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Aphrodite Acte 2 réouverture: Willkommen, Bienvenue, Welkom!

Gysele
[Grand Salon - Angèle, Evroult. Puis Evroult seul.]

Si j'avais su ce que je risquais d'interrompre en déboulant, j'aurais bien entendu laissé le temps à Angèle de délester mon frère de tout ce qu'il a. Je l'aurais encouragée à le déposséder, le vider de ses biens jusqu'à ce qu'il montre enfin son vrai visage : celui d'un vaurien crasseux. Heureusement, mon karma, ou la justice divine existe et la petite voleuse a le temps de commettre son larcin. L'eussé-je su que je l'aurais félicitée ! Si je suis qu'une sale hypocrite ? Peut-être. Mais moi, aussi crasseuse que je sois, je n'ai jamais cherché à faire de mal à mon benjamin. Pas... jusqu'à ce soir. J'esquisse un sourire aux propos de ma collègue et la remercie d'un hochement de tête.

- Je préviens, je suis affreusement mauvais cavalier,

Si seulement tu étais juste mauvais cavalier, Evroult. Tu es mauvais tout court. Tu es cette ombre qui plane sur ma vie et qui la rend moins belle à chaque fois que tu décides de t'y mêler. A croire que tu es né pour que je vende un peu plus mon âme au Sans-Nom pour te faire du mal. A croire que je suis venue au monde, pour subir ou te faire subir. Et crois-moi petit frère, mon esprit de survie est assez développé pour que je ne veuille plus être ta victime.

Je me rapproche de toi, je glisse une main dans la tienne, comme si j'y trouvais beaucoup d'intérêt. Tout, de ma posture jusqu'à mon sourire, donnerait le change à quiconque nous regarderait, pourtant mes yeux te maudissent si bien que tu ne peux avoir aucun doute sur mes pensées qui te sont toutes offertes, à toi et à toi seul. Tu es l'incarnation de ma folie, Evroult. Quand Louis-Marie me rend plus sage, plus posée, toi, tu me rends plus folle, plus instable. Lui, il m'aime, me protège et toi, tu me hais et m'attaque. J'ai l'impression parfois d'être une toile vierge sur laquelle vous déversez chacun vos sentiments ou ressentiments. J'absorbe alors le positif comme le négatif et si pour l'un je renvois de l'amour, il n'est pas illogique que pour l'autre, je libère toute ma noirceur. Tu as choisi ce camp là, frérot. Dès l'instant où tu as écrit ce mensonge sur ce vélin, tu as brisé mes derniers espoirs de renouer quelque chose avec toi. Était-ce si difficile de m'aimer...un peu ? Suis-je si laide que tu me considères comme une pestiférée ? Serais-tu meilleur, toi grand Evroult que tu m'estimes si peu ? Ah non ! Je refuse de te laisser insinuer la graine du doute plus longtemps dans mon esprit.


    - Affreux et mauvais, tu es bien doux avec toi-même.

Je te pique la première, parce que je ne veux pas te laisser l'occasion de me faire mal à moi. Je tourne, lançant parfois un coup d'oeil autour de moi pour vérifier la proximité des éventuels danseurs ou la présence des autres convives. Quelques uns se sont éclipsés discrètement, d'autres pièces de l'Aphrodite ont certainement été réquisitionnées. Ce ne sera pas le cas pour moi, ce soir. Suis-je inquiète pour mon poste ? A quel point ai-je envie de me venger de lui ? Je cogite tout en lui écrasant le pied d'une volte volontairement plus brusque.

    - Ah, le vin me fait tourner la tête !

Je n'ai même pas bu ce soir, mais te sortir des excuses bidons comme une gamine est libérateur. J'ai tellement de violence en moi te concernant que je me retiens de faire un bain de sang là en guise d'inauguration. Je serais certainement virée, mais Dieu que ce serait exultant ! Le petit couteau pèse lourd dans ma manche, je crève d'envie de m'en servir là, tout de suite et pourtant je me retiens et me permets même une phrase de conversation pour donner le change alors que mes ongles s'enfoncent dans ta main.


    - Ton destin semble étroitement lié au mien, cher frère. Jusqu'à Yohanna. J'ai l'impression que ce pays est trop petit pour nous deux.

Te sens-tu menacé ? J'espère bien.
_________________
Lucas.

      - Explorations avancées dans le couloir des voyours avec Elienore de Ravel -


 Ce sont elles qui avaient avait ensemencé son esprit. Elienore de Ravel avait rendu le champ fertile. Sa posture au centre du Grand-Salon, telle une proie désireuse qu’on vienne la dévorer, avait réveillé l’esprit de prédateur de Lucas Dentraigues. Lorsqu’une femme, non seulement jolie mais également attirante, criait ainsi à la face du monde : « Séduisez-moi et vous découvrirez ce que ‘plus si affinités’ signifie », Lucas devenait « Le Dentraigues ». Il avait mordu à l’hameçon et elle en avait fait son repas pour les vêpres…A moins que ça ne soit le contraire. Sur ce terreau fertile, l’attitude de Rose envers Ysaoth avait arrosé les graines semées par la duchesse et les avaient fait germer. La main d’Ysaoth sur celle de l’épineuse avait fait naitre les premières feuilles. Si Lucas avait amené Elienore ici ce soir-là, dans ce couloir sombre, c’était à cause de cela. S’il avait chuchoté à l’oreille de Rose alors que la pulpe de son pouce s’égarait sur une paume Ravelloise, c’était parce qu’il désirait récolter ce que d’autres avaient semé. Enfin, s’il avait dénoué ses cheveux, défait le catogan pour donner ce ruban noir au valet, c’était parce qu’il ressentait un impérieux besoin de mener, de reprendre le contrôle d’une situation que d’autres avaient instiller dans son esprit. Oui, s’il avait emmené Elienore ici, c’était à cause de cet enchainement de circonstances. Le marche-pied sur lequel il avait buté et qu’il cherchait à tâtons dans l’obscurité de la pointe d’une botte? Si effectivement il marquait l’emplacement recherché par le galant, celui-ci avait également un autre intérêt comme vous pourrez le découvrir plus tard. Deux portes… Deux portes se trouvaient sur le chemin de cet imaginaire érotique que Lucas Dentraigues avait tissu autour de sa proie du soir. Ils pouvaient n’en franchir qu’une. Ou deux. Voire même aucune. Cela ne dépendait pas seulement de lui. Mais quel que soit le nombre qu’il lui ferait franchir ce soir-là, Lucas donnerait à la duchesse de Ravel ce qu’elle était venue chercher à l’Aphrodite ce soir-là.

L’obscurité de l’endroit était un des éléments d’ambiance qu’il désirait Oh certes, l’amoureux du corps féminin qu’il était aurait volontiers aimé saisir de visu l’effet que ses caresses auraient prodiguées à ce corps offert au fur et à mesure que l’effeuillage progressait. Il aurait apprécié voir cette peau se hérisser lorsque le désir né au creux de ses entrailles se serait diffusé partout, jusqu’aux moindres extrémité de son corps. Sans aucun doute, son regard aurait eu cette brillance de satisfaction lorsque l’épaule se serait dévoilée dans toute son intimité, lorsque le décolleté d’une robe n’aurait plus été que naissant. Et que dire d’un visage qui aurait exprimé l’éclosion du désir alors que les yeux se seraient fermés et que les lèvres se seraient désolidarisés. Mais après tout, n’avait-elle pas évoqué la possibilité qu’elle revint à l’Aphrodite? Pour le voir lui? Alors, n’avait-il pas eu raison ce soir-là de leur soustraire la vue et laisser le désir s’alimenter des messages que leur envoyaient leurs sens de l’odorat, de l’ouïe, du toucher? Ce soir, mieux « valet » que les cochers n’entamassent point de moyens de pressions car la Duchesse de Ravel risquait fort de découcher dans ce cas.

Ce fut d’ailleurs à l’équilibre des trois sens qu’il la soumit. Celui de son parfum qu’il avait fait préparer à la Lyre d’Eurydice, celui de ses mains qui avaient pris la mesure du haut de son corps. celui du froissement de l’étoffe au fur et à mesure que son exploration manuelle défrichait le chemin cachant ses trésors de féminité, du bruit de sa respiration qui trahissait son état d’esprit du moment. Qu’importe qu’Ysaoth soit son mari, son amant ou son complice, le fait de l’avoir dans ses bras et de savoir qu’elle se donnait à un autre habituellement nourrissait son esprit d’images que la religion mettrait sans aucun doute à l’Index. Ce fut sans doute lorsque le torse parisien enveloppa un dos ravellois, qu’un bassin masculin fit sentir sa présence contre un séant charnu fet éminin et que des lèvres galantes embrasèrent un cou ducal sur toute sa longueur qu’Elienore aurait pu mieux percevoir les fragrances qui se dégageait de son amant d’un soir. Avait-elle saisi qu’à l’Aphrodite, les services de Lucas Dentraigues se choisissaient au travers d’une gamme de parfums qu’il avait fait concevoir de manière ô combien personnalisée? Que l’homme porterait le parfum choisi par sa partenaire pour éveiller ses sens et leur faire prendre le chemin pour lequel elle était venue à l’Aphrodite? Le Dentraigues en doutait mais cela n’avait aucune importance. Elle le découvrirait un jour…ou pas.

La gangue que formait sa main sous son sein entra alors en contact avec la pulpe de ses doigts lorsqu’elle vint pêcher le grenat. Contact tactile, subtil, éphémère. Il aurait voulu les capturer un à un. Qui ça? Ses digitales, éclaireurs lancés non pas à la poursuite d’un octobre rouge mais d’un caillou de la même couleur. Il s’imaginait déjà capturer son majeur afin de le glisser entre ses lèvres, de darder sa serpentine ferme sur l’extrémité de celui-ci, de l’envelopper d’une douce moiteur, esquissant un léger mouvement de va-et-vient évocateur d’autres libertés. Sa question le fit revenir sur terre et un sourire qu’elle ne pouvait percevoir, ici dans l’ombre, dans son dos naquit à la commissure de ses lèvres.


- Un grenat? Ainsi donc la destinée vous a choisi? Intéressant…

Et c’est à lui qu’elle demandait de garder ce trésor? Est-ce cela qu’elle était venue chercher au creux de sa poitrine, la raison pour laquelle leurs doigts se sont croisés et non parce qu’elle voulait aller à la rencontre de ceux qui lui délivraient tant de frissons? Dans le noir, Lucas posa sa main sur son épaule et la fit glisser lentement, paume suivant un tracé sinueux sur un velours charnel du plus délicieux. Il emprisonna la main d’Elienore, enveloppa ses phalanges autour des siennes et les entrecroisa avec ceux de sa maitresse. De sa main à la sienne, le sésame d’Aphrodite changea temporairement de propriétaire. Une poche…Où pouvait-il trouver une poche sur cette tenue? L’idée germa dans l’esprit du Dentraigues lorsque sa tête se releva et tourna vers la gauche, vers la paroi du couloir des voyours comme le Maître appelait cet endroit.

- Savez-vous pourquoi je vous ai fait venir ici Elienore? Dans cet endroit où mes yeux sont aveugles et ne peuvent s’abreuver d’un corps qui s’offre sans aucune retenue…

Il tourna légèrement la tête de sa partenaire vers la droite et ses lèvres vinrent chercher leurs homologues. Le baiser n’avait plus rien de ces escarmouches sensuelles dont ils avaient volontairement usé et abusé durant la soirée pour se séduire. Le contact de ses lippes sur celles de la duchesse respiraient l’envie, le désir, l’indécence et la luxure. D’aucun aurait pu dire vulgairement qu’il la goutait littéralement de la pointe de sa langue. Souffle chaud qui roulait sur l’arête de son menton, baisers dont l’intimité ne faisait que croitre indéfiniment. Lucas fit brièvement rouler le grenat sur le haut de son décolleté avant de le faire rouler entre le pouce et l’index, Il approcha son visage de son oreille et lui glissa dans un murmure:

-…Si vous voulez tourner votre tête vers la gauche…

Clic. De la pointe du caillou, Lucas Dentraigues déplaça une petite plaque de métal qui masquait un oeilleton enfiché dans la porte.

- Cette paroi? Une porte… Derrière? Une chambre, un des lieux de plaisir de l’Aphrodite. On l’appelle la décadente.

Le ton de la voix était chaleureux, confidentiel, emprunt d’une grande sensualité. Il avait volontairement ralenti le débit de ses paroles pour donner à celles-ci une plus grande impression d’intimité. Un sourire étira ses lèvres mais dans l’obscurité, il se doutait qu’elle n’en avait conscience. Les images d’un chuchot glissé dans l’oreille de Rose, le ruban noir que se délie et qui est transmis à un valet consignes à la clé affleurèrent à la surface de sa conscience.

- Qui sait ce qu’on pourrait découvrir au travers de cet oeilleton?

Point d’effleurements, ni de toucher délicat cette fois. Sa main se fit ferme lorsqu’elle glissa sur l’étoffe soyeuse de sa robe, au dessus de sa cuisse, coté extérieur.

- Pendant que je m’attache à satisfaire le besoin que vos bottines ont éveillé en moi, voulez-vous jeter un coup d’oeil ou dois-je mettre ce grenat à l’abri et masquer ce qui pourrait être vu au travers de ce mouchard de verre?

Se faisant, Elienore de Ravel put sentir le corps de son galant parfumé par Aphrodite perdre de sa hauteur. Ses mains s’agrippèrent à sa cheville. Les doigts du Dentraigues tissèrent autour de celle-ci une toile voluptueuse, un entrelacs de fils de soie virtuels qu’il répandit jusqu’au bout du plus petit orteil. Dans le silence de l’endroit, le bruit de l’attache de sa botte qui saute sous l’initiative du galant fit autant d’effet qu’une goutte d’eau qui ruisselle du plafond, dans le choeur d’une église. Bottine fut retirée. Cuir reçut toutes les attentions de la paume de main du galant, presque autant que le décolleté d’Elienore quelques instants auparavant. Lucas se pencha vers l’avant. posa ses lèvres sur le bottillon. Fermer les yeux ici, dans l’obscurité, fut un geste quasi machinal bien qu’inutile. Ses lèvres entr’ouvertes glissèrent sur le talon, fleuretèrent avec le dessus de son pied jusqu’à son extrémité qu’il mordilla délicatement. Les allumeuses s’enroulèrent ensuite autour de sa jambe nue. Le galant joua autant de ses lippes que de son menton barbu ou d’une patoisante prompte à laisser un chemin humide derrière elle. Une murmure s’échappa de sa bouche, roula sur la peau satinée et éveillée de la duchesse alors que les abords de son genou étaient atteints par le galant.

- Je vous préviens, si vous ne pouvez contenir le côté sonore qui pourrait émaner de votre plaisir, celui-ci risque fort de se propager aux oreilles de nos potentiels voisins.

Le feu qui s’écoulait des lippes du Dentraigues se propagea sur la haut de la cuisse ravelloise. La tête du galant disparut totalement sous les différentes épaisseurs de tulle, toile, taffetas et autres dentelles de la robe ducale. Dans ce lieu clôt, le froissement de l’étoffe ressemblait à un appel si indécent au plaisir, si sonore que n’importe qui dans l’Aphrodite aurait pu le percevoir… Enfin. le crut-il. Vous vous demandez peut-être ce qui advint par la suite? Avez-vous donc si peu d’imagination pour que l’on doive vous dire ce qu’il advint alors? Car oui, ce que vous avez en tête arriva. Coincé entre entre le pouce et l’index, le galant souleva et repoussa toute couche de tissu qui pouvait encore se mettre en lui et la caresse la plus délicieuse qu’une homme comme le Lucas Dentraigues puisse délivrer à une dame de la qualité de Elienore de Ravel. Un par un , il prit possession de chaque pli, de chaque rondeur, de chaque interstice. Ce fut elle qui le guida: par un soupir, par un muscle qui se tend, par tout un corps qui réagit à l’initiative sensuelle du galant. Son objectif? L’amener au bord de l’extase qu’il lui avait promis, la laisser en équilibre sur cette arête étroite, prête à chavirer d’un côté ou de l’autre…ou à avancer encore un peu pour découvrir d’autres plaisirs tout aussi délicieux que celui-là qu’ils soient manuels, buccaux ou plus intimes encore. Et alors que ses lèvres brillantes portaient encore en elles les saveurs intimes de la duchesse, le parisien s’extirpa de sous le tissu qui avait masqué l’indécence extrême de son attention voluptueuse. Dans le noir, ses doigts glissèrent à nouveau le long de la jambe ducale jusqu’à retrouver ce pied dénudé où tout avait commencé.

- Cette étoffe est certes élégante et donne à votre corps l’écrin qu’il mérite amplement mais à cet instant, elle a terminé son rôle et ne devient qu’une entrave superflue à nos envies duchesse. Cette caresse intime a fait plus qu’éveiller mes sens et je ne vous lâcherai point avant de les satisfaire pleinement.

_________________
.elle
Clôture de rp entendue sur demande LJDYsaoth et LJDElienore
Merci à eux du champ libre laissé pour fermer ce rp proprement.



"Elle" et Lucas
"Décadente" puis chambre de "Elle"
(RP écrit à 4 mains)



    ~ La rose ~

    Alanguie dans le lit à baldaquin de la Décadente, "Elle" s'étirait entre les draps soyeux, profitant de la torpeur du moment, cet instant de calme après l'indécence à l'état pur.
    Le chancelier ne s'était pas attardé plus que de raison dans le voluptueux de ce décor, dans ce stupre et cette luxure rouge et or, tout comme il n'avait guère tardé à répondre favorablement à l'invitation de la galante à découvrir les méandres de l'Aphrodite en sa compagnie.
    Pourquoi cette pièce plus qu'une autre ?
    Désidérata formulé par le Duc de Vichy ?
    Aucunement... Même si le choix avait semblé lui convenir.
    Un valet croisé dans un couloir, un murmure à l'oreille de la rose, un sourire esquissé et un message qui l'avait poussé à chercher un ruban noir déposé sur la poignée d'une des portes en était la cause réelle, Ysaoth ayant accepté de bonne grâce, et avec un entrain certain, l'ambiance de ce lieu.
    La mine exténuée et la chevelure brune décoiffée ne pouvaient que laisser comprendre l'intensité des ébats charnels qui s'en suivirent, enflammés, débridés, sans tabous et sans retenue, que seuls cette alcôve et leurs protagonistes sauraient vous compter.... quoique... Si le Dentraigues avait mis en oeuvre ses intentions, deux paires d'yeux supplémentaires devraient normalement pouvoir en témoigner.
    L'idée fit largement sourire "Elle" qui se prit à imaginer ce qui avait pu se passer en ce cas derrière le mur, le linge de lit venant rejoindre le corps dénudé de la jeune femme lézardant un moment avant de se décider peut-être à rejoindre sa chambre, ou de se faire renvoyer par les petites gens passant remettre de l'ordre.

    ~ Le Maître ~


Il l'avait raccompagné jusqu'à la porte de l'Aphrodite. La nuit cédait déjà le pas aux premiers rayons du soleil lorsque le carrosse emportait la duchesse de Ravel vers une destination que le Dentraigues n'avait pas à savoir. La reverrait-il? Lui avait-il donné l'envie de revenir à l'aphrodite? D'user de l'avantage que lui octroyait le grenat? Et même si c'était le cas, de le demander lui, Lucas Dentraigues? Les premiers invités avait quitté les lieux depuis quelques heures déjà lorsqu'il grimpa les escaliers qui menaient à sa chambre. Il n'avait aucune idée de ce que les propriétaires de l'Aphrodite avait pensé de la soirée mais lui, l'avait trouvé ma foi fort à son goût. A l'étage, Lucas passa dans le long couloir qui donnait sur les chambres des galants et des employés de l'Aphrodite. A cette heure précoce du matin, il n'avait plus rien du séduisant ex-avocat, propre sur lui, portant des vêtements sur lesquels pas un pli de travers ne se voyait. La chemise largement ouverte jusqu'au nombril, la veste jetée sur l'épaule et tenue nonchalamment de la senestre, les cheveux dépenaillés, il avait plus l'air d'une homme prêt à regagner sa couche après une soirée éreintante et peut-être un peu trop arrosée.

La main sur la poignée de sa chambre, Lucas entr'ouvrit la porte et finalement se ravisa. Un doute, une envie... Il était tard...ou tôt... À votre guise. Il était fatigué et pourtant il avait envie d'user d'un avantage que quelqu'un de cher lui avait conféré il y a quelques jours. Il referma la porte de sa chambre, fit quelques pas en arrière et changea de côté de couloir pour ouvrir la porte d'une chambre, de celle avec qui il avait envie de parler un petit moment. Comme il le lui avait annoncé, il ne se signala pas, ne frappa pas, ne demanda aucune autorisation. La porte s'ouvrit sur une pièce plongée dans la pénombre la plus complète, ce qui fit sourire notre parisien. D'une voix assurée, sur un ton bas mais suffisant pour se faire entendre d’ « elle », il déclara:


- Déjà couchée? Votre soirée vous aurait-elle épuisée à ce point? Je suis venu chercher quelque chose qui m'appartient.

Pour toute réponse, il n'eut droit qu'au silence froid d'une chambre vide. Le Dentraigues haussa un sourcil et un sourire taquin naquit à la commissure de ses lèvres. Manifestement, il semblait que le duc de Vichy arriverait après la duchesse de Ravel. Qu'à cela ne tienne. L'arrogant aurait très bien pu se débarrasser de ses derniers vêtements et prendre place dans le lit mais cela n'aurait guère été digne du galant qu'il était. Il se ravisa, alluma la chandelle se trouvant sur la table basse en face de la couche et prit place dans le fauteuil d'osier, croisant les jambes, appuyant cheville dextre sur cuisse senestre, savourant avec patience un fond de Figeac qui ne demandait qu'à être consommé.

    ~ La rose ~

      - Dame... Il faut rejoindre vos quartiers... On doit... fin, faut qu'on refasse la pièce

    Emeraudes embuées,le corps sylphide glissa hors de la couche, attrapant sa robe de velours carmin que la jeune femme avait déposé au pied du lit en venant l'éveiller avec douceur.
    Combien de temps avait-elle sommeillé ?
      Il est tard ?
      - Il est tôt... de l'aide pour votre robe ?
      Non, je monte me coucher, merci Justine
      - Bonne nuit Dame Elle

    Petit signe de tête aimable et étoffe glissée succintement sur ses courbes, la décadente fut quittée, rose de ses cheveux en main, couloir fut traversé puis le grand salon en attrapant le reliquat d'une coupe de fruits de la réouverture, la montée du grand escalier vite effectuée pour rejoindre son home sweet home, petit chez soi mais où personne ne viendrait la déjuquer pour le ménage.
    Porte poussée, le regard vert fut surpris de découvrir une chandelle encore allumée à cette heure-ci, peut-être la servante qui en aurait pris le soin, sans chercher plus que ça, sa compagne de séduction vint rejoindre un grand bocal de verre où d'autres têtes de rose finissaient de sécher, quand une étrange sensation lui fit déporter regard vers le fauteuil, avançant de quelques pas pour y découvrir un chevelu blond confortablement installé, assoupi.
    Depuis combien de temps l'attendait-il ici ?
    La vision du "Maïtre" muet lui étira un léger sourire, c'était un fait si rare qu'il se devait d'être savouré à sa juste valeur, avec délicatesse, le verre resté en main fut extirpé des doigts et déposé avec les fruits sur la table où vacillait la luminosité de la bougie, baiser déposé sur un front, un murmure s'éleva dans la pièce.
      Vous seriez mieux dans un lit Lucas

    Elle n'aurait pas l'impudence de le bousculer pour le réveiller, "Elle" savait que certains clients se pouvaient réclamer beaucoup d'énergie, et elle doutait que le grand blond soit du genre à contenir ses ardeurs lorsqu'il offrait ses services, même si elle ne pouvait qu'en supposer.
    Le laissant à son fauteuil, direction du lit fut prise et la robe glissa d'un corps sur une chaise, une autre, dévolue à la nuit, plus courte, d'étoffe fine, venant habiller la silhouette de la fleur avant qu'elle ne s'allonge en observant le galant du coin de l'oeil.
.

    ~ Le Maître ~


Il avait entendu le plancher du couloir grincer, la porte geindre lorsqu’ « elle » l'ouvrit. Il avait alors posé sa tête contre le fauteuil et avait fermé les yeux. Il l'avait senti approcher et n'avait pas bougé d'un poil. Il lui avait fallu toute sa volonté pour ne pas sourire en entendant la réplique de l'épineuse. Il serait sans doute mieux dans un lit? Le tout étant de savoir de quel lit elle parlait, si cela était une invitation à déguerpir ou à se montrer audacieux. Le baiser sur le front aurait-il pu constituer un indice de ses intentions?

Elle s'éloigna de lui et il ouvrit les yeux. Avait-elle perçu l'esquisse de son sourire quand elle lui parla? Ou la pénombre avait-elle fait son office jusqu'au bout pour masquer le visage du Maître, lui qui aimait pourtant tant se pavaner à la lumière du jour? Il ouvrit les yeux alors qu'elle ôtait sa robe. C'était la deuxième fois qu'il la voyait dans le plus simple des accoutrements. Cette fois, c'est la pénombre qui rehaussa le beauté de ses courbes. Spectacle délicieux s'il en était pour le maître. Décidément, "Elle" le fascinait, "Elle" l'attirait.


- Auriez-vous la même pour homme? J'aimerais moi aussi me mettre à l'aise avant de vous rejoindre.

    ~ Le Maître et La Rose ~

    Ce qu'elle avait cru percevoir dans la pénombre, sans en être certaine, se confirma lorque la voix chaude du Dentraigues s'éleva dans la pièce, un fin sourire venant orner ses lippes.
    Je ne suis pas certaine que cela vous aille au teint très cher

Même à cette heure tardive de la nuit ou précoce du jour, il fallait qu'elle lui tienne tête. Jusque quand lui résisterait-elle donc?

- Alors, dans ce cas, j'espère que vous ne vous offusquerez pas que je ne porte pas grand chose quand je me glisserais dans ces draps.
    Par tous les Saints, un homme dénudé dans mon lit... Il est vrai que je risque grandement de m'en offusquer.
    Lucas voyons soyez sérieux quelques instants.
    Cessez vos minauderies et venez me dire si la soirée fut aussi rentable pour vous que pour moi.

    Invitation d'un signe de tête à le rejoindre dans la couche qu'il comptait de toute évidence investir.

Confirmé! Le baiser sur le front devait donc bien être pris comme un indice du comportement à tenir. Décidément, cette galante le surprendrait toujours. Il se leva et se dirigea vers elle, ôtant chemise qui alla rejoindre la robe sur la même chaise.

- Si vous voulez vous retourner, c'est le moment. Sans cela, la pénombre peut aussi faire votre affaire.
    Petit rictus un brin amusé se dessinant sur les carmines de la rose.
    Seriez-vous pudique Maitre Dentraigues ?
    Vous avez un paravent à disposition si vous le souhaitez

    Tête reposée lentement sur l'oreiller de plumes, détournant regard pour laisser au sire une certaine intimité, sorte de rideau virtuellement tiré.

- Le seul paravent que j' accepterais en pareille occasion ma chère serait celui de vos paupières.

S'asseyant sur le lit, il ôta bottes et braies presque dans le même élan. Ces dernières furent pliées avec soin et déposées sous la couche. Puis il se glissa sous les draps et se retourna alors vers la fascinante épineuse.

- Pour répondre à votre question, j'ai adoré ma soirée et j'espère la terminer de la même façon. Quand à savoir si elle a été rentable, je ne puis répondre à cette question encore maintenant. Vous savez qu'en ce qui concerne les aspects monétaires, tout est une question de récurrence. J'imagine que je ne vous apprends rien. Et si vous voulez le savoir, la duchesse de Ravel est une personne...très...intéressante!
    Chaleur masculine et literie s'enfonçant d'un poids supplémentaire, le visage de la rose se positionne de façon à pouvoir converser en appréciant les traits du visage du galant.
    J'ose croire oui que la soirée vous fut plaisante, et que vous avez su mener la dame de Ravel là où vous le souhaitiez et que ce que vous y avez vu fut à hauteur de vos espérances. Quand au fait qu'elle soit intéressante, son parfum qui reste imprégné sur votre peau m'en donne une vague idée oui.

Les lippes du galant s'étirèrerent en entendant les paroles de Rose. Se pouvait-il que...Vraiment? Lucas étira le bras vers "Elle" pour, de toute la longueur de l'index, caresser la peau de son bras, du coude jusqu'en haut de son épaule, une partie de son corps qui, il n'en doutait pas, avait cette nuit subi les hommages d'un autre homme.

-Ne me dîtes pas que vous êtes jalouse d'Elienore ma chère. Je m'en trouverais fort....surpris. Quand au parfum...Eh bien, vu que vous n'avez point de vêtement à me proposer pour cette nuit, me voilà donc au moins couvert et décent sous vos draps.
    L'éclat de rire qui sortit de la gorge de la rose en entendant les propos de celui qui distillait fines caresses sur le satin de sa peau aurait pu suffire pour toute réponse, et pourtant le corps de la brune chatoyante pivota pour se mettre face à lui en redressant la tête pour lui répondre.
    Lucas la jalousie n'a pas sa place ici, ne l'avez vous pas dit vous même le premier jour de mon arrivée ici quand vous m'avez aidé à "m'installer" et je retrouve encore ce mot dans votre bouche ?
    En seriez vous un adepte inavoué ?

    Reprenant position plus lascive, les émeraudes cherchèrent une réponse dans l'argent de Lucas, un sourire étrangement taquin ornant son visage, la supposer jalouse... "Elle"... aurait-il seulement fallu qu'il ait été sien un jour.

Elle le provoquait, elle le cherchait, elle évaluait sa capacité à résister à ses propres envies, à rester le Maître de ses décisions. La pose qu'elle prenait était indécente. Il l'avait constaté, elle le savait. Si là il t'attirait contre lui, roulait sur elle, passait ses mains sous l'étoffe superflue et lui faisait connaître le fin fond de ses pensées actuelles, alors il n'aurait rien eu à se reprocher. Cette pose était pour lui une porte ouverte à la découverte et étonnamment Il s'en abstint.

- Adepte de beaucoup de plaisirs que vous découvrirez peut-être un jour oui... Je ne considère pas la jalousie comme un plaisir excepté quand je le lis dans les yeux des maris dont les dames quittent ma couche satisfaites. Enfin couche, fauteuil, parquet, mur...J'imagine que je n'ai pas besoin de vous faire un dessin, surtout à cette heure-ci.
    Superflu oui je pense, surtout vu la lune qui cède place au soleil, heure où nous, pauvres esclaves du désir charnel des nantis, achevons notre journée de "dur labeur".
    Le ton et l'étirement de lippes que le Dentraigues pourrait traduire sans peine, reflétait toute l'ironie du propos, en revanche le fait était avéré que si certains avaient passés leur nuit à dormir tout leur saoul, ces deux là avaient donnés de leur personne, au propre comme au figuré, lors de cette réouverture et de son after et quelques heures de sommeil ne leur seraient sans doute pas un luxe à refuser.
    Souhaitez-vous terminer votre soirée aussi bien qu'elle a commencé en partageant mon lit pour les quelques heures de sommeil qui nous sont offertes Lucas ?

- Je serais ma foi bien fol de refuser pareille offre ma chère mais pour trouver le sommeil alors que je me trouve dans le lit d'une femme désirable, il va me falloir une petite aide de votre part.
    Une petite aide de ma part ?

- N'est-ce pas point vous qui parliez de parfum tout à l'heure? Je vous échange un ruban noir qui doit être en votre possession contre un baiser déposé sur mes lèvres.

- Devait-il préciser quel était le goût particulier que ses lèvres portaient encore en cet instant? Vraiment? L'apprécierait-elle ou non? votre curiosité vous perdra...

La suite...
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Merci JDMonty
Montparnasse.
{Grand Salon en compagnie de Ambre et d'un serveur}


Montparnasse offrit son bras à la jolie blonde pour la ramener à l’intérieur. Ils pénétrèrent au moment du discours de Flavien. Attentif Montparnasse l’écouta jusqu’au bout avant de délaisser un instant sa partenaire du soir.
Se dirigeant vers un des serveurs, celui qui leur avait amené la bouteille de vin, il lui murmura quelques mots à l’oreille avant de poursuivre à voix haute.


- Pouvez-vous nous faire préparer le petit salon ? Et nous y déposer une autre bouteille de ce vin que vous nous avez amené tout à l’heure je vous prie ?

Il ouvrit brièvement à l’homme avant de glisser une main sur la taille d’Ambre et de murmurer à son oreille :

- Suivez-moi, allons au petit salon, laissons la soirée se terminer loin de nous…

Il n’avait aucun besoin de murmurer ces mots, il profitait seulement de cette intimité imposé pour se rapprocher d’elle et venir sentir son odeur…
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Evroult
[DU GRAND SALON À LA RUELLE - GYSÈLE & EVROULT]

    D'un grognement couplé d'un onyx noir, tu réponds au pied écrasé par la piètre ballerine. Tu lui saisis la taille avec rage, rapproches vos corps jusqu'à sentir les moindres de ses courbes & coutures, soulèves & relâches ta cavalière en prenant garde à retirer toute once de douceur. Tu es si contracté que les veines ressortent à ton cou, & si tu n'étais pas obnubilé par la créature démoniaque que tu tiens entre tes doigts, tu aurais conscience que la chaînette d'argent ne vient pas agresser la peau pourtant fine de ta gorge. Du mouvement du menton, dédaigneux, tu grondes entre tes dents :

      - C'est qu'il faut sans doute qu'un de nous laisse la place... & ma foi, tu as déjà vécu plus que moi.

    As-tu seulement conscience de l'écho que tu fais aux pensées de ta sœur ? si tu rêves souvent d'un monde déserté par cette fratrie de parasites, tu es encore loin d'imaginer mettre un terme définitif à ces vies que tu hais tant. Jamais tu n'as été de ces mains qui exécutent, de ces âmes froides & sans remords, de ces faucheurs résolus capables d'achever leur œuvre de haine & de mépris d'une lame aiguisée. Jamais les côtoyer, dans les secrets tamisés des alcôves des bordels, ne t'a donné l'idée seule de dévier vers cette voie trop trouble. Tu es de ceux qui offrent la petite, de mort, tu ne vis que pour pouvoir la servir, encore, & encore, & encore aux mêmes corps tendus d'un manque que tu sais si brillamment provoquer. La tentation de ton aînée ne peut t'effleurer l'esprit, & la menace proférée comme on serre la corde au cou du condamné ne t'arrache de fait qu'un sourire méprisant, & une pensée moqueuse pour celle que tu crois encore dominer.

    Inconscient, tu l'es. Suffisant, aussi. La honte ne t'étreint pas au rappel de ce qui vous a mené là, à vous jauger la haine aux lippes, la rage au ventre, prêts à vous étriper jusqu'à ce que le plus faible flanche. Tu sais te trouver les excuses & pardonner ta propre folie, celle qui t'aura poussé à couler sur ce parchemin terne une vaste blague, mauvaise & ridicule. Tu te félicites même, en public, de la finesse d'esprit dont tu as su faire preuve pour faire croire à ton frère que tu saillais sa sœur. Le souvenir, en d'autres circonstances, t'amène encore à verser quelques larmes de félicité. Tu es gamin, Evroult. Sans repères, sans limites, sans mesure. Tu es gamin, & hais avec rancœur & jalousie, caprice & rivalité. Parce que Louis-Marie est le préféré, parce que Gysèle est la digne descendante, parce qu'ils ne savent voir la monstruosité de la mère Ponthieu, que toi tu vois mieux que personne, & qu'ils accaparent en prime l'amour qu'elle avait à donner. Ils prennent tout, sans jamais rien laisser. Ils s'offrent tant d'amour l'un à l'autre qu'il n'y a plus de place en leurs palpitants étriqués pour toi, le benjamin résolument oublié. Oh ! bien sûr que tu n'en veux pas, de leurs sentiments mielleux & répugnants, souillés de ce nom de famille mille fois honni. Tu n'en as jamais voulu. L'idée même te révulse. Tu veux bien admettre qu'il te faut leur attention, parfois, oui. Un peu. A demi-mots. Mais tu préfères qu'ils s'acharnent à te détester comme tu sais si bien le faire pour eux, plutôt qu'ils glissent dans cette douceur condescendante & vicieuse dont votre génitrice sait si bien user.

    En somme, tu t'assures que vos relations restent saines. N'es-tu pas le seul épargné par cette lignée si laide ? tu t'étouffes. Tu dois admettre que ce n'est pas le moment de te louer si bien, quand rouquine ne perd pas un instant pour t'enfoncer, ci un coude dans les côtes, là une épaule dans le torse. Il te faut te reprendre, ne pas te laisser déséquilibrer par ces flammes qui dansent devant tes yeux, cet insupportable parfum de trahison, cette piteuse allure moulée dans les pas de la mère Ponthieu. Tu accuses un coup de trop, avant que ta lippe ne se retrousse en un simulacre de sourire. Pincer la taille. Écraser la main. Percuter de l'épaule. Et rire, de ces éclats surfaits & mal actés, pour donner un change faussé aux spectateurs des retrouvailles. Tu n'es pas mauvais acteur, pourtant. Mais à mesure que tu la frôles, la bouscules, la heurtes, tes humeurs s'affolent & attisent cette même folie qui te fit, quelques semaines plus tôt, jouer avec le désespoir de ton frère.

      - Il y a déjà ta mère, ce monde n'a pas besoin de toi. Tu es piètre catin, piètre sœur, piètre fille... Piètre, piètre, piètre. Ta vie est piètre.
      Ah ! tu n'es qu'une copie ratée de ta très, très chère mère. Tu devrais laisser les moines finir de s'occuper de toi, tiens. Et... essaye, cette fois, de ne pas rater ta mort.

     Quant à toi, Gysèle, tu as oublié ce que tu voulais depuis ta plus tendre enfance. Depuis ces jours où, malmenée par la jalousie d'une génitrice irresponsable, tu reportais tes besoins d'affection sur Louis-Marie et parfois sur Evroult, avant qu'il ne devienne trop borné pour voir que tu étais différente...ou du moins que tu faisais tout pour l'être. Si le nom Ponthieu est maudit, contrairement à ce qu'en pense le benjamin, le sort s'est malheureusement acharné sur tous et tu ne lui tenais pas rigueur des haines et coups bas régulièrement envoyés vers vous jusqu'au jour où il est allé trop loin. Perdre LM, c'était comme perdre ton appui dans ce monde. Tu avais alors réalisé que tu n'étais rien du tout et ton gigolo de frère avait ouvert un trou tellement béant dans ton palpitant, que tu n'a pas pu pardonner. Pas cette fois. Evroult est coupable. Coupable de ton malheur, coupable de ton incapacité à retenir Louis-Marie, coupable de te toucher autant. Tu le hais de savoir viser si juste et tu voudrais retirer à son visage ce sourire faux qui te glace le sang. 

    Il te pique encore. Ne voit-il pas combien tu n'attends qu'une provocation pour lui faire du mal ? Est-il donc dépourvu d'instinct de survie qu'il lui faille continuer de te mettre le cœur en miettes ? Piètre, piètre Gysèle, tu n'as pas ta place dans ce monde. Pâle double de ta mère, fille indigne, sœur désastreuse, tante maladroite et mère criminelle. Ah, c'est douloureux quand il te reparle de ce moine, lui qui se rappelle sûrement l'état dans lequel tu étais après cette rencontre. Il continue, votre danse est brutale, tu ramènes une main à ses reins avec une force qui pourrait s'assimiler à de la passion si tu n'y plantais pas tes ongles. Tes yeux ne quittent pas les siens, cherchant à creuser les pensées profondes de ton double de sang et tu n'y trouves que de la haine à l'état pur. Le jour où tu avais extorqué une étreinte à ce jeune homme semble presque irréel quand à cet instant précis tu n'as qu'une envie, le faire disparaître de vos vies. Elles seraient tellement plus faciles sans ce nuisible colérique et inconstant qui n'a de plaisir qu'à semer le chaos. Chevalier de l'apocalypse, Evroult réveille en toi des instincts meurtriers et le couteau logé dans ta manche n'a jamais été aussi pesant.


      - Tu es jaloux, mon chéri. Jaloux de moi, de ma vie. C'est toi la piètre réplique. Tu es ma copie en bien médiocre. N'es-tu pas mon petit frère après tout ? Tu essaies de suivre les pas de ton aînée, mais tu es court sur pattes et tu aboies si fort que l'on a tendance à oublier que tu es un homme pour te confondre avec un toutou. Brave, brave Evroult, ce n'est pas grave tu sais, tu ne peux tout maîtriser, commence déjà par savoir garder une femme. Si tu ne sais pas faire, je gage que Marie-Gertrude sera ravie de te l'apprendre.

    Un baiser termine ta tirade, là au coin de ses lèvres. Ça te dégoûte, mais quoi de mieux qu'un faux baiser pour dégainer discrètement cette lame qui te brûle presque la manche. Tu es en colère, Gysèle. Tout ton corps est tendu et tu te colles contre celui de ce cher petit frère feignant l'enlacement quand tu ne rêves que d'une chose : lui faire très très mal. Alors que la pointe meurtrière est déjà en train de remonter le flanc fraternel, qu'il peut déjà sentir l'ombre de la menace que tu apposes contre lui, tu oublies presque où tu te trouves et qui pourrait te surprendre à faire couler le sang dans un établissement comme celui de l'Aphrodite. Tu es folle. Aveuglée, ton égo meurtri, ton cœur trop souvent malmené à force de tenter de trouver une place à ce jeune frère qui la refuse, ton pouls semble soudain plus bruyant à tes tympans et l'adrénaline monte vicieusement. Là, il serait si facile d'en finir maintenant. Plus d'Evroult, plus de peine, plus de douleur, plus de danger. Ton couteau est à présent logé sous les côtes de ce dernier, là où Pierre t'a enseigné à frapper. Tu murmures tout contre sa joue :

      - Tu n'aurais jamais dû écrire cette lettre. Je me serais effacée de ta vie comme je te l'avais promis. Mais tu n'as pas pu t'en empêcher... et mon pauvre chéri, malheureusement pour toi, ce soir, c'est moi qui tient ce couteau.

    Ta main tremble. Serais-tu devenue un assassin ? Pourrais-tu ravir la vie de ton petit frère de sang froid, là ici et maintenant ? Tes paroles sonnent-elles aussi fausses aux esgourdes evroultiennes qu'elles ne le font aux tiennes ? Tu étais pourtant si déterminée à en finir quelques secondes avant, tu t'étais convaincue qu'une vie sans lui t’allégerait de bien des problèmes. Alors, pourquoi cette hésitation ? Tu sais qu'il va continuer à te faire du mal, tu sais qu'il va vouloir briser Louis-Marie aussi. Votre vie sera bien plus simple une fois que tu auras dépassé ta crainte. Quelle crainte d'ailleurs ? Est-ce seulement la peur de tuer ou juste celle de trop aimer ce jeune homme malgré tout, en dépit de tout ? Un léger hoquet s'échappe de tes lèvres et ton cœur s'accélère, tu reprends un peu de cran et raffermis ta prise sur le manche. Evroult, Evroult, tu vas lui faire perdre la tête, si ce n'est pas déjà fait. Il fait office de purgatoire, capable de ressortir toute la crasse que tu accumules, rouquine. La vérité, c'est que si Louis-Marie est différent de toi sur bien des points, tu n'as jamais été aussi consciente de ta ressemblance avec ton benjamin qu'en cet instant. Et si jusque là tu avais mal, cette révélation est bien plus atroce encore et embrume ta raison. Dextre frappe soudainement, plonge dans le flanc, malheureusement pas assez profondément pour en finir. Tu n'avais pas calculé, le manque d'amplitude de tes mouvements et l'épaisseur du vêtement. La lame blesse l'étalon fou, mais n'ira pas finir son chemin là où tu l'espérais. Le voulais-tu seulement ? Ton visage blafard, tes grands yeux écarquillés et larmoyants semblent pourtant déjà regretter ce que tu as fait. Trop tard, le sang est versé, tu retiens un sanglot, le masque se craquèle et tu t'apprêtes déjà à prendre la fuite et oublier ce cauchemar qui ne fait qu'empirer.

    Pourquoi ne pousses-tu aucun cri, Loupiot, alors que la lame triomphe du tissu épais & riche pour entailler ta chair ? pourquoi te tais-tu donc, soudain, alors que la seconde d'avant tu préparais une logorrhée inutile & pourtant tellement satisfaisante, à voir cette aversion dans les pupilles de ta sœur ? pourquoi ce vacarme résonnant en ton esprit ne vient-il pas transpercer tes tympans ? tes lèvres se sont ouvertes, laissant mourir un hoquet de stupeur dans l'ambiance échauffée de la grande salle, & tu n'as plus émis aucun autre son. Pourtant tu l'entends, ce palpitant affolé d'adrénaline & de douleur. Tu l'entends si fort qu'il te grésille à l'esgourde, & tu pourrais parier que même les invités échappés dans les nombreuses chambres de l'Aphrodite ont du l'entendre aussi. Il te semble, même, entendre ces perles carmines imprégner le sombre de ta mise & goutter sur les dalles. Mais non. Non, tu ne dis rien. Tu ne cries pas. Tu ne tombes pas. Tu vacilles certes un peu, tu tangues & te rattrapes au premier soutien qui te passe sous la main.

    Gysèle. Es-tu fou ? ne viens-tu pas de découvrir que sa flamme, non seulement fascine & réchauffe, mais brûle, aussi ? ne devrais-tu pas plutôt fuir, tomber, hurler à l'aide ? ta main libre s'est portée à ton flanc, parce que ça pique, certes, mais surtout parce que tu n'y crois pas. Ce n'est pas du sang, qui poisse sous tes doigts tremblants. Ce n'est pas un couteau, que tu as vu briller sous les milliers de bougies vous éclairant. Ce n'est pas de la peur, qui transpire dans les quinquets effarés de ton aînée. Non, Gysèle. Non, Marie-Gertrude. Tu ne m'as pas tué. Tu n'as même pas tenté de me tuer. Tu n'as pas le droit de m'ôter la vie, après avoir passé des années à la gâcher.

    Tes doigts se sont serrés si fort sur le bras de la galante que tu crois risquer de lui briser les os. Mais Gysèle n'est plus Gysèle, en cet instant précis. Gysèle est sa mère, parce qu'elle lui ressemble tant, de son minois catin à sa manière, crois-tu, de tenter de te foutre dans son lit. Elles te poursuivent, de tes aventures à tes rêves, de tes cauchemars à tes conquêtes, harcelant toujours, abandonnant, toujours aussi. Tes genoux fléchissent. C'est que ça fait mal, hein ? cet éternel recommencement de violences, par la chair & l'esprit, & d'abandon, encore, encore, encore. Ça fait mal, comme un couteau enfoncé dans le flanc, tiens. Ça fait mal, comme une sœur qui te poignarde. Tu raffermis ta prise. Gysèle, Gysèle, Gysèle. Non, Gysèle, tu n'es pas ta mère.
    Toi, tu assumeras tes actes. Tu ne me fuiras pas.

    Pas cette fois.

    Et pourquoi te trouves-tu encore devant lui Gysèle, retenant un cri de douleur à la poigne qui enserre ton bras ? Tu n'arrives pas à le quitter des yeux, tu ne mesures pas encore ce que tu viens de faire, hypnotisée par tout ce qu'il dit sans même ouvrir la bouche. Il vacille, tu le retiens, vieux réflexe fraternel qui te reste même après avoir tenté de lui voler sa vie. Tu es un monstre Gysèle, un monstre des plus dangereux. On ne te voit pas venir sous tes airs de jeune femme toujours taquine et insolente, sous tes airs de victime, de pauvrette, de femme bafouée. Là sous ta crinière rousse, vit la pire des hypocrite, la plus infâme des fourbe et traîtresse. Car si Evroult vous a fait du mal, tu viens de montrer que tu es pire que lui. Du sang coule sur ta robe, Quelle importance, pourvu que tu aies un sourire sur les lèvres.* Quelle importance, pourvu que le spectacle continue. Tu lances un regard autour de toi et pour la première fois depuis que tu as commencé cette danse, tu te préoccupes qu'on vous regarde. Mais ton benjamin est silencieux, comme trop stupéfait pour crier ou se faire entendre et toi, tu es déjà pleine de remords, tes mains tremblantes et des sueurs froides longeant ton échine. Si le carmin ne se voit pas sur la tenue sombre d'Evroult, sur ta robe à toi, la tâche est des plus saisissantes. Il te faut quelques secondes pour te ressaisir et quelques unes supplémentaires pour entraîner ton frère vers la sortie.

      - Je suis...Je vais te...
      - ... tuer... me tuer... tu vas me tuer ?

    Que vas-tu lui faire, Gysèle ? L'achever ? Le soigner ? Te rends-tu comptes qu'on ne joue pas avec une vie comme tu le ferais avec une poupée ? Réalises-tu seulement que tu as failli lui prendre son dernier souffle d'un simple caprice, d'une simple colère que tu n'as pas maîtrisé. Il rend tout tellement vrai, tellement palpable, tu sens le goût du sang, de votre sang que tu as fait couler et ça te rend malade. Déjà aux prises de tes regrets, tu le soutiens et l'enlaces comme le ferait une sœur, une vraie avec son frangin démuni. Non, tu n'iras pas au bout de ta première envie. Étrangement, le besoin de le tuer t'est passé dès que la lame a percé sa peau. Envolée, cette pulsion s'est rétractée, remplacée par un profond sentiment de culpabilité et une certaine colère. Cette ire lui est toute adressée à lui, mais contrairement à la précédente, tu la couves avec un calme surprenant. Il t'a poussée à bout et il te rend monstrueuse. Déjà, tu le remets coupable de tous tes délits et si tu ne le tues pas, tu ne souhaites tout de même plus l'avoir dans ta vie.Tu hèles un gardien, tu le connais, il surveille les entrées de l'Aphrodite et tu fouilles le corps de ta victime à la recherche de sa bourse que tu places entre les mains du type.

      - Pouvez-vous le raccompagner à une auberge et préciser qu'il a besoin de soins ? Ce maladroit s'est blessé en jouant avec une lame, les jeunes hommes sont vraiment idiots, ne trouvez-vous pas ?
      - Tout d'suite Mam'zelle Gygy. Pauv' garçon, j'vais m'occuper d'ça. Z'êtes bien bonne, ma p'tite, z'avez même tâché vot' jolie robe !

    Pour sûr que ces propos te hanteront un bon moment. Bonne hein ? Il n'y a qu'à sentir la poigne de ton frangin pour savoir ce qu'il en pense et tu n'oses même pas le regarder tellement tu crains ce que tu lirais dans ses yeux. Demain, les ecchymoses à ton bras te rappelleront ce que tu as fait et la tâche qui vient de t'endetter auprès de tes patrons d'une nouvelle robe à fournir, ravivera la crasse que tu t'évertues à cacher sous ce sourire enjôleur. Tu réalises alors, quand enfin, le bonhomme te libère du poids de ton frère, quand tu perçois le souffle haché de ton propre sang et quand tu relèves tes doigts tâchés de pourpre devant tes yeux, qu'il aurait mieux valu pour tes deux frères, que le moine s'occupe de toi une bonne fois pour toute. Evroult n'a jamais eu autant raison que ce soir, Evroult a vu juste. Evroult sait ce que tu es. Bien heureux les simples d'esprit. Car tu aurais été bien plus heureux, Evroult, si tu avais été plus ignorant..


* Adapté d'une réplique de Margot dans le film "La reine Margot".
À 4 mains.

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[REFONTE]
Elysandre
Des mois... des années peut être ? Que la Renarde n'avait pas reçu d'invitation. Il faut dire que son rôle de mère et d'épouse, ainsi que celui de couturière ne lui accordait que peu de temps pour de nouvelles connaissances. De nature plutôt méfiante, la jeune femme paraissait sans doute peu avenante, ce qui pouvait, très certainement en freiner certains ou certaines à vouloir faire plus amples connaissances. Aussi, n'avait-elle pas oublier le fait que la jalousie, à la hauteur de celle de son compagnon, l'avait bien souvent gardé de festivités pour être certaine de ne pas avoir d'ennui avec qui que ce soit.

Pourtant, à l'invitation du Duc, à l'Atelier, la Renarde n'avait pas hésité un seul instant à répondre favorablement à la demande. L'occasion pour elle de sortir de son quotidien devenu sans doute trop mélancolique, et de pouvoir faire également de nouvelles rencontres. Bien que l'endroit, autrefois, se faisait connaître pour une activité à laquelle elle n'aurait jamais songé paraître, elle décida de tenter l'aventure. Sans doute y trouverait-elle également des connaissances qui sauraient l'aider à s'intégrer à l'endoit.

Après quelques minutes de préparation, elle partit en direction des festivités dont l'adresse avait été communiquée avec l'invitation.




Arrivée devant les portes menant à la réception, la Renarde hésita. Avait-elle bien fait de venir en ces lieux ? Son cœur commença à s'accélérer en voyant au loin de grandes voitures richement ornées. Et comme à chaque anxiété, la brune ne put s'empêcher de se mordre la lèvre, reculant alors de quelques pas. Ce fut alors l'arrivée de nouveaux convives qui poussèrent la jeune femme à aller de l'avant sans pouvoir faire demi-tour. Aussi, prenant son courage à deux mains, n'ayant plus l'ombre d'un choix, elle se présenta alors dans le salon où devait se tenir la réception, ne manquant pas de rejoindre un endroit discret, le temps pour elle de se faire aux lieux.
Cassandre_
[A l'entrée]

Ses yeux verts teintés subtilement de brun fixent la façade de ce bâtiment qui reprend vie petit à petit. Et un long soupir s'échappe, lentement. Pourquoi est-elle venue ? Tiraillée comme souvent, par son envie de rester enfermée dans une solitude salvatrice et celle de faire l'effort d'être moins sauvage avec le monde qui l'entoure. Et notamment avec cette vie Parisienne faite d'apparences et de pinces. Une volonté d'être là aussi, pour celui qui s'est positionné auprès d'elle et avec un naturel déconcertant, comme le chaperon bienveillant qui rend un peu moins douloureux le vide laissé par son parrain décédé, tant il lui ressemble parfois. Mais la bonne résolution d'il y a quelques heures s'évapore à mesure que la blondinette continue d'observer au loin les différentes arrivées, la faisant soupirer de plus bel. Cassie ne s'est jamais sentie à l'aise avec ces gens là, et c'est avec eux, que le Renard souhaite la coller pendant toute une inauguration ? C'est officiel, elle le hait... pendant les prochaines minutes en tout cas. Sur de sur.

Dix minutes de courbettes et tu pourras disparaître ni vue ni connue.


Quelques pas plus tard, elle se retrouva derrière celui qui n'était autre que l'huissier qu'ils n'avaient pu filouter lors du Couronnement de la Reyne. Et comme elle était en manque d'accroche originale, la Présidente du Tribunal du Palais se contenta d'un doux :

Ce que les Mainois sont bruyants.


Pour signifier sa présence, non sans oublier un sourire angélique sur son minois.
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Lucas.


      — Chambre de Lucas Dentraigues, au matin —

Il avait passé toute la matinée et une partie de l’après-midi à peaufiner son apparence. Certains diraient que même les dames prenaient moins de temps que Lucas Dentraigues à se préparer. Au lever du jour, il avait fait venir un barbier à l’Aphrodite. Lorsque celui-ci eut terminé son travail, pas un poil de barbe ne dépassait du rang. La moustache finement ciselée était au gout du galant. Ni trop large, ni trop épaisse. La patience de l’artisan avait été mis à rude épreuve et pourtant celui-ci connaissait fort bien le niveau de qualité que requerrait l’ex-avocat. Aujourd’hui était un jour particulier. Aujourd’hui, il se devait d’être irréprochable: les propriétaires de l’Aphrodite avaient bien insisté sur ce point.

La veille il s’était assuré que le repassage de sa chemise blanche à large col et aux manches bouffantes n’avait laissé aucun faux-pli. Il avait sorti son jabot orné de dentelle d’Alençon et l’avait ajusté avec soin. Nul doute que les galantes de l’Aphrodite avaient pris moins de temps à tremper dans leur bain que le Maître à ajuster son jabot. L’homme avait l’habitude de laisser le col de sa chemise largement ouvert ces derniers temps et si ce genre de fantaisie convenait parfaitement pour la fin de soirée lorsque l’ambiance serait plus détendue et plus propice à la badinerie, il était totalement déconseillé pour accueillir les invités en ce jour de réouverture du prestigieux établissement parisien.

Pantalons et gilet de couleur sable complétèrent sa tenue vestimentaire. Les entrelacs écrus de soie du gilet glissèrent sous la paume de son index, chacune des courbes évoquaient déjà au galant une fin de soirée riche en ravissements de tout genre. Le pantalon descendant jusqu’en dessous du genou, il avait ajouté à son accoutrement des bas de soie de la même couleur que ces soyeux entrelacs. Des chaussures de cuir noir ornées d’une large boucle et d’un talon rouge à la mode parisienne habillaient ses pieds avec élégance.

Bijoux or not Bijoux, tel était la question qu’il se posa. En jeter un peu, beaucoup, passionnément, à la folie ou pas du tout? Si certains hommes en abusaient, Lucas trouvait que cela se faisait souvent au détriment du bon goût, sans doute les relents d’une époque dépassée où pour séduire les hommes devaient se barder de métal et se déplacer aussi gauchement que des canards. Heureusement pour lui, le brocart et le velours avaient aujourd’hui plus d’attraits auprès de la gente féminine que le cuivre, le fer et l’acier. Lucas avait finalement arrêté son choix pour une simple chevalière d’or et d’argent sur laquelle était gravée le caducée d’Hygie.

Dans la penderie de sa chambre, son manteau long fait en feutre de couleur sable n’attendait plus qu’il descende au rez-de-chaussée accueillir les invités. Juste avant de refermer la porte de sa chambre, il ajouta quelques touches de parfum provenant de la Lyre d’Eurydice, une fragrance qui envoyait indubitablement un message : « Ce soir, ce sera douceur et sensualité ».





      — Au rez-de-chaussée, à l’entrée, prêt pour la réception des invités —

La veille encore, une bonne partie des invités lui était inconnue. Certes, il connaissait ceux qui avaient leurs habitudes dans la capitale. Le parisien n’avait que peu d’intérêt pour les affaires des provinces vassales. Il n’avait jamais quitté son Paris natal, y avait grandi et brillé avant que son étoile ne pâlisse sous les coups de boutoir et les intrigues d’une bande de couards. Il avait passé une bonne partie du vendredi à combler ses lacunes, apprenant par coeur la liste des invités, se renseignant un minimum sur ceux qu’il connaissait moins. Cette soirée d’ouverture n’a été offerte qu’à un nombre restreint d’invités, chacun ayant eu le loisir de venir accompagné. Lucas savait que Flavien aurait fort à faire pour que la soirée soit parfaite, aussi avait-il décidé que sa place serait, dans un premier temps, à l’entrée afin d’accueillir personnellement chaque nouveau venu, répondre à ses questions…et accessoirement vérifier que les intrus comprendraient qu’il serait dommage de faire appel aux yeux d’Hadès pour faire respecter le désir des propriétaires du lieu.

Lorsqu’il arriva au rez-de-chaussée, il constata que certains invités n’avaient pas attendu bien longtemps pour entamer la soirée. Eglantine était déjà en galante compagnie avec le sieur Eddard Lablanche d'Abancourt, la Duchesse de Châteauneuf-sur-Loire, pair de France et le Duc d'Ornon & de Bénauges . En compagnie d’une personne que Lucas avait du mal à reconnaitre, La dauphine de France avait également fait l’honneur de sa présence.

A la porte, d’autres visiteurs de qualité attendaient déjà: Le prime huissier royal et une dame qui devait manifestement être son invité du soir. Enfin le crut-il


- Soyez le bienvenue à l’Aphrodite Sire Ducastel de la Mortellerie. Je vous en prie, veuillez entrer dans le Grand Salon, notre Chambellan va vous annoncer.

Le Chambellan en question n’était autre qu’un simple employé de l’Aphrodite formé à la va-vite la veille au soir par le Dentraigues pour en faire office. Lucas s’inclina devant le prime huissier et d’un geste ample de la main droite, l’invita à entrer alors que résonna dans le grand salon…

- Sire Edouard Ducastel de la Mortellerie…Dame Cassandre de Castelléo-Dagnard de Monssygnac

Au milieu du grand salon, une dame brune vêtue avec élégance semblait visiblement perdue, un brin timide peut-être. Aucun homme, aucune femme dans ses parages? Était-elle venue seule? Ce détail intrigua le galant et il envoya le « Chambellan » s’enquérir auprès de sa personne afin de savoir si celle-ci avait besoin d’aide. Les mains dans le dos, attendant les invités, il n’avait pas remarqué que le jardin avait déjà reçu de la visite.


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Edouard_de_noireterr
Cassandre la resquilleuse a écrit:
”Ce que les Mainois sont bruyants”



Petit sourire plus qu’amusé. Le premier huissier avait reconnu la voix d’une personne croisée deux fois. Serait-ce la troisième ? Diable.


Et encore, je ne suis pas encore bourré. Vous verrez quand je chanterais à tue tête debout sur une table, je rajouterais encore au volume sonore.


Puis, petite révérence, était-il sérieux ? C’était, soyons honnête, plus que possible oui. Puis il reprit sur le ton de la confidence :


Et au fait, très chère dame, vous comptez encore sur moi pour rentrer en douce quelque part ? Si c’est le cas vous avez de la chance, je suis d’une humeur ouverte ce soir !


Puis le bâtard parisien pur cru lui aussi (Miraclien même si mot existait mais non) vit sortir un homme fort sympathique. Oh oh ! On le traitait avec déférence, ce serait plus compliqué maintenant de vomir son vin sur les sofas après cela.


Messire votre accueil est plus que parfait, l’Aphrodite est à la hauteur de sa réputation.

Et puisque badinerie il y avait, Ed tendit le bras à Cassandre, avec un sourire amusé. Ainsi c’était son invitée, soit. La soirée était à peine commencée libre à eux-deux de se trouver d’autres invités à l’intérieur.

Si Cette Dame veux bien se donner la peine de m’accompagner j’en serais ravi.
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Erwelyn
Lynette était pensive, alors que sa chambrière finissait de lui ajuster sa tenue, composée d'un bliaud et d'un surcot de couleur vive, comme le voulait sa condition et sa haute noblesse. Les formes de sa taille bien soulignées et le décolleté ne pouvaient cependant pas cacher l'âge qui avançait inexorablement. Plus ça allait, et plus la princesse trouvait que les affres du temps lui laissaient des marques, malgré tout ce que son époux pouvait dire. La cinquantaine allait bientôt sonner et le poney rose allait passer dans la catégorie des vieilles, si elle ne l'était pas déjà pour certains. Et puis il n'y avait pas que ça qui la tracassait... La dernière fois qu'elle avait mis les pieds à l'Aphrodite, c'était il y avait des années de ça, lors du bal de Noël ou de fin d'année. Costumée, elle avait rencontré Alphonse, qui lui avait procuré des sensations qu'elle n'avait pas connues depuis longtemps, à ce moment là. La Corleone en avait beaucoup parlé avec Axelle, lors de leur soirée à Evron, où elles avaient barboté toutes les deux dans un bain chaud et picolé sur son lit jusqu'à pas d'heure. Retourner à cet endroit sans qu'il ne soit là, c'était un peu comme si le lieu avait perdu son âme. Heureusement, c'est accompagnée de son époux, le seul, l'unique et l’inégalable Lexhor, qu'elle irait aujourd'hui. Depuis des années il partageait sa vie, et si Alphonse avait réussi à lui redonner une certaine confiance en elle lorsqu'elle se sentait si seule, Lexhor avait, de son côté, merveilleusement bien terminé le travail. Enfin terminé... c'était vite dit. Fallait vraiment pousser grand-mère dans l'eau du bain pour dire que Lynette avait confiance en elle. Mais tout de même, y avait de l'avancement.

Coiffée et apprêtée, donc, la princesse retrouva alors l'Amahir qui finissait également de se préparer. Lynette l'observa un instant avec un petit sourire, s’approchant de lui et réajustant le tissu au niveau de ses épaules, avant de balancer, tout de go.


Dis, on va carrément aller dans un bordel tous les deux, tu te rends compte ? Je me demande si je vais pas t'offrir une prostipute pour la soirée. Du genre jeune avec des gros seins ! Ça te ferait du bien, je suis sûre, tu te sentirais à nouveau jeune et fringuant !

Ce disant, sa main droite avait glissé tranquillement un peu plus bas, histoire d'illustrer ses propos par le geste. C'est que forcément, se pointer dans un lupanar, ça donnait envie de faire des blagues débiles et d'avoir un comportement pas du tout noble.
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.elle


["Elle" et Angèle à l'étage dans la chambre d'"Elle"]

    La réaction de la garçon manqué amusa "Elle", qui répondit succintement aux questions de la simplicité franche à l'état pur.
      Oui des femmes paient mais pas que... et il est "spécial"... un peu

    Devait-elle ajouter qu'elle connaissait Montparnasse en tant qu'éphèmère client d'un soir et non en tant que courtisan, non, assurément non.
      Allons donc accueillir les invités oui, il est plus que temps.

    Enjoignant le pas vers la sortie, "Elle" attrapa au vol une étole de voile qu'elle déposa sur les épaules d'Angèle pendant qu'elles se dirigeaient vers l'escalier.
      Ca dissimulera tes épaules, on t'ennuiera peut-être moins comme ça

    La petite brune avait été clair, pas de galante pour elle, alors autant faire passer le message avec subtilité par des petits détails.


["Elle" et Angèle, escalier menant au salon]

    Du haut de l'escalier, les émeraudes balayèrent l'endroit, constatant la présence d'un certain nombre de privilégiés déjà présents.
    L'ange blond déjà en place, pour ne pas dire en piste, mais "Elle" ne doutait pas que ce genre de mondanités lui étaient coutumières, la jeune femme évoluait dans son élément, à un détail près possiblement, quoiqu'il ne fallait jamais juré de rien.
    Il ne fallait pas trainer davantage et attrapant le velours carmin de sa robe, étoffe fut légèrement remontée pour descendre l'escalier avec précaution.
    Inclinaison de tête subtil vers Angèle un murmure s'échappa de ses lèvres.
      Si tu veux entrer dans la danse, propose à boire peut-être ou regarde là... il y a une dame esseulée, ça pourrait être une occasion pour toi.
      Et surtout essaie de vouvoyez, je crains que le tutoiement passe mal tu vois


["Elle", dans le grand salon]

    Petit sourire entendu, les chemins des deux brunes divergèrent, celui de la galante à la rose se stoppant un court instant dans la pièce pour détailler chacun.
    Etoffe relâchée, le poids du velours rendit à la tenue toute sa splendeur les pans caressant dans un léger frottement le sol de l'Aphrodite.
    Les noms annoncés par le chambellan s'enchainaient, tous plus longs les uns que les autres, pour sure le haut du panier se trouvait ici et une pointe d'appréhension se glissa dans sa déglutition.
    Une longue inspiration, comprimant sa poitrine contre l'étoffe corsetée de sa robe, et la brune aux reflets de feu entra dans l'arène, se dirigeant vers l'entrée pour accueillir les nouveaux arrivants, saluant d'un regard Lucas, postée non loin de lui, en inclinant la tête pour saluer leurs invités.
      Soyez le bienvenue à l'Aphrodite

    Bras s'ouvrant vers l'intérieur du grand salon, l'invitation à la découverte était lancée.

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Merci JDMonty
--Eglantine_
[Dans le grand salon avec Kheldar puis Xalta, Kronembourg, Alvira et Septimus ]

Quand la blondine s'était approchée de l'homme, elle n'avait guère prit garde ni à sa taille, ni à sa carrure. Mais quand elle leva ses yeux sombres vers lui, elle crût ne jamais finir devoir les relever avant de s'accrocher aux prunelles grises. Quant aux épaules, elle aurait pu danser sans s'échapper de leur ombre. Et c'était à la fois terriblement inquiétant et délicieusement captivant. Quoi qu'il en fut, d'un sourire, il la rassura et le sien ne fleurit que plus largement encore à ses lèvres.

Mon nom est Églantine. Je suis enchantée de faire votre connaissance, Eddard. Se haussant furtivement sur la pointe des pieds alors que le salon s'emplissaient doucement de froissements de soie et de velours, elle hocha la tête. Je pense oui. La soirée s'annonce belle. Pour les vins...

Elle fut coupée dans son élan par l'arrivée de deux couples qu'elle salua d'un signe poli de la tête. Polie et surtout bien soulagée de ne devoir réciter la ronde des vins qui étaleraient leurs robes carmin dans les coupes ciselées pour mieux enchanter les palais. D'un signe discret, elle fit signe à l'un des valets embauchés pour l'occasion d'apporter un plateau garnis de mignardises et du vin fameux. Soyez les bienvenus à l'Aphrodite réitérera-t-elle pour les nouveaux arrivants. Si elle reconnut certains visages qui se présentaient à elle pour les savoir navigant dans les hautes sphères du pouvoir, elle n'en dit rien. De peur déjà de faire une bévue en se trompant, et surtout, ici, chacun devait rester libre d'annoncer son nom, ou pas. Je me nomme Églantine. D'un regard en coin, elle observa le valet qui se tenait en retrait comme le piquet imbécile qu'il était au lieu de tendre son plateau. Et si ses yeux un instant se plissèrent d'une lueur colérique, elle effaça aussi vite l'agacement en faisait un pas vers l'arrière, réprimant l'envie de d'enfoncer l'angle aigu de son coude entre les côtes bêtasses. J'espère que ce... Zut... Figeac ou Pretrus ? Églantine avait pourtant appris sur le bout de doigts le nom des vins qui seraient proposés, mais tout d'un coup, tout semblait avoir fui traîtreusement de sa tête. Ses joues rosirent un instant avant qu'elle ne parvienne à articuler en esquivant ...Grand cru sera à votre goût. Puis, retrouvant sa constance. Si vous souhaitez vous délasser, les causeuses sont fort confortables. Puis hochant doucement la tête pour s'effacer et les laisser deviser à leur aise. Si vous avez besoin de quoique ce soit, les membres de l'Aphrodite se tiennent à votre disposition.

Oui, sa politesse un brin -ou une brassée suivant les avis- exagérée n'avait d'égal que ses caprices.
Gysele
    [Dans la chambre de Gysèle]

J'observe mon reflet plutôt crispé et me trouve bien morne pour une grande première. De toute évidence, je suis d'une humeur de chien ! Le stress, ce corsage qui donne du fil à retordre à la jeune fille qui en tire les lacets et cette tristesse que je ne parviens pas à chasser. Bon sang cette dispute avec mes frères tombe au pire moment. Les mains accrochées à une commode, je râle tout mon fiel sur la pauvre demoiselle qui parvient enfin à me couper le souffle en tirant trop fort sur le cordage.

    -Hmpf... tu l'as fait exprès j'en suis sûre !
    -Mais non enfin ! Ne bougez plus c'est presque terminé.

J'entends les bruits de pas pressés dans le couloir, les frémissements des jupons, les rires étouffés, les conversations coupées et je tente de ne pas me laisser emporter par cette atmosphère électrique. Agitée, j'ai jamais eu à travailler de cette manière et une certaine appréhension me noue le ventre. Moi, Gygy, la femme la moins timide au monde, je m'inquiète à l'idée de descendre accueillir la crème de la crème. Lorsqu'enfin le corset est noué, rehaussant ma poitrine moyenne en lui donnant bien plus de rondeur, je pose mon regard sur les trois robes posées sur le fauteuil. Les rousses ne portent pas bien toutes les couleurs mais, mes doigts s'arrêtent sur une robe coupée à l'italienne couleur cobalt qui une fois sur ma peau, contrastera avec ma chevelure. De jolis fils dorés ornementent le tissu soyeux de belle facture et je reste un instant ébahie devant tant de finesse. L'idée n'est-elle pas de se faire remarquer ? Je l'enfile sans difficulté, j'ai tellement peu d'appétit que je ne suis pas bien épaisse, mais les patrons ont fait les choses bien et le tissu tombe parfaitement, donnant plus d'ampleur à mes hanches étroites. J'ajuste mon carré court, jouant à reformer mes boucles de quelques ondulations de l'index, puis, avec une moue peu convaincue j'attrape un ras le cou en soie que la jeune femme m'accroche pour cacher la brûlure qui décore ma peau. Je n'aime pas les bijoux, ni les artifices, mais celui-ci me donne un petit quelque chose de moins sage.

Je prends du recule, observe mon allure et je ne me trouve pas si mal. Mes grands yeux gris n'ont guère besoin d'être plus soutenus, mais je pince un peu mes joues pour leur donner une teinte plus pétillante. Un soupir et je remercie la jeune servante d'un sourire déjà plus détendu. J'enfile mes petits pieds dans mes souliers adaptés et après une dernière vérification je sors de ma chambre. Mes soucis restent en arrière et déjà un léger sourire se dessine sur mon visage quand je descends les marches de l'étage. C'est que j'ai un pari à remporter et par simple goût du jeu, j'ai bien envie de clouer le bec à ce beau Montparnasse.


    [Dans le grand salon]

On annonce déjà l'arrivée de quelques personnes quand mes pieds foulent le sol du grand salon. J'examine d'un coup d'oeil circulaire la pièce, offrant des hochements de tête polis et des sourires aux invités comme à mes collègues. Même Eglantine, la jeune femme sur qui je peine à me décider, bénéficie de mon accueil chaleureux. A maîtriser les masques, on jongle avec avec facilité.

«Sire Edouard Ducastel de la Mortellerie…Dame Cassandre de Castelléo-Dagnard de Monssygnac »

Annonce le chambellan improvisé et je tourne la tête dans leur direction. D'un sourire je les accueille, avançant vers eux non sans détailler les arrivants rapidement.


    -Bienvenue à l'Aphrodite. L'on me nomme Gygy. Puis-je vous être agréable de quelque façon ?

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Sabaude
[ De l'autre coté des jardins, au comptoir du Pacte d'Orphée - Sabaude et Carys, son homme de confiance.]



-Ne serait-il point temps d’y aller, Vôtre Grace ?

-Je n’ai que quelques pas à faire, cesses de me materner, et je n’ai pas envie de passer des heures dehors à attendre. Tu sais comment sont les femmes, à aimer se faire désirer. Leur satisfaction croît dans le terreau de notre mécontentement.

-Vous repoussez surtout le moment où il vous faudra pénétrer dans l’Aphrodite et vous affranchir du passé.

-Je m’en suis déjà affranchi, Carys, en acceptant cette autre main flamande sur moi et en m’éprenant de celui à qui elle appartient.

-Alors qu’est-ce qui vous a poussé à venir vous réfugier ici et à me faire sortir les cuvées spéciales ?

-Ah bougre d’âne, ne vois-tu pas que c’est l’inquiétude qui me ronge ? J’aimerai tant avoir l’assurance que cette réouverture comblera tout le monde.

-Ce n’est que cela ? Détendez-vous des braies. Et débarrassez le plancher !

-Je te signale que c’est moi le propriétaire de l’endroit !

-Et moi votre conscience. Du balai où je vais finir par croire que c’est la marieuse qui vous effraie.



[Devant l'Aphrodite - Sabaude qui attend Vera Von Bretzel]


Vera Von Bretzel, une espiègle limousine bien décidée à débarrasser le Royaume de ses célibataires, qui avait su le surprendre et l’amuser. Il y avait comme un air de nourrice bavaroise à nattes et moustaches dans le sillage du nom de la jeune femme, ce qu’il s’était bien gardé de lui dire à leurs retrouvailles inattendues entre les murs du Secrétariat d’État.

Battant de ses bottes les pavés non loin de l’entrée de l’Aphrodite, Messey voyait ses pensées s’envoler vers des cieux qu’une journée fatiguée couvrait peu à peu d’un voile sombre de pudeur. Verrait-il arriver la donzelle avant que sur des éclats adamantins ne se posent ses prunelles ?

Il avait laissé les futurs mariés à une complicité méritée, laissant battre le cœur de l’établissement au rythme du souffle du Duc. La décision lui avait coûté, mais elle était nécessaire.
De la belle Cassandre, la fille de son successeur à la tête de la Grande Chancellerie de France, il n’avait pas demandé la présence à son bras. Il était inutile d’agiter les langues bifides dès lors qu’ils avaient déjà parus ensembles à d’autres événements. Trop pour que la vertu de sa protégée ne soit pas injustement affublée d’un petite.
Venir seul ? Il y avait songé, mais plus aux regards curieux il semblerait inaccessible et mieux il se porterait.
Puis ne nourrissait-il pas quelques desseins gentiment revanchards pour sa collègue ? Avoir voulu le marier à une inconnue ! La comtesse ne finirait pas la nuit sans quelques prétendants dans son escarcelle, foi de Sabaude !

En attendant, il était là, à guetter dans une posture militaire, l’habit noir taillé sur mesure lui conférant une aura de félin aux aguets.

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Julien1
[Quelque part dans Paris, fuyant les souvenirs d’une chimère]

L’invitation officielle ne l’avait pas étonné, il était bien placé pour être au courant de ses projets.
Ils en avaient causé tous les deux une fois ou l’autre. Il avait même été ravi de revenir à L’Aphrodite, une sorte de pèlerinage. Mais tout s’était effondré à nouveau. Pas qu’il ait espéré grand-chose, loin de là puisque le contrat tacitement passé était clair sur leur situation, mais bon….

Julien était là à déambuler dans les rues de Paris, le visage fermé, un profond sillon creusant son front. Il trainait les pieds, pas franchement pressé de se rendre au rendez-vous. Pourtant, il serait à l’heure, pas en avance comme il aimait à l’être habituellement, mais simplement à l’heure.
Le moral passablement en berne, le brun avait l’impression qu’un petit nuage gris foncé se tenait juste au dessus de lui et le suivait partout. Il sursauta quand les cloches de Notre-Dame donnèrent l’heure. Détournant pudiquement les yeux, il refusa de regarder l’édifice. En fait, tout ici contribuait à le rendre morose.

Se secouant un peu il s’obligea à penser à son rendez vous du jour. Il tourna au coin de la rue…qui tourne justement et aperçut la façade de l’Aphrodite. Quelques changements étaient perceptibles, la lanterne rouge avait disparu…

Au même moment arrivèrent en face deux filles superbes qui avaient décidé de quitter leur Comté. Là bas on les avait prises pour des buses. Alors moi, Julien, je les ai engagées et je ne le regrette pas, car ce sont vraiment de Drôles de Dames.
Tara, Cali et Julien se retrouvèrent pile poil à l’heure convenue devant l’établissement au nom évocateur.


Mes Dames, vous êtes superbes, je vous promets que vous ferez sensation….vous me gâtez !


Il leur tendit un bras chacune, et les entraina vers l’entrée en souriant.

Franchement, entouré comme je le suis, je vais faire des jaloux, je suis très fier que vous ayez accepté de prendre mon…mes bras…et puis peut être pourrais-je m’éclipser plus facilement vers le bar si le besoin comme je le crains s’en fait sentir.

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