvre gamine. Trop tôt, qu'ils disent.
Bacchus a failli leur brandir sa chope sous le nez en clamant que tout le monde n'a pas la chance d'avoir leur cervelle de moineau, et que s'ils ont l'esprit lent et la vue basse, ce n'est point le cas de tout un chacun. Mais il s'est contenté de rire, et d'appeler la tavernière pour qu'elle lui remette un godet. Il avait bu le premier trop vite pour en apprécier à sa juste valeur le pétillement sur la langue.
Mais il faut tout de même prévenir la petite. Les jaloux, ça fait du dégât, quand on ne les connaît pas. Les traits de Bacchus s'affaissent, l'unique sourcil qui lui barre le front d'une tempe à l'autre se plisse par le milieu. Anne connaît ce signe.


Oui, Bacchus ?

Damoiselle, faudrait voir à ne point trop en faire, tout de même. Ça cause, en taverne. Yen a qui disent que vous allez trop vite.


Ben ils parlent d'or, ceux-là. Ya tout de même quelques personnes raisonnables, dans ce trou où on m'a envoyée pourrir.

Matheline n'a pas pu s'empêcher de faire tourner sa langue de vipère. Pas qu'elle soit méchante, mais c'est un peu trop le désordre, dans sa tête. Sûr que ce serait plus simple pour elle si Anne l'écoutait un peu plus. La pauvre femme est désarmée, face à cette gamine dont l'esprit a grandi bien plus vite que le corps. Bacchus lui jette un regard noir, qui lui vaut en retour un reniflement méprisant.
Anne a les yeux levés sur lui, et regarde quelque chose à travers sa tête, très loin en arrière. Ses petits doigts jouent avec la clef toute neuve pendue à sa ceinture.


Dame Mysouris m'a dit que mon père s'était mis à dos presque tous ses amis en faisant ce qu'il jugeait bon pour son peuple, quand il était duc. Devrais-je me montrer indigne de lui, et ne rien faire, dans le seul but d'ancrer des bâsins dans leur suffisance ?

Elle le regarde, désormais, très grave. Une once défi fait virer au gris ardoise l'azur des prunelles.

Merci, Bacchus, de m'avoir mise en garde. J'écris sur-le-champ à Dame Coco, le tribun. Elle connaît tout le monde, et saura dire aux mécontents de me venir trouver en ma MaiSoN, s'ils me veulent parler en hommes, au lieu de dégoiser en taverne comme vieilles femmes aigries.

Bacchus soupire. La petite va encore s'attirer noise. Mais elle a raison. Bacchus se rappelle à quel point Valatar tenait les lâches en mépris. Sa fille a décidément de qui tenir.


Faites, Demoiselle. J'irai porter votre courrier sur l'heure.
Anne_blanche
Damoiselle, faudrait voir à ne point trop en faire, tout de même. Ça cause, en taverne. Yen a qui disent que vous allez trop vite.

Les paroles de Bacchus sonnaient encore aux oreilles d'Anne, quelques jours plus tard. Elle était assise à sa place favorite, sur les coussins dans l'embrasure de la fenêtre, et contemplait sans la voir l'agitation extérieure. Sur ses genoux, Vignol, le chaton blanc offert par Dame Blue, ronronnait haut et fort sous les petits doigts qui lui trituraient machinalement les oreilles.
Tout aussi ronronnante, la voix du Père Comis couvrait les soupirs de Matheline.


Si le verbe dont dépend la phrase au conditionnel est à un temps du passé, la subordonnée introduite par "si" exprimant le futur ou le potentiel subira l'influence de la concordance des temps.

Anne répétait docilement, l'esprit ailleurs.

... exprimant le futur ou le potentiel subira l'influence de la concordance des temps.


Si elle allait trop vite ? Si elle se brûlait les ailes ? Si la jalousie... ? Pffff ! Qu'ils étaient donc compliqués, les grands !

Les verbes actifs sans supin et les verbes passifs utilisent des périphrases.


... et les verbes passifs ...

La passivité... Ce serait peut-être une bonne chose, après tout. Attendre passivement que sa vie s'écoule, entre les murs de cet hôtel, puis dans quelque castel où on l'aurait mariée à un nobliau local, vide, inutile. Refuser d'utiliser ses capacités, et se contenter de regarder les autres travailler...


Futurum fuisse ut + Subjonctif imparfait.

... imparfait.

L'imperfection. Était-elle obligée de s'y plier ? Non, cent fois non ! Elle n'avait pas l'outrecuidance de se croire parfaite, loin s'en fallait. Mais elle connaissait ses imperfections, et tâchait de lutter contre elles. Elle avait de beaux exemples, qui ne demandaient qu'à être suivis. Son père, au premier chef. Certes, elle ne l'avait pas connu. Mais elle réunissait, jour après jour, par le biais de sa charge de copiste académique, tous les renseignements possibles sur ce qu'avait été sa vie. Son parrain, Hugo, travailleur acharné, capable d'accomplir avec bonheur de multiples tâches, sans jamais tomber sous les coups de l'adversité. Monseigneur Otto, le confident de sa prime enfance, si proche de Dieu.
Et ici, à Vienne, Dame Draguione, sa gentillesse, son dévouement, et Messire Philippe, qui trouvait toujours le temps de s'assurer qu'elle allait bien.


Vous avez vu le cadeau que m'a fait Messire Philippe, mon père ?


Le Père Comis, depuis quelques longues minutes, ne disait plus rien. Il observait avec bonhomie son élève, d'ordinaire si attentive, et qui aujourd'hui ne l'écoutait point. La fillette rougit sous le regard acéré de son précepteur.

Et si vous me disiez ce qui vous chagrine au point d'en oublier que nous sommes en pleine leçon de latin, Anne ?

Le visage de la gamine vira au carmin. Elle coula un regard en biais à sa gouvernante qui, à l'affût, tendait l'oreille, prête à intervenir.


Mon père, je ...

Que dire ? Qui comprendrait ? Qui pouvait comprendre que, même à sept ans, on peut avoir dans la tête une cervelle de grand, et n'aspirer qu'à s'en servir ? Qui daignerait enfin la prendre au sérieux, elle qui ne savait pas encore lacer seule sa robe, ou manger ses tartines de miel sans en avoir les doigts poisseux ?
Monseigneur Meleagant lui avait dit, lors de sa pastorale, que les hommes d'Eglise sont plus proches de Dieu, et qu'à ce titre, ils sont les mieux placés pour comprendre. Monseigneur Otto était si loin ! Sans un mot, Anne souleva le couvercle de son archif et tendit au Père Comis le parchemin reçu le matin-même.


Citation:
Bien le bonjour Demoiselle de Culan

Nous avons le plaisir de vous annoncer que votre candidature au poste d'ambassadrice a attiré toute notre attention
Vous voudrez bien vous présenter au Domaine de Mercurol, siège de notre Diplomatie afin que nous puissions nous rencontrer pour un entretien a l'issue duquel nous prendrons une décision définitive.

Dans l'attente de vous voir, veuillez, Demoiselle, agréer l'expression de nos meilleurs sentiments

Espoire d’Amilly
Vicomtesse de Crots
Chancelière du Lyonnais-Dauphiné


L'ecclésiastique lut, roula pensivement le parchemin, se frotta le menton, en un geste familier.

Je ne vois rien là qui puisse vous chagriner, jeune fille.

Oh ! si, mon père. L'on va encore jaser, en taverne.

Et alors ?


Avec un soupir, le Père Comis s'assit dans l'embrasure, loin des oreilles de Matheline, et fit signe à Anne de s'installer en face de lui.


Et alors, jeune fille ?

Et si je n'étais pas prise ?

Est-ce vraiment important ?


Anne sursauta, comme si le coussin sur lequel elle venait de s'asseoir avait été une pelote d'épingles.

Mais oui ! Je veux servir mon duché, au mieux de mes capacités. Je veux apprendre ! Je veux ... être plus grande !

Loin de sourire, le Père Comis, penché en avant, coudes sur les genoux et bouts des doigts joints, hocha la tête.

Eh bien allez-y ! Allez vous présenter à Mercurol, allez au bout de votre démarche.

Mais... mais si Mère...


Madame votre mère ne pourra qu'être fière de vous voir ainsi marcher dans les traces de votre père. Oh ! Il se peut qu'elle ait ... un peu de mal à admettre que vous avez grandi, loin d'elle. Mais au pire, quand elle sera là, elle vous ordonnera de ne plus postuler à d'autres charges. Je vous crois assez obstinée pour vous attacher à lui démontrer, à elle comme aux autres, que vous êtes capable d'assumer ce que vous sollicitez.

Il se leva, prit la fillette par les mains.

Allez, Demoiselle. Faites-vous conduire par Bacchus. Vous avez ma bénédiction.
--Bacchus
Bacchus se hâte vers l'hôtel de Culan, la trogne un peu illuminée.
La nouvelle qu'il a apprise aujourd'hui valait bien le pichet de vin qu'il a allègrement entonné à la taverne de Dame Golden. Hum... La demoiselle va peut-être bien froncer les sourcils. Quant à Matheline... Bacchus n'ose même pas y penser.
Il ralentit un peu l'allure.


J'f'rais p't'êt' ben de passer au puits, moi.

Et le voilà qui prend des airs de conspirateur, se coule contre la muraille, se glisse dans le jardin par la petite porte de la ruelle, au lieu d'opter, comme d'habitude, pour la grande porte de la place. Il gagne subrepticement les écuries, retrousse ses manches, plonge les avant-bras dans l'abreuvoir, et s'asperge généreusement.

Bacchus !!!


Norf de norf !

Le pauvre homme sursaute. C'est-y qu'elle sait déjà ? Il se redresse, mais n'ose se retourner.

Bacchus ! Terminez vite vos ablutions, nous partons pour Mercurol. Le Père Comis est d'accord.


Oui, oui, mon bon Bacchus. Vous pouvez conduire notre demoiselle à Mercurol. Vous en connaissez le chemin, je crois.


Bacchus se retourne enfin, honteux, et s'essuie longuement le visage dans un pan de sa chemise, autant pour cacher les marques de son passage en taverne que pour se sécher.

Mercurol... Oui, j'y seu été, conduire Messire vot' père et Dame Mentaïg, il y a des ans. I' voulaient faire accord avec le Dauphiné, en ce temps.

L'évocation du temps d'avant lui tire des larmes. C'est un tendre, Bacchus. Il ne faut point lui parler de cet heureux temps quand il a bu un coup de trop. Et lui qui apportait une bonne nouvelle ! Il souffle comme un boeuf, se dandine sur ses grosses jambes, sous l'oeil étonné de la demoiselle et du bon père. La nouvelle. Voilà. Il va lui dire la nouvelle, avant qu'elle ne pose des questions.

Demoiselle Anne, yavait une nouvelle annonce de Messire Argael, ce jour.

Il la regarde en coin, guette ses réactions.

C'est rapport à vot' parrain.

La petite, qui s'impatientait déjà, bout littéralement. Mais on lui a appris que la patience est une vertu aristotélicienne. Alors, elle se contient. Ses doigts jouent avec le corbeau de bronze à sa ceinture.


L'est nommé Secrétaire d'Etat du Berry !

Pas de doute, l'accent est triomphant. Anne bat des mains, ravie.

C'est vrai ? Il va travailler avec Dame Marie-Alice et Messire Argael ?

Bacchus hoche la tête, tout heureux de la joie d'Anne.

Vi vi. A Paris, et tout ça.

S'il espérait y couper, de cette randonnée à Mercurol, c'est raté. Anne se retourne vers le Père Comis.


Vous aviez raison, mon Père. Je dois marcher dans les traces des Cornedrue. Bacchus, attelez. Nous partons sur l'heure.

Elle court vers la maison, pour y laisser son bliaud et troquer ses sabots contre les superbes bottes de cuir qu'elle a achetées la veille. Bacchus pousse un discret soupir de soulagement. Sa jeune maîtresse n'a rien vu. La gamine se ravise, s'arrête net, et lance par-dessus son épaule :

Et rincez-vous la bouche, Bacchus ! Vos chevaux nous mèneront à la douve, s'ils respirent votre haleine !

Elle éclate de rire et repart vers sa chambre. Le Père Comis se caresse de l'index la lèvre supérieure.
Tout penaud, Bacchus s'en va atteler.
Anne_blanche
C'était bien loin, Mercurol. Dix lieues, pour le moins. L'on y parvint après vêpres. Tout au long du voyage, Anne se repassa les questions qu'elle supposait prêtes à lui être posées. Elle connaissait déjà la Chancelière, puisque celle-ci l'avait invitée à son mariage, le mois précédent. Elle l'avait, depuis, aperçue dans les corridors de l'Académie, quand elle s'y était rendue pour postuler. La fillette se sentait donc moins intimidée par la personne que par sa future fonction.

Le retour se fit à la nuit close. Anne entendait, depuis l'intérieur du coche, aux rideaux de cuir soigneusement tirés pour faire pièce à la bise, les encouragements prodigués par Bacchus aux chevaux. L'on suivait l'antique voie tracée par les Romains, fort heureusement. La route était plutôt bien entretenue, et les cahots pas trop nombreux.
La fillette ne se lassait pas de relire la lettre d'accréditation remise par Dame Espoire. Elle se sentait des ailes, des envies de chantonner.


Joieux de cuer en seumellant estoye
Quant je sentoie vostre tres doulce alayne
Et vo gent corps, ma dame soveraine,
Qu'entre mes bras si doucement tenoye.


Elle ne "seumelait" point, mais la pointe de sa botte bleue toute neuve battait la mesure sur le plancher du coche.
Il fallut que Bacchus parlemente quelque peu, aux portes de Vienne, pour qu'on les laisse entrer à heure si avancée. Mais la formidable moustache du cocher commençait à être connue, et l'on put enfin regagner l'hostel de Culan.


Demoiselle, ya Dame vot' Mère qui arrive !

Matheline ne laissa même pas le temps à Anne de descendre de voiture. Le visage de la camérière, d'ordinaire si soucieux, rayonnait.

Elle est là ? Et Blanche et Gabriel ?

Non, Demoiselle, point encore. Elle aurait dû être là, mais il y a eu contretemps.

Ah ?

Anne, qui allait sauter hors du coche, s'interrompit, déçue. Matheline était vraiment insupportable ! Quel plaisir prenait-elle à la faire ainsi passer de la joie au bord des larmes ? Elle frissonna, saisie par la fraîcheur de la brume qui montait du fleuve, et se répandait en longues traînées blanchâtres par toutes les rues et ruelles.

Venez me conter cela à l'intérieur, Matheline. J'espère que vous avez entretenu le feu, je suis gelée.

Elle précéda sa gouvernante dans la grand-salle, et se posta dos à la cheminée.

Alors ?


Dame Maryan est à deux lieues de Vienne, Demoiselle, avec Messire Gabriel. Leur coche s'est embourbé du côté de Chuzelles, dans une vallée qu'ils appellent la Combe Bleue, par ici.

La lèvre de Matheline se plissait dans une moue dédaigneuse. Tout ce qui n'était pas le Berry lui semblait peu digne d'intérêt, et elle n'avait fait l'effort de retenir le nom que le temps de le répéter à sa jeune maîtresse.

Dame Maryan et Messire Gabriel passeront la nuit dans une auberge de là-bas. Ils ont envoyé le fils de l'aubergiste prévenir. Va falloir réparer une roue du coche.

Bien bien ...

Anne contemplait la pointe de ses bottes, pensive. Elle ne comprenait pas trop ce qui se passait dans sa tête. Sa mère, cela faisait si longtemps qu'elle ne l'avait vue ! Elle se languissait de ses bras, de ses rares baisers, et en même temps, se demandait comment la vie allait s'organiser, à l'hôtel de Culan, quand Maryan serait enfin là. Et Gabriel ? Et Blanche ? Tiens, Matheline n'avait pas parlé de Blanche.
Anne pâlit, en proie à une soudaine angoisse.


Matheline !


Oui, Demoiselle ?

Vous avez dit "avec Messire Gabriel". Blanche n'est pas avec eux ?

Ben je suppose que si, Damoiselle. Le gars de l'aubergiste n'a point parlé de Demoiselle Blanche. Mais je vois pas bien où c'est qu'elle serait d'autre qu'avec Dame Maryan.


Oui, bien sûr...

Malgré l'heure tardive, le sommeil fut long à venir. Blotti contre la fillette, Vignol, le chaton blanc, emplissait la chambre de ses ronronnements. Anne avait pris l'habitude de le laisser s'installer sous l'édredon. Elle l'écoutait, et oubliait ainsi les craquements de la charpente, le sifflement du vent dans la cheminée ou sous la porte, tous les menus bruits de la nuit qui l'effrayaient.
Matines et laudes étaient passées depuis longtemps quand elle s'endormit enfin.
pnj
"Norf de norf ! Maudits coches berrichons ! Ces satanés caissons inconfortables ne valent pas un fifrelin !"

La Vicomtesse descendit du modeste carrosse en un saut furieux, jetant au passage un regard acéré à cet incapable de Jannequin, le cocher, qu'elle avait engagé par dépit, ne pouvant trouver mieux, voilà quelques jours de cela.
L'unique raison l'ayant conduite à mettre ce braillard aviné à son service était la stature de ce dernier, formidablement imposante, qui ne manquerait pas de repousser les éventuels marauds, faquins et autres rebuts de potence mal intentionnés.

Nul vaurien ni manant ne se présenta pourtant au cours de la chevauchée jusqu'en Lyonnais-Dauphiné, mais l'équipée dût faire faire à un autre genre de problème.

Maryan contempla la roue fêlée du coche, les lèvres pincées de contrariété, et finit par donner ses ordres, l'air sombre et le ton sec :


"Dételez les chevaux. Nous passerons la nuitée dans la petite auberge croisée tantôt. Jannequin, vous resterez ici. Je ne tiens pas à ce que mes malles soient pillées par votre faute, pour la seule raison que vous êtes incapable de conduire correctement un carrosse.
Et ôtez donc cet air de goujon de votre visage, il ne sert qu'à accentuer le caractère sot de votre physionomie."


Un dernier regard méprisant à l'endroit du pauvre cocher, et la jeune Vicomtesse gagna sa monture, la chevauchant élégamment.
L'on rejoignit bien vite la-dite auberge, dans laquelle Maryan s'empressa de se débarrasser de ses vêtements de voyage. Ceci fait, elle descendit en compagnie de quelques uns de ses valets dans la grande salle, où l'on servait quelques collations aux gens de passage.
La jeune femme s'attabla, et profita de la présence de l'aubergiste pour s'adresser à lui :


"Seriez-vous assez aimable pour faire parvenir un billet à l'hostel de Culan, situé dans le petit village de Vienne ?
Il s'agit de prévenir ses occupants de ma situation. Dites-leur que je suis retenue ici pour la nuit, suite à un fâcheux accident survenu dans la vallée de la Combe bleue.
Je crains qu'il ne faille changer la roue de mon coche. Nous ne pourrons repartir que demain.
Adressez le message à Matheline. Et voici pour vous."


Quelques piécettes négligemment remises entre les mains de l'aubergiste, et ce dernier eût tôt fait d'envoyer son jeune fils porter l'information.


[Le lendemain]

"Crénom, Flamenque !! Faites donc plus attention ! Vous allez finir par me rendre chauve, à me tirer les cheveux de la sorte !

- Ben Dame ! C'est que j'suis cuisinière, moi, pô femme de chambre !

- Vous savez bien tresser la pâte à brioche minutieusement ! Faites donc preuve de la même délicatesse avec ma chevelure, empotée !"


La cuisinière répondit par un grognement, mais se plia docilement aux ordres de sa maîtresse. Il ne s'agissait pas d'agacer la noblionne, sous peine de la rendre exécrable pour tout le restant de la journée.

La coiffure dûment achevée, l'on porta une missive à la Vicomtesse, qu'elle lût rapidement, un sourire enchanté se dessinant peu à peu sur ses lèvres vermeilles.


"Voilà qui est fort bien ! Un charmant homme me propose ses services pour la réparation de notre coche. Étant donné que ce traîne-musette de Jannequin n'arrive à rien avec cette fichue roue brisée, je m'en vais accepter cette offre avec la plus grande joie."

La jeune noble manda son nécessaire d'écriture, et s'attela bien vite à la rédaction d'une réponse.

Citation:
Messire Balian,

C'est avec grand plaisir que j'accepte votre aide, qui me sera à vrai dire bien précieuse.
Il semble que la roue de mon coche soit trop fêlée pour qu'on puisse songer à la réparer. Aussi, une autre roue serait une bénédiction. L'auberge où je me trouve est assez isolée, et nous gagnerions beaucoup de temps avec votre aide.

Je suis moi-même bien impatiente de retrouver ma fille Anne, et vous serais extrêmement reconnaissante si vous pouviez me prêter main-forte dans ce petit contre-temps.

Bien à vous,

Maryan d'Ambroise
Vicomtesse de Culan
Sirbalian
Après avoir écrit sa missive et l'avoir envoyé dans la vallée de la Comble Bleue gràce à quelques pièces données à un jeune garçon afin de l'y apporter, Balian s'occupa comme chaque matin de son fils.

Mais ce matin fut néanmoins différents des autres car il avait décidé qu'il était temps pour son fils de commencer un apprentissage. Et ne pouvant le former lui même pour l'instant n'ayant pas encore acheter d'échoppe, c'est chez son chef Spacewolf qu'il avait décidé de l'emmener.

Son chef de section était boulanger et un peu d'aide lui serait utile. Balian expliqua donc à son fils qu'il était plus que temps d'apprendre un métier au lieu de trainer dans les rues à faire des bétises. Evidement celui-ci ne semblait pas des plus enchantés mais il n'avait pas son mot à dire.


Quoi ? ou Q'tu m'emmenes ? Chez spacewolf.. le.. enfin.. ton..

Chelsey ouvrait de grand yeux ou l'on pouvait y lire l'étonnement et la crainte, il faut dire que Space était bien robuste. Mais à 14ans, il etait plus que temps de se mettre au travail.

Chez Spacewolf mon chef de section qui est aussi boulanger à ses heures perdues, il a grand besoin d'un apprenti et toi il est grand temps que tu travailles mon fils ! J'ai du travail moi aussi à la garnison et je ne peux passer toutes mes journées à te surveiller.

Après l'avoir déposé presque de force à la boulangerie et s'être assuré qu'il y était entre de bonnes mains, Balian parti en direction de sa garnison. Un cours de perfectionnement de tir à l'arc l'attendait et il avait grand besoin d'entrainement.

Après une dure journée de labeur..

Plus habitué à s'entrainer de la sorte, c'est d'un pas lent et lourd que Balian rentra chez lui. Chelsey était déja rentré et s'était endormi sur le sofa, ce qui fit naître un petit sourire sur les levres de son père. Doucement pour ne pas le réveiller, il se diriga vers la cuisine afin de préparer un simple repas quand il découvrit sur la table une missive.

Déja des nouvelles de la Vicomtesse de Culan ? Balian ne savait même pas s'il aurait réponse et là une missive l'attendait. Il reconnu de suite le blason et comprit qu'elle lui avait répondu. Il s'empressa de l'ouvrir et la lire avant de préparer le repas.


Mince alors une roue félée..

Balian voulu alors répondre à nouveau mais le porteur de la missive était déja loin sans doute, il se faisait tard.. C'est alors que Balian décida qu'il partirait le lendemain aux aurores afin d'apporter une nouvelle roue. S'il partait assez tôt, il serait rentré pour aller s'entrainer en garnison avec les autres.

Ne restait plus qu'à trouver la roue mais çà ne serait pas chose difficile. Il avait acheté une petite maisonnée il y a peu et le grenier regorgeait de paniers, de meubles anciens, de bric à brac en tout genre amassés en haut. Il alla fouiller le grenier tandis qu'un lapin grillait par dessus les braises et en revint avec une roue certes point neuve mais en bon état.

Tout était pret, un bon repas, une nuitée reposante et demain il prendrait la route à l'aube.
Anne_blanche
Anne dormait, d'un sommeil agité. Bien calée contre ses oreillers, presque assise dans le lit, elle respirait trop vite, et la sueur emperlait son front, vite absorbée par le bonnet de coton qu'elle portait la nuit.
Soudain, Vignol s'agita. Juché sur l'estomac de la fillette, il fit le gros dos, cracha. Anne s'assit toute droite, les yeux grands ouverts dans l'obscurité à peine troublée par la veilleuse que Matheline laissait toujours à son chevet. Les braises d'un trop maigre feu, dans la cheminée, s'étaient depuis longtemps éteintes.
La porte de la chambre s'entrouvrit. Les yeux de la fillette s'écarquillèrent encore. Le battant, qui d'ordinaire gémissait au moindre mouvement, glissait silencieusement sur ses gonds. Pourtant, Anne ne se souvenait pas d'avoir vu Bacchus les graisser, malgré les demandes répétées de Matheline.


Bonsoir, Anne.

Une haute silhouette venait d'entrer dans la chambre. C'était un homme, très brun, vêtu de bleu. Il sembla immense à la fillette, qui agrippa son drap et le remonta jusqu'au ras des yeux, à la recherche d'une illusoire protection. Elle voulait crier, appeler Matheline, Bacchus, sa mère, mais aucun son ne sortit de sa gorge. L'homme s'approcha du pied du lit, s'y appuya des deux mains.

Ben quoi, voir son père, ce n'est pas si terrible. Ça arrive à tout le monde!
Ça m'est arrivé plein de fois.


Son père ? Les lèvres d'Anne s'agitèrent. Et soudain, comme par enchantement, toute terreur s'évanouit.

Mais ... mais ... Je ne l'ai pas connu, mon père. Je ne sais même pas à quoi il ressemble. Mère ne m'a jamais parlé de lui.

Tu as bien vu des portraits.


Non, Anne n'avait jamais vu de portraits de son père. Tout ce qu'elle savait, c'est Dame Mysouris qui le lui avait dit. Elle lui ressemblait. Même ossature fine du visage, mêmes cheveux bruns, même yeux très bleus. Les portraits, à Culan, sa mère les avait tous retournés contre le mur, et elle le dit à l'inconnu.

Oh la vilaine garce !

Choquée, la gamine lâcha son drap, et fit front.

Non ! C'est parce qu'elle pleurait tout le temps en les regardant !

L'homme sembla un instant décontenancé.

Et Gabriel, il ne t'a jamais parlé de moi ?

Gabriel, ça fait des mois et des mois que je ne l'ai vu. Il est resté avec Mère à Noirlac, et ils ne sont toujours pas arrivés à Vienne.


Le père d'Anne - c'était bien son père qui, par un miracle que la fillette ne s'expliquait pas, se tenait debout au pied de son lit - attrapa la tablette enduite de cire qu'elle gardait toujours à portée de main, et se mit à griffonner quelque chose.

Un jour, Gabriel m'a dessiné. Ça donnait ça.

Il tendit la tablette. Anne la prit timidement, en jetant des regards en coin à son père. Qu'il était beau ! Et si jeune ! Le dessin était celui d'un jeune enfant.



Elle ouvrit de grands yeux.

Je croyais que celui avec un gros nez, c'était Parrain.

Parrain ? Tu as un parrain ?

Oui, bien sûr. C'est oncle Hugo.

Hugo a un nez immense. Moi, j'avais le nez un peu tordu à cause de Maleus, mais c'est tout. Tu ne connais pas Maleus, si?

Non.

Un brave garçon. Evite-le.

Pourquoi dois-je l'éviter si c'est un brave garçon ?

Parce qu'il va te tordre le nez. Il fait ça à presque tous les Culan.

Vous croyez ? Peut-être pas aux filles.

On tutoie les morts, Anne! Ta mère ne t'a rien appris?


La fillette se sentit rougir.

Ben... Ce n'est pas sa faute, à Mère. Elle pleure, ça lui prend tout son temps. le Père Comis qui me donne des leçons de latin, d'arabe, de géométrie, de solfège... Et je lis les parchemins de tante Mentaïg, et les livres de la bibliothèque de Culan, et les parchemins de l'Académie Royale. Et je vais apprendre encore ! Aujourd'hui, j'ai rencontré dame Ysandre, aux ambassades. Elle m'a demandé si j'étais la fille de Maryan de Culan.

Qu'est ce que tu faisais dans une ambassade?


Très fière, Anne redressa la tête.

Je suis ambassadrice du Lyonnais-Dauphiné en Berry !

A sept ans ???

Ben oui. Aux âmes bien nées la valeur n'attend point le nombre des années.


Anne était aux anges. Elle parlait avec son père ! Il était là, bien vivant, debout au pied du lit. Pourquoi Mère lui avait-elle toujours laissé croire à sa mort ? Mais il était bien mort, pourtant. Tout le monde le disait, pas seulement Mère. Père parlait du Berry, de Dame Ysandre, de tante Mentaïg. Anne répondait, mais sentait sa bouche devenir de plus en plus pâteuse.

Bon, ce sera tout pour ce rêve, j'ai un souper avec Aristote. Il veut que je lui apprenne à jouer aux fléchettes.

Père ...


Anne s'éveilla, en nage dans le froid du matin. Elle serrait dans ses mains sa tablette de cire et son stylet. Vignol, en majesté au pied du lit, la contemplait à travers ses paupières mi-closes.
Un rêve... La fillette était partagée entre l'émerveillement et une forte envie de pleurer. Sur la tablette de cire, la bouche de son père se tordait en un sourire inversé.
Sirbalian
Le soleil se lève à peine pourtant Balian est déja réveillé, la nuit fut agitée et il n'a pas beaucoup fermé l'oeil. Il faut dire que depuis hier, il se passe beaucoup de choses dans sa tête, le départ de Jenifael sans dire mot le laissant perplexe.

Il attendit néanmoins que le soleil pointe le bout de son nez pour aller réveiller son fils, non sans peine, celui-ci n'étant point un leve tôt. Le pactage de Balian était déja préparé, ne restait plus qu'à prendre un bon petit déjeuner avant de prendre la route.

Un peu de pain, le fond d'un pot de confiture et une simple tisane, rien de bien alléchant, il faut dire que Balian oubliait souvent de passer au marché prendre des vivres.


P'pa pourquoi Q'tu m'réveille si tôt ?

Ben le soleil s'est levé, il est plus que temps que tu files à la boulangerie de Spacewolf continuer ton apprentissage.

Quoi ? J'dois encore y retourner ? C'tait pour du vrai ? jsuis obligé d'y aller tous les jours ?

Oui.. chuut allez manges !

Maieuh.. j'ai po faim d'abord !

Allez dépèche toi, j'ai à faire ! Après ta journée de travail tu iras chez ta tante et pas d'entourloupe, elle a quelqu'un à te faire rencontrer !

Chelsey baissa la tête et mangea sans envie, il n'était pas habitué au travail et aux règles il faut dire. Puis une fois le repas fini, les deux hommes se levèrent et pactage sur l'épaule quittèrent la modeste chaumière. Balian déposa son fils à la boulangerie de son chef, puis alla chercher sa monture à l'écurie de la garnison.

Il accrocha solidement la roue à la selle de sa monture puis la monta en prenant la direction de la sortie du village. Le voilà en route pour la Combe bleue à quelques lieues de Vienne.


Quelques heures plus tard

La brume matinale avait cédé sa place à une fine pluie continue. Balian bien emmitouflé dans sa cape avait néanmois du mal à y voir clair et vu la boue sur les chemins impossible de pousser sa monture à accélérer le pas.

Puis alors qu'il désespèrait de trouver âme qui vive dans cette vallée, au bout d'un chemin balian découvrit une auberge, une lanterne pendant devant l'entrée. De la fumée s'échappait de la cheminée, ce qui indiquait donc qu'elle était occupée.

Balian s'en rapprocha puis descendit de monture, qu'il attacha à un anneau de l'auberge, avant de pousser la porte. Un homme se tenait derrière le comptoir en train de netoyer quelques chopines, et une femme s'attellait à passer le balai entre les tablées.


Bien le bonjour, Je viens de Vienne et je cherche la Vicomtesse de Culan. Il me semble que sa caleche s'est embourbée dans les environs et j'apporte une nouvelle roue afin qu'elle puisse reprendre la route.

L'homme fit un signe de tête à la femme qui semblait par ce simple geste avoir compris les volontés du tavernier.

En effet elle et ses valets ont logé ici, je m'en vais les quérir de votre présence ici.

Balian la remercia d'un signe de tête puis ota sa cape et alla se placer devant l'hâtre afin de se réchauffer tout en glissant quelques pièces au passage à l'aubergiste afin qu'il lui serve une chopine, ayant le gosier bien sec du au voyage..
pnj
"Dame Vicomtesse ?

- Hum ?

- Un Messire vous mande auprès de lui, dans la grand'salle."



Tout occupée à passer un doux onguent aux effluves de jasmin sur ses mains d'ivoire aux doigts fuselés comme des cierges, Maryan ne jeta pas même un regard sur le jeune valet ayant timidement prononcé ces paroles.

Un silence, durant lequel l'adolescent en livrée se balançait d'un pied sur l'autre, ne sachant que dire ou que aire devant cette absence de réponse. Puis, soudain :



"Eh bien ?! N'avez-vous donc rien de plus à me dire sur ce visiteur ? C'eût été le Roy en personne, que je ne l'aurais su qu'au dernier instant.
Faites donc preuve d'un peu plus de rigueur dans votre travail, et tâchez d'apporter davantage de précisions lorsque vous annoncez quelqu'un, sans quoi vous devrez proposer vos services à une autre famille."



La pose de l'onguent achevée, la Vicomtesse se tourna vers son domestique, le transperçant d'un regard froid, azuré, que magnifiaient des cils longs et noirs. La bouche au contour admirablement dessiné resta close quelques secondes encore, puis la jeune noble reprit :


"Dites à ce sieur que Nous arrivons de ce pas."



Le temps de fixer un joli bandeau brodé autour de ses cheveux dorés, et la Vicomtesse rejoignit le sieur Balian dans la grande salle de l'auberge. Elle s'attendait bien évidemment à ce que ce soit lui -qui d'autre?- et ne manifesta donc aucun signe d'étonnement.
Démarche légère, port altier et sourire ravi, Maryan accueillit son sauveur du jour comme il se devait.



"Messire Balian, je présume ? Enchantée de vous rencontrer enfin ! Je vous suis extrêmement reconnaissante d'être venu à mon secours. Voilà action aussi inattendue que charmante.
Mais je bavarde trop, assez de tout ce babillage. Avez-vous fait bonne route ? Vous avez trouvé l'auberge facilement, n'est-ce pas ? Il m'est apparu un peu tard que je ne vous en avais point donné l'adresse, mais je constate avec joie que cette précision n'était point nécessaire.
C'est un endroit agréable, n'est-il pas ?
Oh mais je parle, je parle, et ne vous laisse pas même le temps de m'apporter réponse. Je suis impardonnable.
Accompagnez-moi aux écuries, voulez-vous ? Autant bavarder sur la route nous menant à mon coche. Avez-vous une monture pour chevaucher à mes côtés ? Si tel n'était point le cas, j'ai là un étalon qui ne manquera pas de vous plaire."


Enfin, Maryan se tût, laissant place à un regard interrogateur et plein d'enthousiasme qu'elle dirigea vers le coutilier.
Sirbalian
Après s'être réchauffé devant l'hâtre, Balian alla s'assoir au comptoir ou une chopine l'attendait et la bu d'une traite. Cela faisait déja quelques temps qu'il n'avait pas chevauché de la sorte, par pareil temps qui plus est..

En attendant la vicomtesse il fit la conversation avec l'aubergiste, le questionnant sur cette vallée dont il ne se rappellait pas encore y avoir mis les pieds auparavant.

Puis du bruit se fit entendre, la taverniere redescendit, suivie d'un valet de la Vicomtesse annoncant l'arrivée proche de la noble. Juste le temps pour Balian de se redresser et tapoter ses habits afin de les dépoussiérer du mieux qu'il put.

Les bruits de pas se rapprochèrent et une silhouette apparut dans la grande salle. Balian qui s'attendait à voir devant lui une dame de son âge fut étonné par la jeunesse de la Vicomtesse. Dans l'obscurité de l'endroit, elle apparut telle un ange dont la chevelure éblouissait les lieux. Et lorsqu'il croisa son regard azur, il resta bouche bée un petit moment comme absorbé par cette vision.

Mais il revint bien vite à lui, réveillé par un flot de paroles affolant.


Messire Balian en effet, je suis moi-même ravi de pouvoir vous rencontrer chère Vicomtesse.
Pour ce qui est de la route, le trajet fut plus long que prévu à cause du temps, la pluie m'ayant ralentit, quant à trouver l'auberge.. il faut dire qu'il n'y en a guère beaucoup dans les environs..
Je n'étais d'ailleurs jamais venu dans ce coin mais je ne manquerai sans doute pas d'y revenir.. une fois que le temps sera plus clément toutefois.


Suite à la remarque de la Vicomtesse, Balian acquiessa et continua la discussion tout en se rendant aux écuries. C'est une fois dehors qu'il se rendit compte que la pluie semblait avoir cessé du moins pour le moment..

Je vous remercie pour votre proposition mais j'ai pris une monture à ma garnison pour faire la route, d'ailleurs la roue est toujours attachée à la selle de ma jument, je suis donc fin pret à faire route a vos cotés.

En voyant l'étalon, Balian se dit qu'il aimerait beaucoup avoir pareil monture, mais un cheval aussi beau devait couter très cher. Il se demanda ensuite s'il devait proposé son aide à la Vicomtesse pour monter en selle mais se tut, se disant qu'elle disposait de l'aide de sa cour si besoin en était. Il détacha sa monture de l'anneau mural et se hissa en selle, pret au départ, bien content de pouvoir se rendre utile.
~draguione~
Une arrivée surprise chez les Culan


L'Hostel des Culan commençait à apparaitre sous les pas décidés de Draguione qui tenait Antoine par la main. Sa besace bien crampé dans l'autre, elle se remémorait le jour où la fillette était arrivé accompagné de Bacchus et Matheline. La petite avait très vite tissé des liens avec son fils, et avait été prise sous les ailes bienfaitrice de son époux pour ses multiples questions, elle en avait! Elle repensa au jour ou Anne l'avait fait mandé pour sa vesture, elle se mit a sourire grandement. La missive qu'elle avait eu pour lui demander à être sa marraine de bâptème.. Elle avait dien évolué depuis son arrivé, et s'épanouissait grandement au travers de ses diverses activitées, malgré son jeune âge.

Dragui et Antoine arrivèrent devant la grande porte... la Belle trifouillait sa besace, espérant ne pas trop déranger sachant Anne très occupée. Le garçonnet trépignait devant la porte ne sachant pas où ils se rendaient avant d'arriver chez les Culan. Ses yeux pétillaient comme à chaque fois qu'il la voyait et là il ne tenait plus en place..il avait comprit ce qu'ils étaient venu faire là.


Antoine arrête veux tu?! On dirait que c'est la première fois que tu viens ici!

La femme se décida a frapper de ses falanges, le poing légèrement fermé, sur la grosse porte en bois et se recula de quelques pas attendant qu'on leur ouvre...
pnj
"Je vous remercie pour votre proposition mais j'ai pris une monture à ma garnison pour faire la route, d'ailleurs la roue est toujours attachée à la selle de ma jument, je suis donc fin prêt à faire route a vos cotés.

- Fort bien. En ce cas nous pouvons nous mettre en route."

Tandis que le charmant coutilier se hissait sur sa monture -un animal à la robe peu soyeuse mais à l'air robuste- la Vicomtesse se rendit auprès de sa jument blanche, que ses valets avaient pris soin d'harnacher auparavant.

La petite équipée ne tarda pas à se mettre en route. Quelques valets suivaient la Vicomtesse et son compagnon de voyage de quelques pas.

L'on rejoignit bientôt le lieu de l'incident. Jannequin, emmitouflé sous une couverture de laine épaisse, émettait des ronflements dignes d'un pourceau.
Maryan pinça les lèvres, agacée par tant de grossièreté dans le comportement. Un signe de tête impérieux à l'un de ses valets suffit pour que ce dernier aille réveiller le goret ronfleur d'un coup de savate.

Satisfaite, Maryan mit pied à terre d'un mouvement plein de grâce, ôta ses gants de soie pourpre, se débarrassa négligemment de sa cape de voyage poussiéreuse, et se rapprocha de son carrosse, le coutilier à ses côtés.


"Nous y voilà donc, Messire Balian. Voyez l'état dans lequel se trouve cette pauvre roue. Ne me demandez point par quel miracle elle a pu se ficher entre ces deux pierres, dans ce maudit ravin, c'est un mystère que je ne saurais attribuer à autre chose qu'à la bêtise humaine."

Coup d'œil significatif en direction de Jannequin, le cocher, qui s'empressa de regarder ses pieds, penaud.

"Je ne vous propose pas les services de mon cocher", poursuivit la Vicomtesse, "il serait bien capable d'empirer les choses. Mais je laisse à votre disposition le reste de mes domestiques ici présent. Petit-Lévan, mon palefrenier que voici", désignant un adolescent d'une quinzaine d'année, "vous sera probablement d'une grande aide. Il est encore jeune, mais point dénué d'esprit et de jugeote. Ce qui n'est pas le cas de certaines personnes à l'âge pourtant plus avancé..."

Regard plus appuyé sur Jannequin, qui aurait volontiers échangé sa place contre celle du ver de terre disparaissant à l'instant sous sa chausse boueuse.

"Permettez que je vous laisse à votre ouvrage un instant, Messire. Il me faut mettre de l'ordre dans mes affaires. Je veux être sûre que tout soit prêt avant de pouvoir repartir et rejoindre enfin ma fille à Vienne."

Un dernier sourire esquissé à l'attention du sieur, et la jeune noble s'éloigna, élégante même dans sa tenue de voyage au tissu rustique.
--Bacchus
Eh ! Psittt ! Eeeehhhh !!!!!

Mais va-t-elle enfin l'entendre ? C'est-y qu'elle deviendrait sourde, à force de dormir tout le jour ou presque ?
La tête passée dans l'entrebâillement de la porte, Bacchus hèle Matheline, de sa grosse voix qu'il s'efforce d'adoucir. Dans l'ébrasement de la fenêtre, Anne boit une tisane. Bacchus regarde l'écuelle tenue à deux mains, les longs doigts fins, hérités de Dame Maryan, qui se réchauffent sur la terre cuite. La petite regarde dans le vague par-dessus le bord de l'écuelle. Elle ne l'entend pas, et pourtant, il y aurait de quoi ! La Matheline ne se décide pas à sortir de son assoupissement.
A quoi peut-elle donc encore rêver, la demoiselle ? Peu importe, ça arrange Bacchus.


Pssssssssssit !!!

Bacchus chuinte comme une bûche mal séchée. Matheline sursaute, reste un instant bouche bée devant l'index qui lui fait impérativement signe d'approcher, et se décide enfin.
Bacchus l'attire dans le vestibule, referme soigneusement la porte de la grand-salle.


Ya le valet à Maître Spacewolf qu'j'ai vu en taverne.


Et alors ?

Ben i' m'a dit coume ça que le père à l'arpète, Messire Balian, l'était parti porter une roue neuve à Dame Maryan.

Bacchus affiche un sourire réjoui, qui lui barre la face sous sa grosse moustache. Matheline sourit à son tour, et s'agite soudain.


Mais alors... mais alors ... Oh mon Dieu ! Grand Aristote, aidez-moi !


Et la voilà qui se met à courir dans le vestibule, comme une cane sans tête.
Bacchus se tord de rire. Il s'assène de grandes claques sur les cuisses.


Heulà ! la Matheline ! C'est fini, la p'tite parnière tous les après-midis !

Mais ne restez pas là, grand dépendeur d'andouilles ! Aidez-moi !

Bacchus rit de plus belle.

N'seyez donc point si brelote, la Matheline ! Dame Maryan n'va point vous dévorer crue.

Matheline hausse ses maigres épaules, et file en direction de la cuisine, houspiller la domesticité. Bacchus s'essuie les yeux. Il s'apprête à aller vérifier que tout va bien, du côté des écuries, quand on frappe soudain à la grande porte. Pas la peine de compter sur Matheline pour aller ouvrir. Bacchus hausse les épaules à son tour et, mis en joie par l'intermède qu'il vient de s'offrir, va lui-même répondre. Dame Draguione et son fils Antoine sont là. Le petit a l'air tout heureux.
Le sourire de Bacchus s'efface. Non qu'il n'aime pas les Massilia, loin de là ! Mais il a bien observé les attitudes du valet de Messire Valatar, et se croit tenu de prendre le même air compassé.
Il bombe le torse, se redresse.


Dame Draguione, Messire Antoine, le bonjour ! Entrez, je vais voir si Demoiselle Anne peut vous recevoir.


Évidemment, qu'elle pourra. Mais c'est ainsi que l'on fait, dans les grandes maisons, d'après ce que Bacchus a pu remarquer, et il ne sera pas dit que l'on faut à l'usage, chez les Culan. Surtout que Dame Maryan sera là d'une heure à l'autre.
Sirbalian
Le chemin jusqu'au lieu de l'accident n'avait pas été bien long, et Balian s'était amusé de voir les valets suivrent derrière lui. Bien sur ils escortaient Maryan mais çà faisait sourire balian, lui même habitué à servir d'escorte d'habitude.

La scène qui s'en suivit le fit sourire encore plus. Le cocher même réveillé ne semblait pas dans un meilleur état.. Le pauvre ne savait plus ou se mettre lorsque Maryan parla de lui. C'était bien lui la cause de l'accident à en voir le lieu ou la roue s'etait logée.

La Vicomtesse prit congé ensuite afin de remettre de l'ordre dans ses affaires, tandis que Balian examinait les lieux afin de décider par où commencer. Il allait d'abord falloir soutenir la caleche avant de pouvoir changer la roue et vu l'endroit ou elle se trouvait la tache n'allait pas être de tout repos.


Bon Petit-Levan, essayes de me trouver un bon baton bien solide, moi je vais tacher de trouver un rocher de la taille de la roue à peu pres.

Le jeune garçon se mit de suite au travail et balian se rapprocha du ravin, cherchant une pierre qui ferait l'affaire. Il ne mit pas long à en repérer une, et retroussa ses manches afin de la soulever et la rapprocher du carrosse. le jeune palefrenier revint lui aussi baton en main.

Bien alors je vais tacher de soulever un rien le carrosse au niveau de cette fichue roue et toi tu tacheras de faire rouler le rocher sous le bois qui soutient la roue. Ainsi on pourra ensuite changer la roue.

Ni une ni deux le garçon se plaça et se tint pret à réagir, Maryan avait dit vrai, jeune mais volontaire. Balian alla placer le baton entre les pierres et poussa de toutes ses forces en se servant du baton comme levier afin de tacher de dégager la roue.

Mais hélas rien n'y faisait, le carrosse était bien lourd et il aurait besoin d'aide pour le soulever meme pour quelques centimètres seulement.


Et toi là bas ! Oui, jannequin c'est çà ?
Viens donc par ici, rends toi utile, viens pousser avec moi sur ce levier, tiens toi pret Petit-Levan.


Le cocher grogna, marmona même, mais rejoignit balian d'un pas non-chalant. Heureusement il ne pourrait faire de bétises, un simple exercice de force ici, rien de bien compliqué.

Surveillé de pres par Balian, Jannequin se sentant obsercé, obéit. Balian se remit à pousser de toutes ses forces et doucement le carrosse se souleva d'un rien. Le jeune palefrenier qui était aux agaits en profita pour faire rouler la pierre et la glissé sous le carrosse. Une bonne chose de faite.


Bien joué petit ! Merci jannequin çà ira pour le moment.
Petit-Levan vas donc chercher quelques outils afin que l'on puisse procéder au changement de roue.


Pendant ce temps, Balian partit chercher la nouvelle roue qu'il avait apportée. Pas même le temps de faire l'aller-retour que le jeune garçon était revenu. Balian se dit qu'il allait testé l'habileté du jeune palefrenier, et le laissa ôter la roue avec les outils qu'il avait lui meme apporté. Il se débrouillait très bien, balian l'aidant par moment, puis il lui tendit la nouvelle roue et la fixa cette fois lui même afin d'être sur qu'elle soit fortement attachée.

Ne restait plus qu'à remettre le carrosse sur le chemin, Balian aidé du palefrenier attacha les cheveaux puis alla ensuite avertir Mayran que le travail était presque fini.


Madame la Vicomtesse ?
Nous avons presque fini.. prenez garde nous allons remettre le carrosse sur le chemin.


Balian attendit que la Vicomtesse s'éloigne du carrosse puis dirigea la manoeuvre. Il chargea Jannequin de prendre sa place de cocher tandis que Petit-Levan et lui même allait retirer le rocher puis à nouveau utiliser le baton comme levier afin de sortir de ce ravin.

A mon signal.. Pret.. Allez on y va !

Tous ensemble plus ou moins coordonnés, ils arrivèrent à sortir le carrosse de ce pétrin non sans mal. Balian soulagé d'avoir réussi sa mission, laissa poindre un petit sourire en direction de la Vicomtesse.

Fiouf.. ben voilà nous y sommes arrivé ! Vous allez pouvoir enfin vous rendre à Vienne.
pnj
Mine hautement satisfaite, sourire réjouit et œil pétillant, Maryan considérait le nouvel état de son coche avec ravissement.

"Vous avez fait merveilles, Messire Balian ! Je suis bien aise de pouvoir enfin reprendre la route, et ce grâce à vous. Comment vous remercier ? Acceptez en guise de premier présent ce petit coutelas que voici. J'en ai fait l'acquisition à Paris, lors de ma toute première visite dans la capitale avec feu mon époux, voilà des années de cela."

Une ombre, un soupçon de mélancolie à peine perceptible dans le bleu verdoyant de ses iris. Il en était toujours ainsi, lorsque la jeune femme se remémorait le visage de son défunt conjoint. Sa voix, sa prestance, ses traits nobles et ses exceptionnels talents d'orateurs...

Combien d'années passées à faire son deuil, recroquevillée sur un prie-Dieu, entourée de nonnes compatissantes et de longs cierges apportant un peu de luminosité dans les salles lugubres du couvent.

Elle s'était mariée si jeune, il était parti si vite... Aristote ne lui avait pas même laissé le temps d'annoncer la bonne nouvelle à son aimé. La naissance de ses deux filles aurait du être source de grand bonheur... Le destin l'avait privé de cette joie, tandis que ses deux filles s'étaient vu privées d'un père avant même qu'elles ne viennent au monde.

Il en avait fallu, des années, avant que la jeune femme ne cesse d'en vouloir au Très-Haut.
Le temps finit presque toujours par assécher les sentiments.

Maryan secoua la tête, chassant ses pensées, affichant un masque de sourire et d'allégresse qui lui était devenu si familier.
Allons. Il était plus que temps pour elle de retourner auprès de ses enfants, maintenant que la Foi lui était revenue, maintenant que l'affliction s'était dissipée, reléguée dans un coin de l'âme qu'on voulait oublier parce qu'il fallait vivre.

Un léger signe de la main, et l'on porta le coutelas, dans un joli coffret de bois de chêne finement ciselé, au sieur Balian.


"C'est un modeste présent qui n'atteint point la hauteur de ma gratitude à votre égard, mais vous me feriez grand plaisir en l'acceptant."

L'on attelait déjà les chevaux au carrosse remis sur roues. Les domestiques s'affairaient et regagnaient leur place docilement, prêts au départ.
Il ne s'agissait pas de faire attendre la Vicomtesse. Son manque cruel de patience était un défaut connu de tous.
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